À l’assaut des multinationales et de leurs marques

Ce matin Greenpeace était assignée à comparaître devant le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Paris à la demande de Volkswagen à la suite d’une parodie de document d’information que Greenpeace a diffusé sur la Golf7. Les plaignants demandaient, notamment, au juge d’ordonner à Greenpeace de « suspendre toute action visant à nuire à l’image de la marque Volkswagen (…) sous astreinte de 100 000 euros par acte constaté ». La décision du tribunal peut donc être lourde de conséquences pour la liberté d’expression de Greenpeace et des autres acteurs de la société civile autour des multinationales.

A l’heure où nous écrivons, le verdict officiel n’est pas encore disponible mais nous pouvons vous dire qu’un accord a été trouvé : Greenpeace s’est engagée à ne plus diffuser le fameux document, ça tombe bien cela n’entrait pas du tout dans nos plans ! De son côté Volkswagen renonce à la demande de condamnation sous astreinte ainsi qu’au surplus de ses demandes.

La liberté d’expression est donc sauvée…

Cette affaire est l’occasion pour nous de revenir sur nos stratégies de campagne vis-à-vis des marques. Ce récapitulatif non-exhaustif prouve le bien fondé et l’efficacité de ce type de campagne.

Quel est le point commun entre Mattel, Volkswagen, Dove et Nestlé ? Leurs mauvaises pratiques environnementales ou leurs liens commerciaux avec des entreprises peu respectueuses de l’environnement. Greenpeace a donc mené campagne pour infléchir leurs politiques destructrices et sauver le climat.

Greenpeace est connue pour n’avoir pas froid aux yeux : elle n’hésite jamais à s’attaquer aux pouvoirs politiques, financiers, économiques, ainsi qu’aux entreprises. Elle dénonce les crimes environnementaux dont ils sont responsables, et exige d’eux des changements et des engagements. Récemment, Greenpeace a concentré ses attaques contre de très grandes entreprises et leurs marques emblématiques.

Changements climatiques, déforestation… Aujourd’hui, le constat est clair : les grandes entreprises font partie des principaux responsables de la catastrophe environnementale actuelle. Pourtant très attentives à leur réputation, elles tentent de verdir l’image de leurs marques, mais sans s’engager véritablement.

Volkswagen, leader du côté obscur de la force
En Europe, les grands groupes sont rassemblés au sein d’une sorte de Medef, nommé « Business Europe ». Celui-ci a suffisamment d’influence pour faire et défaire les politiques européennes, notamment sur le climat. Les équipes de Greenpeace ont enquêté sur les positions de nombreux groupes, mais aussi sur la façon dont certains tentent, via un lobbying très efficace, de bloquer toute évolution législative contraignant. Deux camps assez distincts se sont alors dessinés : d’un côté, les entreprises qui se sont engagées publiquement en faveur des – 30 % ; de l’autre, celles qui y restent totalement réfractaires. En tête de ce second clan : Volkswagen, le premier constructeur automobile européen. C’est donc contre ce géant allemand que Greenpeace a lancé son offensive. En parodiant une très célèbre publicité de la marque reprenant l’univers de la saga Star Wars et en mobilisant des centaines de milliers d’internautes européens, la campagne menée contre Volkswagen a réussi à faire connaître la mauvaise influence du groupe automobile sur la politique climatique européenne.

 

L’ogre indonésien Sinar Mas
Autre continent, autre péril environnemental : la déforestation galopante qui sévit en Indonésie. Mais qui, en France ou en Europe, connaît réellement son principal responsable, le géant indonésien Sinar Mas ? Mener campagne uniquement en Indonésie, en demandant au gouvernement d’appliquer les lois et à Sinar Mas d’évoluer, ne suffit donc pas.
En 2008 démarrait ainsi une campagne contre le shampoing Dove, marque mondialement connue, appartenant au géant Unilever.

La multinationale était accusée de se fournir en huile de palme auprès de la branche agricole de Sinar Mas, Golden Agri-Resources. La campagne fut accompagnée d’actions spectaculaires ; des militants déguisés en orangs-outans escaladèrent même le siège de la multinationale. Face à la pression, Unilever accepta de rompre ses contrats avec son fournisseur et d’adopter une politique d’approvisionnement plus responsable. Deux ans plus tard, le groupe Nestlé, qui s’approvisionnait lui aussi auprès de Sinar Mas, était à son tour pris pour cible.

Même technique, même résultat ! Grâce aux effets combinés de ces deux campagnes, Golden Agri-Resources s’engagea finalement à stopper ses activités les plus destructrices.

Episode suivant, celui qui voit s’affronter Greenpeace à Asia Pulp & Paper (APP), la filiale pâte à papier de Sinar Mas. Nos enquêtes de terrain ont démontré que les fournisseurs des géants du jouet Mattel, Lego, Disney et Hasbro travaillent avec APP. D’où l’idée de la campagne Barbie.

Cette vidéo illustre le fait que Mattel se rend complice, indirectement, d’une firme criminelle. Après des semaines de mobilisation sur Internet et de nombreuses actions, Mattel s’est engagée à changer de politique d’approvisionnement. Et, par effet domino, le groupe Lego a pris les devants et demandé à ses fournisseurs de rompre avec APP.

Quand ces grandes marques sont mises face à leurs responsabilités, elles n’ont souvent pas d’autre choix que d’user de leur influence colossale pour faire cesser des pratiques souvent peu connues, mais dramatiquement ravageuses. Pour preuve la campagne « Detox » de Greenpeace lancée à l’été 2011 qui a fait plier des géants comme Adidas, Nike, Puma et d’autres…