Agriculture et dérèglements climatiques
L’agriculture est l’une des causes du bouleversement climatique. Elle est en effet responsable de près d’un quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre lorsque l’on prend en compte la déforestation (dont les raisons sont souvent d’origine agricole).
Comment l’agriculture cultive-t-elle les émissions de gaz à effet de serre ?
Les émissions de gaz à effet de serre (GES) et les dérèglements climatiques sont souvent associés dans nos esprits aux rejets industriels ou à nos déplacements en voiture. On ne sait pas assez que l’agriculture y participe grandement à travers deux gaz moins connus que le CO2 :
- Le méthane, un gaz au pouvoir de réchauffement 28 fois plus élevé que celui du CO2 et qui serait responsable d’environ 20 % de l’accroissement de la température (+ 1 ºC) observé au cours du siècle. Ce gaz est émis par les ruminants, mais aussi par certaines techniques de riziculture.
- Le protoxyde d’azote, lié à l’utilisation d’engrais azotés.
À ces émissions s’ajoutent celles liées à la déforestation, puisque celle-ci est très souvent motivée par la conversion de zones forestières en terres agricoles qui servent à produire l’alimentation du bétail ou à le faire pâturer. Or la déforestation est à l’origine de 17 % des émissions mondiales de GES. Agriculture et déforestation sont ainsi responsables d’un quart des émissions mondiales de GES (24 % plus précisément, d’après le rapport 2014 du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sur l’atténuation des changements climatiques).
L’adoption de techniques agricoles alternatives et la lutte contre la déforestation sont donc indispensables pour réduire ces émissions. Il est également nécessaire de changer nos habitudes alimentaires afin de soutenir ces changements.
L’agriculture, victime du dérèglement climatique
Ces changements sont d’autant plus nécessaires que l’agriculture serait l’une des principales victimes du dérèglement climatique à venir si l’augmentation de la température moyenne mondiale dépassait les 2 °C d’ici à 2100.
De par sa nature, le secteur agricole est en effet très sensible aux aléas climatiques. De plus, les systèmes de culture actuels, comme les monocultures, requièrent un climat stable et des conditions idéales. Certains cultures ont des besoins très spécifiques et ne poussent que dans des conditions géographiques et climatiques spécifiques. Ainsi, l’agriculture industrielle se porte préjudice en contribuant aux changements climatiques.
Les dérèglements climatiques menacent donc directement la souveraineté alimentaire mondiale. Et ses effets se font d’ailleurs d’ores et déjà ressentir, y compris en France. Par exemple, en Champagne, les vendanges ont lieu en moyenne deux semaines plus tôt qu’il y a 20 ans. Dans les décennies à venir, des conditions climatiques inhabituelles risquent de devenir de plus en plus courantes avec une multiplication de phénomènes météorologiques aussi extrêmes que variés, tels que :
- Les vagues de chaleur, les sécheresses et la désertification.
- La salinisation des terres.
- Les variations imprévisibles de la pluviosité.
- La réduction des réserves en eau par endroits, les inondations et la prolifération des parasites et des maladies dans d’autres.
Dérèglements climatiques et inégalités
Les populations les plus touchées par les variations climatiques sont les plus pauvres et les plus dépendantes des fluctuations des prix des matières premières. L’injustice climatique renforce les inégalités économiques et sociales.
Quelles solutions ?
Pour réduire les émissions de GES du secteur agricole, il est nécessaire d’engager une transition vers une agriculture écologique en changeant les pratiques agricoles et en repensant notre consommation. Cela passe par :
- Une optimisation de la fertilisation azotée des sols. Le recours aux engrais azotés de synthèse, plus particulièrement à l’azote et au phosphore, doit être limité au strict minimum. L’objectif de l’agriculture écologique est de restituer, au bon moment et en quantités adéquates, tous les types de fumier et de résidus alimentaires dans les terres agricoles.
- Une transition vers un élevage écologique, c’est-à-dire produire moins, mieux et de façon plus équitable. L’élevage écologique n’a recours qu’aux terres et aux ressources agricoles qui ne sont pas directement utilisables pour l’alimentation humaine. Sa mise en œuvre implique donc de réduire notre cheptel mondial, en particulier en Europe, pour privilégier des systèmes extensifs, à base d’herbe pour les ruminants. Ces systèmes extensifs sont la plupart du temps moins émetteurs de GES. Un élevage écologique jouerait également un rôle clé dans les agroécosystèmes en contribuant notamment à optimiser la fertilisation des sols. À court terme, une meilleure gestion du lisier/fumier peut permettre de diminuer également les GES même si une réduction du cheptel reste nécessaire.
- La préservation des sols. Il est indispensable d’avoir un sol en bonne santé, capable de fixer les nutriments et donc de stocker du carbone. Certaines pratiques agroécologiques permettent d’augmenter la quantité de carbone contenue dans les sols, comme les cultures de couverture.
- L’amélioration de la production de riz. La riziculture par inondation est responsable de près de 10 % des émissions de méthane. Or, en asséchant les rizières hors-saison et en utilisant la bonne quantité d’eau (plutôt qu’en inondant), il est possible de réduire facilement ces émissions.
Pour le climat, un coup de fourchette magique !
Le premier moyen de réduire les émissions de GES de l’agriculture française, c’est de revoir ce que l’on met dans nos assiettes, et notamment de manger moins et mieux. Voici quelques conseils faciles à suivre :
- Moins gaspiller.
- Consommer moins de produits transformés et emballés.
- Manger bio, local et de saison.
- Manger moins de viande, d’œufs et de produits laitiers. Greenpeace recommande ainsi un maximum d’environ 12 kg de viande issus de l’élevage écologique par personne et par an (soit environ 230 g par semaine) et 26 kg de lait par personne par an (soit un demi litre de lait par semaine). Le choix de chacun d’adopter un régime végétarien ou végétalien permet également de contribuer encore plus à l’effort collectif de réduction de la consommation de produits animaux. Adopter une alimentation divisée par deux en protéines animales dégagerait assez de nourriture pour deux milliards de personnes supplémentaires !
Plus généralement, il faut abandonner l’agriculture industrielle, destructrice de l’environnement et fortement émettrice de gaz à effet de serre, et favoriser l’agriculture écologique, qui préserve la biodiversité, les eaux et les sols.
C’est une évidence : plus on augmente le nombre d’espèces ou de variétés présentes dans un champ ou un écosystème, plus forte est la probabilité qu’au moins certaines d’entre elles puissent faire face aux variations climatiques. De la diversité découle la sécurité alimentaire.