DLH : un dossier dans les rouages de la justice française depuis 8 ans
Un tronc d’arbre africain coupé par l’entreprise DLH, dans le port de Leixoes, au Portugal (2000). Le 18 novembre 2009, Greenpeace et d’autres ONG ont déposé une plainte visant la filiale française de DLH, l’un des plus importants marchands de bois au monde. Elles accusent DLH-France d’avoir acheté de 2000 à 2003 du bois au Libéria au mépris de la législation en vigueur et alors que le pays était en pleine guerre civile. Pire : ce trafic aurait financé le régime sanguinaire de Charles Taylor.
En 2009, ces parties civiles avaient porté plainte pour délits de recel de trafic d’influence et de destruction de biens d’autrui concernant le commerce de bois de l’entreprise DLH au Libéria du temps de la guerre civile, sous le régime de Charles Taylor lui-même condamné pour crimes de guerre et contre l’humanité.
Plus de 8 ans que ce dossier est dans les rouages des juridictions répressives françaises sans qu’aucune investigation judiciaire n’ait été réellement menée.
Cette affaire illustre le parfait immobilisme des juridictions dans le domaine du bois illégal. Pourtant les institutions européennes et INTERPOL n’hésitent pas à clamer la nécessité de lutter à grande échelle contre ce fléau, notamment au nom du climat.
Passer de la parole aux actes : la justice doit trancher
En août 2017, plus de 70 militants de 12 pays européens ont bloqué les machines abattant des arbres dans la forêt primaire de Bialowieza, en Pologne. Les militants protestaient contre l’abattage illégal de bois dans cette forêt classée au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Le 3 mars 2013, un règlement européen historique pour l’environnement et les forêts de la planète entrait en vigueur. Ce Règlement sur le Bois de l’Union Européenne est le fruit d’une campagne de plus de dix ans de la part d’ONG comme Greenpeace : il doit aujourd’hui être appliqué dans tous les pays de l’Union. En 2015, afin de ne pas perdre plus de temps et de garantir la poursuite par la France de la mise en oeuvre de ce RBUE, Greenpeace décidait d’écrire officiellement à la Commission européenne pour l’avertir des manquements de la France en matière d’application du règlement.
En octobre 2014, huit activistes de Greenpeace procédaient à une mise sous scellés symbolique de bois brésilien et congolais sur le port de La Rochelle (La Pallice) en Charente Maritime. Il s’agit de bois illégaux ou suspectés d’illégalité. Par cette action, les militants dénonçaient l’inaction des autorités françaises et l’attitude des importateurs, qui n’avaient rien changé à leurs habitudes à l’égard de pays et des fournisseurs à très haut risque d’illégalité.
Dans cette ville de La Rochelle – plateforme internationale du bois – Greenpeace France a déposé une plainte avec constitution de partie civile début 2016 notamment pour délit de manquement à l’obligation de « diligence raisonnée » de certains importateurs de bois français depuis les concessions COTREFOR de la République démocratique du Congo (RDC). Cette infraction est punie de deux ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende, montant pouvant être quintuplé pour les entreprises (article 76 de la loi n°2014-1170).
Les militants de Greenpeace en action contre le navire Safmarine Sahara, un vaisseau cargo entrant dans le port de La Rochelle, chargé de bois illégal venant de République Démocratique du Congo (2014).
En décembre 2017, l’avocate de Greenpeace France a demandé au juge d’instruction en charge du dossier l’audition des dirigeants d’entreprises françaises dont notamment PELTIER, F. JAMMES, ANGOT BOIS, ABEX et TROPICAL WOOD TRADING afin qu’ils s’expliquent sur les faits reprochés.
Certaines d’entre elles ont été contrôlées par l’autorité administrative, le ministère de l’Agriculture et l’Alimentation (MAA). Cependant, ces inspections, censées être réalisées « sans avertissement préalable » à l’entreprise mais qui en pratique est parfois prévenue à l’avance, concluant au respect des exigences réglementaires ne paraissent pas fondées. Déjà en 2016, Greenpeace France alertait sur l’incohérence des premiers contrôles relevant des manquements sans que cela ne soit suivi d’effets.
En 2014, les militants de Greenpeace dénonçaient déjà le laxisme de la France en matière de bois illégal et son rôle dans la destruction de la forêt tropicale de République Démocratique du Congo (2014).