Après 20 ans de bons et loyaux services, l’Esperanza part à la retraite
Durant ces années, l’Esperanza a fait face aux harpons des pirates et des baleiniers, accueilli des scientifiques pour étudier le milieu océanique, embarqué des journalistes pour dévoiler les crimes commis loin des regards. Il s’est interposé à de nombreuses reprises, au nom du peuple et de la planète, contre celles et ceux qui étaient prêts à sacrifier les deux au nom du profit et du pouvoir.
L’Espy (c’est ainsi que le surnomment les membres de Greenpeace), a emmené nos activistes dans les régions du monde les plus reculées et inaccessibles, qui sont souvent les plus vulnérables aux désastres humanitaires et écologiques. Il a notamment convoyé de l’aide et un soutien humanitaire aux populations dans le besoin après le séisme de 2010 en Haïti, ou après le typhon Bopha de 2012, qui avait dévasté des régions entières des Philippines.
Navire le plus rapide de la flotte de Greenpeace, il était également utilisé pour arrêter les crimes environnementaux commis par des navires à grande vitesse que peu d’autres pouvaient rattraper. Grâce à sa capacité à naviguer dans les glaces, il a aussi participé à de nombreuses expéditions polaires.
Début 2022, l’Esperanza est arrivé à sa dernière escale à Gijón, en Espagne, où il sera démantelé dans le respect des normes environnementales les plus strictes.
L’histoire de l’Esperanza s’est construite sur la somme des actions menées par son équipage dévoué et efficace, les militant·es et les bénévoles courageux qui y ont séjourné, les équipes qui y ont fait campagne, et de la ferveur de toutes celles et ceux qui ont suivi ses aventure et qui l’ont soutenu à chaque étape de son voyage. A toutes et tous : merci !
La flamme de l’espoir de l’Esperanza continuera de briller longtemps dans notre combat et notre engagement permanents pour la protection de notre fragile planète.
L’épopée de l’Esperanza : 2000-2022
2000 : L’espoir est né
Avant de rejoindre la flotte de Greenpeace en 2000, le navire (qui était à l’origine un navire russe de lutte contre les incendies) était connu sous le nom d’ « Echo Fighter ». Le premier équipage de Greenpeace à bord recouvre le « h » pour obtenir « Eco Fighter« , mais lorsque l’organisation commence à rénover le navire dans le respect des normes environnementales, un vote en ligne est organisé pour choisir un nom définitif. Des milliers de militants en Argentine et dans d’autres pays hispaniques y voient une opportunité historique pour que le premier navire de Greenpeace porte un nom espagnol. Ce sera l’ »Esperanza » !
2002 : Lancement, action contre la déforestation et rencontre avec l’icône de la lutte contre l’apartheid
Après sa conversion écologique, l’Esperanza est officiellement lancé dans son port d’attache d’Amsterdam début 2002. S’ensuit une série d’actions contre le bois illégal importé dans toute l’Europe, notamment en Espagne, en France, aux Pays-Bas, en Allemagne et en Italie, visant à dénoncer l’incapacité des gouvernements européens à lutter contre l’abattage destructeur des dernières forêts anciennes du monde. Plus tard dans l’année, au Cap, l’archevêque Desmond Tutu « bénit » le navire et souhaite bonne chance à l’équipage pour construire un monde propre, pacifique et sans nucléaire.
2003 : Défense des forêts et des peuples autochtones
L’expédition « Forêts en danger, libertés en danger » de l’Esperanza dans la forêt nationale de Tongass en Alaska vise à mettre en lumière les coupes à blanc et l’exploitation forestière à grande échelle pratiquées par l’administration Bush. De nombreux membres des communautés locales, dont les peuples autochtones Tlingit, accueillent le navire en offrant hébergement à l’équipage et un soutien logistique. Cette même année, des membres de l’équipage de l’Esperanza sont arrêtés pour la première fois, au large de Gibraltar, alors qu’ils protestent contre l’importation illégale de pétrole.
2005 : Affrontements avec les baleiniers
Lors d’une expédition conjointe avec l’Arctic Sunrise contre la chasse à la baleine dans l’océan Austral, l’Esperanza est percuté par le Kyo Maru, un navire baleinier japonais, alors qu’il tente d’empêcher le transfert d’un petit rorqual mort vers le navire-usine Nisshin Maru.
2006 : Défendons nos océans
Encouragé par le succès des confrontations contre la chasse à la baleine de 2005, l‘Esperanza entame une expédition autour du monde de 18 mois, couvrant la pêche pirate en Afrique de l’Ouest, la Méditerranée, l’Inde, Singapour, la pêche dans les îles du Pacifique, les Philippines, les États-Unis (Hawaï, Californie) et le Mexique.
2008 : Contre la destruction de la forêt indonésienne
L’Esperanza lance la première action de Greenpeace Indonésie contre la destruction des forêts en bloquant le navire Gran Couva, qui transporte une énorme cargaison d’huile de palme brute. Les membres de l’équipage ont escaladé la coque du navire pour y peindre des messages appelant le gouvernement indonésien à protéger les forêts contre la déforestation résultant des industries de l’huile de palme et de la pâte à papier.
2010 : A la poursuite de déchets nucléaires
Pendant plusieurs semaines, l‘Esperanza poursuit le Kapitan Kuroptev, parti de France pour la Russie chargé de déchets radioactifs dont veut se débarrasser l’industrie nucléaire française. Plusieurs actions d’interposition ont lieu en mer du Nord pour dénoncer ce trafic dangereux.
2011 : En action en Arctique
L’Esperanza échappe à la marine danoise au large du Groenland et son équipage grimpe sur la plateforme pétrolière Leiv Eriksson de Cairn Energy, qui s’apprête à entamer des forages en eaux profondes dans l’Arctique. Cette confrontation, à laquelle se sont joints Kumi Naidoo, alors directeur de Greenpeace International, et Paul Simonon, bassiste du groupe The Clash, ouvre la voie à une campagne mondiale contre l’exploitation pétrolière en Arctique.
2013 : Surveillance de la surpêche dans l’océan Indien
De retour du Pacifique, l’Esperanza met le cap sur l’océan Indien pour documenter la pêche illégale de thon et notamment l’utilisation des dispositifs de concentration de poissons (DCP), des engins de pêche particulièrement destructeurs.
2014-2015 : Stop aux combustibles fossiles
Les expéditions s’enchaînent autour du globe pour dénoncer les projets d’exploitation pétrolière qui accélèrent la fonte des glaces polaires et le changement climatique. Greenpeace demande l’interdiction des forages en Arctique et la sanctuarisation des zones inhabitées autour du pôle Nord.
2016 : Campagne contre la pêche illégale
Pour faire face à la pêche illégale, non réglementée et non déclarée, l’Esperanza reprend son travail de documentation dans l’océan Indien à la recherche de DCP (dispositifs de concentration de poissons) à l’aide de drones fonctionnant à l’énergie solaire. Puis il se rend en Grande-Bretagne pour demander aux supermarchés britanniques de ne plus commercialiser de thon issu de pratiques de pêche non durables.
2017-2019 : Exploration du Récif de l’Amazone
Au large du Brésil puis de la Guyane, l’Esperanza part à la découverte du Récif de l’Amazone, menacé par des compagnies pétrolières dont Total. Le bateau permet notamment de réaliser les toutes premières images de ce biome et d’organiser les toutes premières plongées en eaux profondes dans la zone.
2019-2020 : Du pôle Nord au pôle Sud
L’Esperanza et l’Arctic Sunrise entreprennent conjointement l’une des plus grandes expéditions jamais réalisées par Greenpeace : un voyage de près d’un an, de l’Arctique à l’Antarctique, pour mettre en lumière la beauté des océans et les menaces qui les guettent, et plaider en faveur d’un traité mondial des Nations unies sur haute mer. Des scientifiques et des célébrités, dont Marion Cotillard, participent à cette expédition qui a débuté par un concert « glacé ».
2021 : Stop à la pêche destructrice
Au large des côtes britanniques, l’équipage de l’Esperanza largue d’énormes blocs de granit pour dissuader les chalutiers de ratisser les fonds marins. Cette barrière de granit permettra d’empêcher le chalutage sur environ 140 km2, dans un site qui est censé être une aire marine protégée (AMP).
Fin du voyage
En octobre 2021, l’Esperanza mène une dernière action dans le port de Sagunto (Espagne) pour bloquer l’arrivée d’une cargaison de gaz fossile. Greenpeace dénonce le recours au gaz et autres combustibles fossiles, qui ne font qu’aggraver la crise climatique et la hausse des prix de l’énergie. Une fois l’ancre du bateau et les membres d’équipage relâchés par les autorités espagnoles, l’Esperanza, à bout de souffle malgré les travaux d’amélioration effectués au fil des années par l’équipage, tire définitivement sa révérence.