Bruxelles, le 14 mars – À l’occasion du Conseil de Printemps des 13 et 14 mars, les chefs d’État et de gouvernement européens ont répliqué les discussions du Conseil de mars 2007, sans parvenir à réviser à la hausse les ambitions de l’UE en matière de lutte contre les changements climatiques. La France, qui va prendre la présidence européenne le 1er juillet prochain, doit faire mieux. « Le Conseil de printemps 2008 n’est qu’une redite de la version 2007, assorti d’un discours protectionniste qui ne vise qu’à apaiser les industries les plus polluantes », déplore Karine Gavand, chargée de campagne Climat à Greenpeace.
Réduction des émissions de gaz à effet de serre : un objectif insuffisant
Il y quatre mois à Bali, lors de la réunion des Nations unies sur le climat, l’UE acceptait une réduction comprise entre 25 et 40 % de ses émissions d’ici à 2020, suivant ainsi les recommandations du Giec. Pourtant le paquet climat-énergie publié le 23 janvier dernier limitait cet objectif à 20 %. Aujourd’hui, le Conseil de Printemps avait l’occasion de pousser les pays membres à adopter l’objectif nécessaire et accessible de -30% d’ici à 2020. « Greenpeace déplore que la Slovénie n’ait pas été à la hauteur du défi, poursuit Karine Gavand. À partir de juillet, la France devra faire adopter cet objectif unilatéral de 30 % de réduction des émissions, seule façon de faire de l’Europe la locomotive des négociations sur le climat. »
Agrocarburants : le débat doit être tranché
En mars 2007, l’UE s’était fixé l’objectif d’intégrer 10 % d’énergies renouvelables dans le domaine des transports, ce qui, en clair, signifiait le développement débridé des agrocarburants. Depuis, les preuves s’accumulent, qui démontrent que cet objectif ne pourra être réalisé sans nuire à la préservation des forêts, à la souveraineté alimentaire ou au prix des denrées alimentaires. « Le Conseil de printemps aurait pu reconsidérer la place des agrocarburants dans le paquet climat-énergie. Il a échoué, déplore Jérôme Frignet, chargé de campagne Forêt à Greenpeace. Il serait tout à l’honneur de la France d’ouvrir sa présidence par l’abandon officiel de cet objectif chaque jour plus controversé. »
Efficacité énergétique : la déception
Greenpeace regrette le silence des dirigeants européens sur l’efficacité énergétique, le grand absent du paquet climat-énergie. « Le potentiel d’économies d’énergie est considérable. La Commission le dit: l’Europe continue à gaspiller 20 % de son énergie par manque d’efficacité* », rappelle Karine Gavand. Les chefs d’État se sont engagés, en mars 2007, à économiser 20 % de la consommation d’ici à 2020. Mais l’Europe a échoué à donner à cet objectif un caractère juridiquement contraignant, contrairement à ce qu’elle a su faire sur les renouvelables. « C’est dommage : améliorer l’efficacité, c’est la moitié de la solution aux changements climatiques, reprend Karine Gavand. C’est aussi la meilleure réponse aux enjeux d’indépendance énergétique. Espérons que la France saura remettre l’efficacité au cœur de la politique climatique européenne. »
* http://ec.europa.eu/energy/action_plan_energy_efficiency/doc/com_2006_0545_fr.pdf
Les « fuites de carbone » : des inquiétudes prématurées
Les entreprises, qui menacent de délocaliser sous prétexte que l’UE leur impose trop de contraintes en matière de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre, ont trusté le débat du Conseil de printemps. « Il est légitime de prendre en compte les enjeux de compétitivité dans les secteurs de l’industrie et de l’énergie. Mais leurs craintes sont autant exagérées que prématurées : si fin 2009, à Copenhague, aucun accord n’impose de contraintes à l’ensemble des pays les plus pollueurs, alors il faudra étudier sérieusement les risques, aujourd’hui non prouvés, qui pèsent sur les entreprises européennes », conclut Karine Gavand.