Après des mois de suspense, c’est maintenant officiel : le groupe allemand Danzer vend sa filiale Siforco.
La Siforco gère plus de 2 millions d’hectares de concession forestière en République Démocratique du Congo. Toutes ses opérations sont vendues au groupe américain Blattner Elwyn (GBE) depuis le 23 février. Cette vente signe la fin de 40 ans de présence de Danzer en RDC, 40 années marquées par de nombreux conflits sociaux et une dégradation continue des forêts naturelles.
Le groupe Danzer pourrait échapper à la justice
Nous révélions le rôle de Danzer dans les violences subies par la communauté de Yalisika : un villageois – Frédéric Moloma Tuka – est mort, et plusieurs femmes ont été violées, y compris des mineures. D’autres personnes ont été battues, tandis que 16 personnes ont été arrêtées et emmenées.
Un plainte au civil a été déposée par la communauté villageoise contre la Siforco et son chef de chantier. A peine la déclaration de vente signée, ce même chef de chantier, que plusieurs témoins ont vu payer les militaires le soir des évènements, s’envolait pour l’Europe. Par souci de justice pour les populations de Yalisika, le groupe Danzer doit répondre des actes de ses employés et de sa filiale Siforco devant la justice congolaise.
Quelle leçon pour les forêts du Congo ?
Dans son communiqué annonçant la vente, Danzer affirme que le repreneur poursuivra les efforts engagés pour la protection des forêts.
Pourtant, quelques jours plus tard, le Groupe Blattner Elwyn annonçait clairement son intention de ne pas poursuivre dans la voie de la certification FSC (Forest Stewardship Council, mécanisme garantissant une gestion durable au point de vue environnementale et sociale des forêts).
C’est le mythe de la « gestion durable des forêts » qui s’effondre : encouragée à grand renfort de subventions et de prêts bonifiés par les bailleurs internationaux, dont l’Agence française de développement (AFD), cette pseudo « gestion durable » montre une fois de plus ses limites. Les compagnies pillent les forêts, exploitent les populations, empochent les bénéfices et tirent leur révérence .
Et demain ?
Le nouveau propriétaire de la Siforco n’est pas inconnu de Greenpeace puisque nous dénoncions en 2008 des activités de vente de bois illégale par une autre filière du groupe en RDC.
Greenpeace attend aujourd’hui du Groupe Blattner Elwyn qu’il s’engage sur les points suivants :
Rendre les concessions de la Siforco situés dans des aires protégées pour que puissent s’y développer des projets de conservation et de gestion communautaire
Mettre en place des projets crédibles d’aménagement et de gestion concertés avec les communautés locales
S’engager à ne pas exploités les paysages de forêt intacte et les forêts à haute valeur de conservation dans ses concessions
Mais le meilleur moyen de préserver les forêts naturelles du bassin du Congo, c’est encore de renforcer les outils de contrôle, et de soutenir les initiatives de conservation locales. Il est temps que l’AFD et les bailleurs internationaux remettent sérieusement en cause leur politique de soutien à l’industrie du bois tropical.