Après plusieurs semaines de mobilisation des agricultrices et agriculteurs en France, et face aux réponses inadaptées de la part du gouvernement, Greenpeace France a mené ce matin des actions simultanées sur cinq entreprises et un syndicat qui incarnent le système agroindustriel actuel et sont responsables de la crise sociale et environnementale qui touche aujourd’hui ce secteur. Greenpeace demande une meilleure rémunération des agriculteurs, la définition d’un cap clair pour mettre en œuvre la transition de notre système agricole et un encadrement strict des pratiques de l’agro-industrie.
Tôt ce matin, une trentaine d’activistes, de militantes et de militants de Greenpeace ont mené des actions simultanées dans six villes françaises, ciblant ainsi quatre entreprises de l’industrie agroalimentaire, un géant de la grande distribution et le syndicat agricole majoritaire, pour pointer leur culpabilité dans la crise agricole et la paupérisation des agriculteurs, ainsi que leur rôle dans les accords de libre-échange décriés par une grande partie du monde paysan.
- À Sablé-sur-Sarthe (72), des activistes ont démonté le logo du groupe LDC, premier producteur de volailles en France, propriétaire des marques Le Gaulois et Maître Coq. Le système de production du groupe empêche les éleveurs d’être autonomes dans leurs pratiques et les met en concurrence avec d’autres éleveurs sur le marché international. À la place des logos lumineux LDC et Le Gaulois, les activistes ont déployé une banderole de plusieurs mètres « LDC se gave : agrobusiness coupable ».
- À Bruz (35), sur le site du groupe agroindustriel et financier Avril, présidé par Arnaud Rousseau, des activistes ont retiré le logo et l’ont remplacé par une immense banderole « Avril se gave : agriculteurs exploités ». Le poids politique et économique du groupe Avril en fait un des mastodontes du secteur, et l’un des tenants de la politique d’industrialisation de l’agriculture française.
- À Paris, des militants ont déboulonné la plaque de la FNSEA, syndicat agricole également présidé par Arnaud Rousseau, dont les dirigeants représentent les intérêts de l’agroindustrie et de quelques agro businessmen plutôt que le monde paysan. Les militants ont déployé une banderole devant l’entrée portant l’inscription « Agrobusiness coupable ».
- À Lisieux (14), le panneau de l’usine Lactalis-Nestlé a été remplacé par la banderole « Agrobusiness coupable ». Premier groupe mondial de produits laitiers, cette multinationale s’enrichit sur le dos des éleveurs mais aussi des consommateurs, en multipliant les scandales sanitaires et financiers. La fortune d’Emmanuel Besnier, PDG de Lactalis, s’élève à plus de 13,5 milliards d’euros.
- À Toury (28), c’est le géant Bayer, numéro un mondial des semences et des pesticides, qui a été ciblé. Son logo a été remplacé par une banderole « Agrobusiness coupable ». Bayer est l’un des plus puissants lobbys de l’agrochimie, commercialisant le Round Up (produit à partir du glyphosate) et des semences, en particulier des OGM. Les effets de ses produits sur la santé (des agriculteurs et des consommateurs) et l’environnement sont délétères.
- À Landerneau (29), c’est le tout premier Leclerc de France qui a été à son tour délesté de son logo, remplacé par une grande banderole « Leclerc se gave : agriculteurs exploités ». Comme de nombreux autres distributeurs, le groupe Leclerc, dont le chiffre d’affaires a augmenté de 4% en 2022 pour atteindre près de 44 milliards d’euros, fait des bénéfices sur le dos non seulement des agriculteurs mais aussi des consommateurs, en pratiquant des marges colossales sur ses produits et en menant de surcroît ses négociations commerciales de façon opaque.
Pour plus d’informations sur chaque site ciblé, les problématiques et les demandes de Greenpeace, consultez notre dossier de presse ici.
L’agrobusiness nourrit les injustices
« Il est temps de rétablir la vérité et de dénoncer au grand jour les vrais coupables de l’impasse dans lequel notre système agricole se trouve actuellement, explique Sandy Olivar Calvo, chargée de campagne Agriculture à Greenpeace. Les politiques agricoles ont favorisé une dynamique d’industrialisation massive de notre système de production, et les politiques commerciales ultra-libérales menées par les gouvernements successifs depuis des décennies en sont responsables. Il n’est plus tolérable que les agriculteurs qui nous nourrissent ne puissent pas vivre dignement de leur travail. Il n’est plus tolérable qu’ils soient soumis à la concurrence déloyale des marchés internationaux, à la toute-puissance des géants de la grande distribution qui fixent seuls les prix, ou à la domination des agroindustriels qui les rendent dépendants d’un système délétère. »
Pour Greenpeace, les pratiques des industries agro-alimentaires doivent être encadrées par les pouvoirs publics, et les agricultrices et agriculteurs doivent avoir un cap clair, planifié et ambitieux et être soutenus pour mettre en œuvre la transition agro-écologique. C’est la condition sine qua non pour qu’ils puissent vivre dignement et pour garantir le droit à une alimentation saine pour tout le monde et adaptée aux défis écologiques de notre siècle.
Cette action intervient à quelques jours de l’ouverture du salon international de l’agriculture à Paris, et alors que le gouvernement est en train de revoir sa copie quant à la loi d’orientation et d’avenir agricoles (LOA). Celle-ci risque de marquer des reculs pour l’écologie et l’avenir de notre agriculture, sans relever pour autant le défi majeur du renouvellement des générations agricoles.