Bilan décevant après la Conférence sur la sécurité alimentaire mondiale, le changement climatique et la bio-énergie.
La déclaration finale de la Conférence sur la sécurité alimentaire mondiale, le changement climatique et la bio-énergie, qui s’est tenu à Rome du 3 au 5 juin sous l’égide de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation), n’apporte guère d’enseignements sur la façon dont les gouvernements envisagent de réagir à la hausse des prix des denrées alimentaires et ses conséquences environnementales. Une évolution radicale des pratiques agricoles et des modalités des échanges mondiaux de matières premières est pourtant nécessaire.
Une nourriture en quantité plus importante et de meilleure qualité peut être produite sans pour cela détruire les économies rurales et les ressources naturelles. A l’échelle locale, des méthodes socialement et écologiquement responsables sont la solution. Il est regrettable que la déclaration finale ne fasse aucune référence aux conclusions du récent rapport publié par le IAASTD (Comité international d’évaluation des sciences et technologies agricoles pour le développement), qui vont dans ce sens.
Ce rapport, rédigé par plus de 400 scientifiques et approuvé par plus de 60 pays, conclut qu’il y a un besoin urgent d’abandonner une agriculture industrielle destructive et polluante pour adopter des pratiques agricoles modernes et écologiques, préservant la biodiversité et bénéficiant aux communautés locales. Le rapport conclut également que des techniques telles que l’ingénierie génétique (OGM) ne sont pas une solution à l’explosion des prix alimentaires, la pauvreté, la perte de biodiversité et le changement climatique.
« Nous devons travailler avec la nature et non contre elle, affirme Jérôme Frignet, chargé de campagne Forêts de Greenpeace France. Les gouvernements doivent rejeter les systèmes très coûteux dépendant des énergies fossiles, produits chimiques toxiques et génie génétique. Les pratiques agricoles susceptibles de réduire les prix alimentaires tout en augmentant la productivité sont écologiques et se concentrent sur des petites exploitations. Le « business as usual » n’est pas une option. »
Une inflexion radicale des politiques concernant les agrocarburants est également nécessaire. « En premier lieu, il est urgent de mettre un terme aux politiques d’incitations tous azimuts, avec l’arrêt des subventions gouvernementales et l’abandon des objectifs irréalistes et dangereux d’incorporation d’agrocarburants », poursuit Jérôme Frignet. Si la prise de conscience est réelle, les progrès concrets sont lents. A la récente conférence des Nations-Unies sur la Diversité Biologique, le Brésil s’est ainsi opposé, avec succès, à la mise en place de mesures visant à empêcher la destruction de forêts tropicales au profit de plantations d’agrocarburants. Les Etats se sont tout juste accordés sur la nécessité de discuter de critères de développement durable… à l’avenir. D’ici là, les pays européens peuvent continuer à utiliser des agrocarburants d’origine non durable.
NOTES
(1)Le IAASTD est une collaboration originale, mise en place par la banque mondiale en partenariat avec plusieurs organisations intervenantes telles que la FAO, le PNUD, l’Organisation Mondiale de la Santé, des représentants des gouvernements, des sociétés civiles, du secteur privé et des institutions scientifiques du monde entier.
(2)Les rapports finaux du IAASTD, 7-15 Avril 2008, Johannesburg, sont disponibles sur le site de l’IAASTD