Un militant de Greenpeace France, ancien lauréat et membre du jury des Cannes Lions, célèbre festival de la « créativité », a interrompu la cérémonie d’ouverture ce soir à Cannes afin de rendre le prix qu’il avait obtenu pour une campagne de publicité en faveur d’une compagnie aérienne. Une action symbolique pour dénoncer la complicité des agences de publicité qui travaillent avec l’industrie des biens et services fossiles en pleine crise climatique, et participent ainsi à retarder l’action climatique. Avec près de 40 organisations, Greenpeace milite pour l’interdiction des publicités, partenariats et mécénats pour les entreprises vendant des biens et services fossiles.
Un ancien lauréat des Cannes Lions vient questionner ses pairs
Lors de la première soirée de l’événement, qui rassemble plus de 15 000 professionnels du milieu de la publicité et de la communication et se tient chaque année à Cannes depuis 1954, Gustav Martner, militant de Greenpeace France et ancien lauréat des Cannes Lions, est monté sur scène pour dénoncer le déni des agences de publicité face à l’urgence climatique. Il est venu rendre son prix obtenu en 2007 pour son travail avec la compagnie aérienne Scandinavian Airlines, et a interpellé ses pairs, dans la salle. Il a ensuite brandi une banderole où était inscrit le message « No awards on a dead planet » [pas de prix sur une planète morte].
Des photos et vidéo de l’intervention de Gustav Martner sur scène sont disponibles à cette adresse : https://media.greenpeace.org/collection/27MDHUHZCJV6
« J’ai obtenu ce prix en 2007 pour mon travail avec une compagnie aérienne. J’étais si fier à l’époque. Aujourd’hui, ce prix est le symbole de la complicité du secteur fossile avec les criminels climatiques. Il me fait honte. Ce soir, je m’adresse à toutes celles et ceux qui sont tiraillés, qui ont du mal à dormir la nuit, pour leur dire que ce n’est pas une fatalité : vous pouvez choisir de ne plus être complices de l’industrie fossile. Écoutez les scientifiques qui vous supplient d’arrêter de bloquer leur travail sur le climat, arrêtez de mettre votre créativité au service d’industries qui détruisent notre planète et notre avenir », explique Gustav Martner, militant de Greenpeace France.
Les scientifiques le disent : les publicités fossiles sont un obstacle à l’action climatique
Depuis l’accord de Paris sur le climat en 2015, les Cannes Lions ont déjà récompensé plus de 300 campagnes publicitaires promouvant le greenwashing de majors pétrolières et gazières, les voyages en avion, les SUV… Présents chaque année à l’événement, des groupes comme Accenture, WPP et Publicis, ou encore des agences telles qu’Edelman, ont déjà communiqué sur leurs engagements climatiques. Mais les paroles sont rarement alignées avec les actes et malgré leurs promesses, ils continuent à travailler pour des entreprises fossiles.
Les entreprises des biens et services fossiles (compagnies pétrolières et gazières, constructeurs automobiles, compagnies aériennes…) sont responsables de 86% des émissions mondiales de CO2 selon le GIEC. Mais avec l’aide des publicitaires, elles détournent l’attention des consommateurs de l’impact climatique désastreux de leurs activités. Pour la première fois cette année, le rapport du GIEC a pointé du doigt le rôle des relations publiques et de la publicité dans la crise climatique, les qualifiant d’obstacle à l’action climatique, tandis que plus de 450 scientifiques ont signé une lettre appelant les agences de relations publiques et de publicité à cesser de travailler avec les entreprises fossiles.
L’interdiction des publicités fossiles, mesure cruciale dans la lutte contre le changement climatique
En mars, Greenpeace France et d’autres organisations ont assigné TotalEnergies en justice pour pratiques commerciales trompeuses. Au moment de son changement de nom, la multinationale a mené une grande campagne de greenwashing avec les agences Carré Noir (groupe Publicis) et Rosa Paris, prétendant être sur la bonne voie pour lutter contre les changements climatiques, et distillant des affirmations fallacieuses sur les prétendues vertus environnementales du gaz fossile et de la biomasse.
« A l’image du changement de nom de Total, les campagnes de greenwashing pullulent. L’urgence climatique est là, et on ne peut pas surveiller chaque entreprise une à une : il est temps d’interdire purement et simplement la publicité pour l’industrie des biens et services fossiles ! On l’a fait avec l’industrie du tabac pour des raisons de santé publique, faisons de même avec l’industrie fossile qui détruit à la fois la santé, la biodiversité et le climat. C’est ce que nous demandons à l’échelle européenne, avec 40 organisations. Si le secteur de la communication et de la publicité ne prend pas ses responsabilités, nous le contraindrons par la loi », conclut Edina Ifticene, chargée de campagne énergies fossiles à Greenpeace France.
Notes aux rédactions
Gustav Martner est disponible pour des interviews sur Cannes ou à distance
Le 4 octobre 2021, Greenpeace et d’autres organisations ont lancé une initiative citoyenne européenne pour la fin des publicités, partenariats et mécénats pour toutes les entreprises vendant des biens et services fossiles.