Pour Greenpeace International, la Commission de conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR) a échoué dans son mandat après sa réunion à Hobart, en Tasmanie. Les gouvernements présents n’ont pas pu convenir de la création d’un vaste sanctuaire dans l’océan Antarctique, alors que ce projet était soutenu par 22 des 25 membres de la Commission et plus de 2,7 millions de personnes dans le monde.
Pour Hélène Bourges, responsable de la campagne océans pour Greenpeace France : « Nous avions une occasion historique de créer la plus grande zone protégée de la planète dans l’océan Antarctique et ainsi protéger la faune, lutter contre le changement climatique et améliorer la santé de nos océans. Vingt-deux délégations sont venues à Hobart pour négocier de bonne foi mais pourtant, des arguments non fondés scientifiquement et avancés par les délégations bloquantes ont fait capoter des propositions scientifiques sérieuses en faveur d’une protection urgente du milieu marin ».
Le temps presse et les scientifiques ont clairement souligné la nécessité de créer des sanctuaires marins sur au moins 30% de la surface de nos océans d’ici 2030, afin de protéger la faune, d’assurer la sécurité alimentaire pour des milliards de personnes et de lutter contre le changement climatique.
« En 2009, la Commission avait approuvé le mandat de créer un réseau de sanctuaires, mais depuis, les efforts diplomatiques semblent porter davantage sur le développement des pêcheries que sur la conservation. Si des organes tels que la CCAMLR continuent d’échouer dans leur mandat de protéger l’océan, il ne pourront plus faire partie de la solution. Nous devons alors nous pencher sur les négociations historiques en cours à l’ONU en vue d’un traité international sur les océans », ajoute Hélène Bourges .
Certaines délégations, telles que la Chine et la Russie, ont joué la montre. En usant par exemple d’abrogation d’amendements, ils ont laissé peu de temps pour de véritables discussions sur la protection des eaux antarctiques. La seule lueur d’espoir est apparue lorsque la Commission a approuvé le statut de protection pour les petits écosystèmes marins vulnérables identifiés par Greenpeace lors de sa récente expédition.
Les délégations chinoise, norvégienne et russe ont toutes joué un rôle dans le blocage de la proposition. Laura Meller, conseillère pour Greenpeace sur les pôles, souligne la responsabilité de ces trois états :
– Chine : « La délégation chinoise à la CCAMLR semble avoir contourné l’engagement des dirigeants chinois à porter le flambeau de la protection de l’environnement et la poursuite d’une communauté d’avenir partagé pour l’humanité. Elle n’a clairement pas agi avec la bonne foi attendue dans ces négociations, empêchant toute possibilité de coopération et la création de la plus grande aire marine protégée au monde ».
– Norvège : « Bien qu’ayant reconnu que la proposition de créer un sanctuaire de l’océan Antarctique avait pris en compte les meilleures données scientifiques disponibles, la Norvège a décidé de présenter sa propre proposition divisant la zone concernée en deux. Afin de parvenir à un consensus, nous exhortons la Norvège à s’engager dans un plan de travail avec un échéancier précis qui indiquera clairement dans quelle mesure sa propre proposition contribuera au mandat de la Commission consistant à créer de toute urgence un réseau de zones de protection marines à grande échelle ».
– Russie: « Sous la présidence de la Russie en 2016, la CCAMLR avait fait les gros titres en acceptant de protéger la mer de Ross. Pourtant, la Russie n’a depuis pas agi de bonne foi, se contentant de défendre quelques intérêts privés liés à une activité de pêche de niche tout en empêchant la Commission de remplir son mandat de créer un réseau de sanctuaires dans l’océan Antarctique ».
En septembre dernier, les gouvernements des Nations Unies ont entamé des négociations en vue d’un traité international sur les océans qui couvrirait tous les océans au-delà des frontières nationales. Ces négociations sont l’aboutissement d’un processus de discussions inter-Etats d’une dizaine d’années et pourraient aboutir dès 2020. Ce traité servirait de cadre à la création d’un réseau de sanctuaires marins couvrant 30% des océans de la planète d’ici 2030, comme le recommandent les scientifiques pour protéger la faune et aider à lutter contre le changement climatique.