Après une édition 2020 annulée à cause de l’épidémie de COVID, la COP26 porte des enjeux fondamentaux pour remettre la diplomatie climatique sur les rails et barrer la route aux fausses solutions pour le climat.
Date limite des États pour présenter leurs nouveaux plans de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le sommet doit également permettre de finaliser les règles d’application de l’Accord de Paris.
« L’été a été marqué par des catastrophes climatiques à répétition et, dans un cruel parallèle, par la sortie d’un nouveau rapport alarmant du GIEC. Alors que le temps nous fait défaut, les retards s’accumulent dans la mise en œuvre de l’Accord de Paris. La COP26 doit être le moment de bascule où la lutte pour le climat devient une réalité, en engageant explicitement la bataille contre les industries fossiles. L’affichage diplomatique ne peut plus servir de paravent à l’inaction politique », souligne Clément Sénéchal, chargé de campagne Climat pour Greenpeace France.
Dernière COP sous la présidence d’Emmanuel Macron, ces deux semaines seront aussi l’occasion pour la France de tenter de restaurer sa crédibilité sur la scène internationale après une loi Climat pas assez ambitieuse, une Convention citoyenne reniée et une condamnation par le tribunal administratif dans l’Affaire du Siècle pour carences fautives dans la lutte contre le changement climatique.
« La France a une responsabilité historique : c’est sous sa présidence, lors de la COP21, qu’a été conclu l’Accord de Paris. Elle en est théoriquement la garante. Hélas, le manque d’exemplarité du pays sous la présidence d’Emmanuel Macron met en péril ce rôle fondamental et la dynamique diplomatique avec lui. Deuxième émetteur de l’Union européenne en valeur absolue, la France réduit ses émissions nettement moins vite que la moyenne européenne et ne tient toujours pas ses objectifs nationaux. On ne peut pas être crédible au niveau international quand on ne fait pas sa part au niveau national », ajoute Clément Sénéchal.
Depuis la signature de l’Accord de Paris, la France a réduit ses émissions d’environ 1% par an. Selon le Haut Conseil pour le climat, il faudrait une réduction deux à trois fois plus importante pour respecter les objectifs légaux actuels du pays, et sept fois plus importante pour respecter l’objectif de l’Accord de Paris, selon l’ONU. En outre, la France a refusé de s’aligner sur le nouvel objectif européen de baisse des émissions de 55% en 2030 dans la loi Climat votée cet été, préférant s’en tenir à un statu quo pourtant obsolète.
Les enjeux de la COP sont à la hauteur du défi climatique. Greenpeace attend notamment :
– Une décision de la COP sur la fin de l’ère des énergies fossiles pour qu’à partir de ce jour, il n’y ait plus de nouveaux projets d’exploitation de charbon, de pétrole et de gaz, ni aucun financement public en faveur de ces énergies.
– Un engagement à réduire de moitié les émissions mondiales de gaz à effet de serre d’ici 2030.
– Le rejet des projets de marché carbone et des mécanismes de compensation carbone dans l’interprétation de l’article 6 de l’Accord de Paris. Ce dernier doit être interprété comme fixant les règles de la coopération internationale sur le climat, et non comme une opportunité de mettre en place des tactiques dilatoires comme les marchés de compensation carbone.
– La garantie que 100 milliards de dollars par an passent des pays riches aux pays moins développés pour s’adapter aux impacts de la crise climatique, développer des systèmes énergétiques propres et s’éloigner des combustibles fossiles, et que davantage d’argent soit investi pour compenser les dommages déjà causés par les impacts climatiques dans les pays plus vulnérables.
Haro sur les fausses solutions
Plutôt que de repenser notre système et porter des changements systémiques, des pays et des entreprises tentent de pousser des fausses solutions qui ne seront que des pansements sur une jambe de bois.
La compensation carbone est un leurre. Nous ne pouvons pas permettre aux nations et aux entreprises les plus riches de marchandiser la nature et d’acheter des terres dans des pays plus pauvres pour compenser leurs émissions et continuer à polluer l’atmosphère. Ce système de compensation fausse les économies et prive de leurs terres et de leurs ressources les communautés locales qui en ont le plus besoin. Les entreprises ne doivent pas être autorisées à faire main basse sur la nature pour compenser leurs émissions.
Une vigilance mondiale doit également être de mise au sujet du “Net Zéro” (zéro émission nette). Un engagement Net Zéro qui ne prévoit pas de réductions d’émissions spectaculaires et constantes à court terme mais qui s’appuie sur des systèmes de compensation, ce n’est que du greenwashing pour faire diversion. De multiples analyses des engagements Net Zéro des entreprises et des pays démontrent que les promesses ne se matérialisent pas en faits concrets. Les objectifs à court et moyen termes sont absents, les réductions d’émissions sont remplacées par des compensations suspectes, et diverses autres astuces et failles sont utilisées pour éviter un véritable premier pas vers des émissions proches de zéro au cours des prochaines décennies. Les compensations n’empêchent pas les émissions de réchauffer notre climat. La mise en place d’un mécanisme de surveillance sans système solide de responsabilisation et de contrôle du respect des engagements ne fera que multiplier les opportunités de greenwashing qui existent déjà.