Dans une analyse publiée aujourd’hui, Greenpeace France montre les interdépendances entre les filières nucléaires française et russe, de l’exploitation de l’uranium au traitement des déchets radioactifs, de la construction des centrales à leur exploitation.
La connivence des industriels français et russes facilite le développement tentaculaire de l’industrie nucléaire russe et renforce l’influence de Vladimir Poutine sur la scène internationale. Si le gouvernement français veut être crédible au sommet de Versailles sur une stratégie d’indépendance énergétique européenne, il doit exiger des entreprises françaises du nucléaire la rupture de leurs contrats avec Rosatom et ses filiales.
L’analyse de Greenpeace détaille notamment :
- les relations étroites entre l’industrie nucléaire française et Rosatom, entreprise publique du nucléaire au service des intérêts de Vladimir Poutine ;
- comment, à travers différents partenariats, EDF, Framatome ou le Commissariat à l’énergie atomique facilitent l’implantation des activités de Rosatom hors de la Russie ;
- la place centrale de la sphère d’influence russe, notamment du Kazakhstan, dans l’approvisionnement en uranium de la France (45%) ;
- le choix exclusif de la Russie par Orano et EDF pour réduire leur stock encombrant d’uranium de retraitement.
Malgré le début de la guerre en Ukraine, les industriels français du nucléaire ont jusqu’à présent estimé qu’aucun changement de leurs relations avec Rosatom n’était nécessaire. Pire, ces liens sont en passe de se renforcer avec la perspective que l’État français cède au russe Rosatom 20% du capital de GEAST, fabricant des turbines Arabelle pour centrales nucléaires.
L’Etat français ignore ainsi les injonctions du Parlement européen à stopper les partenariats industriels avec la Russie. « La filière nucléaire française a tant besoin de ses contrats russes qu’elle ne peut se décider à les arrêter. Emmanuel Macron fait preuve d’un cynisme glaçant en dénonçant l’agression militaire de Vladimir Poutine tout en préservant les coopérations entre l’industrie française du nucléaire et le secteur nucléaire russe », analyse Pauline Boyer, chargée de campagne Transition énergétique à Greenpeace France.
Alors que les chefs d’Etat européens sont réunis à Versailles pour définir des alternatives – nécessaires et urgentes – au gaz et au pétrole russes, le développement du nucléaire ne peut pas être une réponse. Au contraire, la rupture des liens de l’industrie nucléaire entre la France et la Russie stopperait la dynamique d’exportation des réacteurs russes, utilisée par V. Poutine à des fins géopolitiques. « Aujourd’hui, miser sur le nucléaire, c’est maintenir la France sous l’influence de la Russie. La souveraineté énergétique grâce au nucléaire est une chimère. Seules la réduction de la consommation et les énergies renouvelables sont à la hauteur de l’enjeu et permettront d’avancer vers un monde soutenable et pacifié », estime Pauline Boyer.