Ce matin vers 10h30, des activistes de Greenpeace France ont déclenché, à l’aide d’un drone, des fumigènes de détresse sur le toit de la piscine d’entreposage des combustibles irradiés de l’usine Orano (ex-Areva) de La Hague pour dénoncer le risque de saturation et sa vulnérabilité.
En effet, ce bâtiment concentre l’équivalent de plus d’une centaine de cœurs d’un réacteur nucléaire. Pourtant son toit, en simple tôle métallique, est bien trop fragile pour protéger les bassins remplis de matière radioactive en cas d’acte malveillant par les airs.
Photos et vidéo sont disponibles à cette adresse : https://media.greenpeace.fr/539
Alix Mazounie, chargée de campagne Energie à Greenpeace France, déclare : « Greenpeace a démontré, une fois de plus, que les installations nucléaires françaises ne sont pas suffisamment protégées contre les risques d’agression externe. Mais ce qui est particulièrement choquant, c’est que ce drone ait pu allumer des fumigènes de détresse sur le toit de la piscine, c’est-à-dire le point faible d’un bâtiment contenant la plus grande quantité de matières radioactives dans le monde ».
Des piscines mal protégées
Depuis octobre 2017, un rapport d’experts [1] et trois actions d’intrusion menées par des activistes de Greenpeace ont alerté sur la vulnérabilité des piscines de refroidissement des combustibles irradiés face aux actes de malveillance.
Alix Mazounie rappelle : « En 2018, la Commission d’Enquête parlementaire a reconnu ce problème et demandé que l’Autorité de Sûreté Nucléaire soit dotée de pouvoirs supplémentaires afin de mieux protéger les installations nucléaires contre les agressions externes. Cette préconisation ne doit pas rester lettre morte et il est urgent d’élargir le mandat de l’ASN aux enjeux de sécurité passive » [2].
Des piscines saturées
La piscine de l’usine d’Orano La Hague contient environ 10 000 tonnes de combustibles irradiés en attente d’être retraités ou d’une solution définitive. EDF continue d’envoyer à La Hague plus de combustible usé qu’Orano n’est capable d’en retraiter. Année après année, les combustibles irradiés s’accumulent jusqu’à la saturation [3]. L’engorgement de ces piscines a été rappelé fin 2018 dans un rapport du Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN) : la marge d’espace disponible est inférieure à 7,4 % [4].
Dans les mois qui viennent se tiendra un débat public sur le Plan National de gestion des matières et déchets radioactifs : il doit être l’occasion d’envisager sérieusement la fin du retraitement, qui contribue à l’accumulation de déchets hautement radioactifs, et l’entreposage et le stockage à sec des déchets.
« La piscine de l’usine Orano La Hague concentre de manière spectaculaire tous les problèmes du nucléaire français: des bâtiments vieillissants et très mal protégés, des piscines quasiment engorgées de déchets radioactifs et une politique de « retraitement » qui échoue à réduire les volumes de déchets ultimes. Observez cette piscine et vous contemplerez tout l’échec du nucléaire français », conclut Alix Mazounie.
Notes aux rédactions :
[1] : « La sécurité des réacteurs nucléaires et des piscines d’entreposage du combustible en France et en Belgique, et les mesures de renforcement associées », rapport commandité par Greenpeace France, octobre 2017, résumé public (lien)
[2] : rapport de la commission d’enquête parlementaire sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires, 28 juin 2018 (lien)
[3] : Plus de précisions dans le billet « La Hague : l’overdose nucléaire » publié par Greenpeace France le 23 janvier 2019 (lien)
[4] : Présentation du « Cycle du combustible » français, HCTISN, septembre 2018 (lien)