Exploitation minière en eaux profondes : l’entreprise canadienne The Metals Company cherche à s’affranchir du processus international de demande d’autorisation

Kingston, Jamaïque, 27 mars 2025 – L’entreprise minière canadienne The Metals Company (TMC) a annoncé qu’elle allait demander un permis d’exploitation minière en eaux profondes dans le cadre du droit des États-Unis sur l’exploitation minière datant des années 1980. Cette annonce est intervenue quelques instants avant l’appel aux investisseurs prévu par l’entreprise et la veille du jour où sa demande d’exploitation minière commerciale devait être discutée à l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM). The Metals Company savait qu’elle aurait des difficultés à obtenir le feu vert et tente ainsi de limiter les impacts sur son business [1].

« Il s’agit là d’un nouveau stratagème pathétique employé par The Metals Company et d’une insulte au multilatéralisme. Cette situation montre que l’instauration d’un moratoire sur l’exploitation minière en eaux profondes est nécessaire de toute urgence, et que les projets de Gerard Barron, PDG de la société, n’ont jamais eu pour but d’apporter des solutions à la catastrophe climatique. Comme Greenpeace l’a dit à l’ouverture de la nouvelle session de l’AIFM, The Metals Company est désespérée et compte désormais s’asseoir sur le droit international en annonçant son intention d’exploiter les fonds marins dans les eaux internationales en passant par le droit des Etats-Unis [2] [3], a déclaré Louisa Casson, responsable de la campagne Océans chez Greenpeace International. Cela fait des années que The Metals Company exerce d’énormes pressions sur l’AIFM pour forcer les États membres à autoriser l’exploitation minière des fonds marins internationaux, patrimoine commun de l’humanité. Les États, la société civile, les scientifiques, les entreprises et les communautés autochtones ont résisté à ses coups de butoir. Cette annonce irréfléchie est une gifle à la coopération internationale. »

Pour Shiva Gounden, responsable de la région Pacifique à Greenpeace Australie- Pacifique, cette annonce est  un « coup bas » pour le Pacifique et une menace pour le multilatéralisme : « TMC montre son vrai visage : avide, dangereux et désespéré. Il est clair que TMC ne s’est jamais souciée de la prospérité économique ou de l’emploi des populations de Nauru, de Kiribati ou de Tonga, pas plus qu’elle ne s’est préoccupée de la lutte contre la crise climatique. Une seule chose l’a jamais intéressée : se remplir les poches avec de l’argent gagné aux dépens de l’océan. Le Pacifique est un élément vital pour nos populations, pas une marchandise. Ce que cherche l’industrie minière en eaux profondes, c’est à faire du profit sur le dos des ressources et des communautés du Pacifique. Nous ne la laisserons pas faire. »

« Nous appelons la communauté internationale à s’élever et à défendre le multilatéralisme contre des entreprises comme TMC. Les fonds marins dans les eaux internationales relèvent du patrimoine commun de l’humanité, et aucun État ne devrait prendre des mesures unilatérales pour les exploiter. Pour empêcher l’exploitation minière des océans, il faut que les gouvernements adoptent rapidement un moratoire, conclut Louisa Casson. Cette initiative de TMC s’inscrit dans la course effrénée aux ressources, dont les conséquences désastreuses se font déjà sentir dans le monde entier. Le Pacifique n’est pas une marchandise que l’on peut acheter, vendre ou voler ».

Notes :
[1] TMC dispose de 3,5 millions de dollars de liquidités et de 44 millions de dollars de prêt non garanti provenant de ses deux principaux actionnaires.

[2] La loi américaine en question est le Deep Sea Hard Mineral Resources Act. TMC n’a pour l’instant qu’annoncer ses intentions. Elle a cependant officiellement sollicité une consultation préalable à sa demande auprès de l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA).

[3] L’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) a été créée conformément à la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (UNCLOS). L’AIFM et ses membres sont donc liés par les règles et les obligations de cette convention. Les États-Unis ont signé l’UNCLOS mais ne l’ont pas ratifiée. Cela signifie qu’ils ne sont pas un État membre de l’AIFM. Toutefois, leur signature les engage à ne pas agir de manière à aller à l’encontre de l’objet et du but de la convention. Les États-Unis ont également appliqué provisoirement l’accord de 1994. Ils sont donc liés par cet accord, à moins qu’ils ne décident de s’en retirer.En d’autres termes, si les États-Unis décidaient unilatéralement d’exploiter les fonds marins des eaux internationales, ils enfreindraient le droit international.