Fukushima : 10 ans après la catastrophe, aucune centrale française n’est à niveau

Après la catastrophe de Fukushima, les autorités françaises s’étaient donné dix ans pour tirer toutes les leçons de l’accident le plus grave survenu dans une centrale nucléaire depuis Tchernobyl. Pourtant, 10 ans plus tard, aucune centrale française n’est encore à l’abri de ce type de scénario accidentel.

L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a laissé EDF prendre un retard considérable, qui diffère jusqu’en 2040 la mise en place complète des normes post Fukushima sur le parc nucléaire français. C’est ce qu’expose aujourd’hui un rapport de l’Institut négaWatt commandé par Greenpeace France [1] et basé sur des données disponibles publiquement, mais également des réponses inédites de l’ASN.

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Sur 23 mesures structurantes identifiées par l’ASN pour que les centrales françaises soient préservées d’un accident comme celui de Fukushima, seules 12 sont aujourd’hui en place sur tout le parc nucléaire français. L’arrêt automatique du réacteur en cas de séisme, par exemple, ne sera pas possible sur l’ensemble des réacteurs français avant 2035 au mieux.

Dès 2014, l’ASN a autorisé un glissement dangereux du calendrier pour la mise à niveau des centrales suite à la catastrophe de Fukushima. Aujourd’hui, les travaux post Fukushima sont pour beaucoup intégrés à ceux prévus pour le prolongement du fonctionnement des réacteurs, alors que l’ASN faisait auparavant de leur réalisation une condition préalable à tout prolongement.

Pour Roger Spautz, chargé de campagne Nucléaire à Greenpeace France : « Une nouvelle fois, EDF profite de l’absence de transparence et de contrôle démocratique pour s’affranchir de ses obligations aux dépens de la population qui court donc un risque accru d’accident nucléaire majeur. En choisissant de composer avec l’incompétence d’EDF plutôt que d’imposer la tenue du délai initial, l’ASN se fait complice de cette situation. Greenpeace demande à l’ASN et au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour accélérer le calendrier des travaux post Fukushima et d’en finir avec ce laxisme dangereux à l’endroit d’une filière nucléaire très loin de l’excellence ».

Au niveau européen, le bilan de dix ans de mise en place de mesures post Fukushima est accablant : la quasi-totalité des efforts des sociétés exploitantes des centrales nucléaires a été consacrée à faire barrage à la mise en œuvre du strict nécessaire pour éviter une catastrophe telle que celle de Fukushima. Dans certains pays, les mesures n’ont pas été appliquées du tout, car trop coûteuses selon les opérateurs.

Au Japon, la catastrophe nucléaire de Fukushima continue d’avoir des conséquences négatives sur les populations et l’environnement. Une enquête menée par Greenpeace Japon, à partir de ses propres mesures de niveau de radioactivité, révèle que 85% de la zone de décontamination spéciale délimitée par le gouvernement n’ont pas été complètement décontaminés à ce jour. Le plan de démantèlement de la centrale de Fukushima Daïchi, mis en avant par le gouvernement japonais et l’exploitant TepCo, relève du fantasme. Il est nécessaire de repenser en profondeur le démantèlement de la centrale de Fukushima.

[1]  Le rapport complet de l’Institut négaWatt “Les mesures de renforcement du parc nucléaire français, dix ans après la catastrophe de Fukushima” est accessible ici.