Une semaine après l’arrivée mouvementée du terminal méthanier flottant FSRU Cape Ann affrété par TotalEnergies au port du Havre, le média Disclose publie, en collaboration avec Greenpeace France, une nouvelle enquête sur les activités d’extraction de gaz de schiste du groupe pétro-gazier français au Texas [1].
A partir d’une investigation de terrain, à la source de la chaîne de production du Gaz Naturel Liquéfié (GNL) aux Etats-Unis, Disclose dévoile l’implication de TotalEnergies dans l’exploitation de gaz de schiste dont l’extraction est interdite en France depuis 2011 du fait de ses impacts sanitaires et environnementaux particulièrement nocifs.
Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, le gaz naturel liquéfié (GNL) américain, dont 80% est issu de gaz de schiste, afflue en Europe tandis que la France en était le premier importateur mondial en 2022 [2].
TotalEnergies, présent d’un bout à l’autre de la chaîne du gaz
Premier exportateur de GNL américain sur le continent européen, TotalEnergies possède notamment des parts (16,6%) dans le terminal méthanier expéditeur, Cameron LNG en Louisiane, qui alimente l’Europe [3].
De l’autre côté de l’Atlantique, en France, la major française est par ailleurs l’exploitant du terminal méthanier flottant du Havre dont elle sera également le principal client (étant donné que TotalEnergies détient 50% des capacités du terminal pour acheminer son gaz). Censé entrer en service d’ici la fin septembre, selon les autorités, ce dernier à vocation à devenir une nouvelle porte d’entrée de l’importation de GNL en France.
“TotalEnergies et le gouvernement présentent le GNL comme une énergie de transition. Cette enquête démontre le contraire : non seulement il s’agit d’une énergie fossile qui aggrave la crise climatique, mais, aux Etats-Unis, l’extraction de gaz de schiste expose les populations locales à de graves conséquences. La France est complice de ce scandale sanitaire et environnemental. Emmanuel Macron qui prétend que la France sera la première nation à sortir des énergies fossiles doit renoncer à la mise en service du terminal méthanier flottant du Havre, et à l’ensemble des nouveaux projets d’infrastructures fossiles” commente Edina Ifticène, chargée de campagne Énergies fossiles pour Greenpeace France.
© Jean Nicholas Guillo / GreenpeaceUn scandale sanitaire et environnemental
L’enquête de Disclose démontre notamment que la major française possède plus de 1 700 gisements de gaz de schiste au Texas. D’après les données exclusives recueillies par Disclose avec les ONG Earthworks et FracTracker Alliance, 420 000 personnes sont potentiellement exposées aux émissions des forages de gaz de l’énergéticien français au Texas, car résidant à moins de 800 mètres d’un puits.
Dans la ville d’Arlington, TotalEnergies exploite 181 puits de gaz de schiste, et attend un feu vert pour 4 de plus. Certains sont installés à quelques mètres de crèches ou d’écoles publiques.
Vertiges, saignements de nez, maux de tête… ces symptômes figurent dans 27 plaintes auxquelles Disclose a eu accès. Des symptômes associés, selon plusieurs études scientifiques, à l’exposition aux gaz toxiques émis par les forages de gaz de schiste.
« Avec cette enquête dans la région de Dallas, au Texas et en Louisiane, le long du Golfe du Mexique nous mettons des visages à côté de la course folle au GNL en France et en Europe. Nos découvertes permettent de confronter l’hypocrisie du gouvernement et de TotalEnergies avec les témoignages d’Américain·es vivant cette guerre de l’énergie en première ligne. Comme Edgar, ancien chauffeur routier qui vit à côté d’un puits de TotalEnergies et dont la femme, la fille et les petits-enfants souffrent de maux de tête, de saignements de nez et de toux violente. » commente Mathias Destal, rédacteur en chef de Disclose.
© Nitashia Johnson / Disclose
Edgar, habitant d’Arlington vivant à proximité d’un forage exploité par TotalEnergies.
Pour Greenpeace France, en autorisant la mise en service du terminal méthanier du Havre qui permettra d’importer du GNL issu de gaz de schiste, le gouvernement français a une lourde responsabilité vis-à-vis des impacts que l’exploitation de ce gaz fossile engendre auprès des populations du sud des Etats-Unis.
Consultez l’enquête de Disclose
Notes aux rédactions :
[1] Cette nouvelle publication a lieu dans le cadre d’une collaboration entre Disclose et Greenpeace France sur le boom du GNL. Voir cette série d’articles publiés en juin 2023 à propos du terminal méthanier flottant FSRU Cape au Havre.
[2] Voir le rapport de Greenpeace France paru en juin 2023
[3] TotalEnergies est également impliquée à différents niveaux dans d’autres terminaux d’export américain, comme l’extension du terminal Cameron LNG 2 ou le projet controversé de GNL Rio Grande.