Loi agricole : Greenpeace condamne l’article 15 et appelle les députés à voter contre cette loi destructrice pour l’environnement et l’agriculture

Agriculture

Alors que les député·es ont terminé d’examiner le projet de loi d’orientation agricole cette nuit dans un hémicycle bien vide, Greenpeace France estime que ce texte est un carnage pour l’environnement et qu’il ne résout en rien la crise sociale du monde paysan. Greenpeace France appelle les parlementaires à voter contre cette loi mardi prochain, et alerte à nouveau sur l’article 15, qui vise à accélérer et simplifier la construction d’élevages industriels et de méga-bassines [1].

Après plus de 10 jours de débats sur le projet de loi agricole, il est certain que ce texte s’annonce comme un recul historique en matière environnementale, alerte Sandy Olivar Calvo, chargée de campagne Agriculture à Greenpeace. Les mesures proposées répondent bien aux demandes des dirigeants de la FNSEA, mais elles ne résolvent pas la crise sociale et environnementale du secteur agricole. Pire, l’article 15, qui a été voté tel quel, sans aucune modification, va intensifier l’industrialisation de notre agriculture en accélérant et facilitant la construction de mégabassines et de fermes-usines. Cet article est le symbole du carnage que cette loi représente pour l’environnement !

L’article 15 vise en effet à accélérer la prise de décision des juridictions en cas de contentieux contre des projets d’ouvrages hydrauliques agricoles et des installations d’élevage. En invoquant l’urgence, cet article permettrait de réduire les délais des procédures administratives relatives à ce type de projets, au détriment des associations et des riverains qui auraient moins de temps pour rassembler, organiser et présenter des arguments concernant les risques environnementaux et sanitaires associés à ces projets agricoles. Par conséquent, les juges auraient également moins de temps pour se faire une idée claire de la situation.

La Défenseure des droits a d’ailleurs jugé que cet article “porte atteinte au droit au recours” en donnant une “présomption d’urgence” aux projets hydrauliques et d’élevage. Elle pointe également des “risques de constitutionnalité au regard notamment du principe d’égalité devant la justice” [2]. Le Conseil d’État avait aussi préconisé l’abandon de ces dispositions dans son avis sur le projet de loi.

Lors des débats dans l’hémicycle cette nuit, l’argumentaire du gouvernement pour se défendre était à la fois vide et suffisant, notamment face aux risques juridiques et constitutionnel de cet cet article, explique Sandy Olivar Calvo. Coûte que coûte le gouvernement poursuit son idéologie et sa course en avant au productivisme, malgré les nombreuses alertes sur cet article. Les citoyens et citoyennes doivent être libres de disposer de leur droit de recours pour déposer des contentieux juridiques et s’opposer aux projets d’agriculture industrielle tels que les fermes-usines et les mégabassines. Le nombre de recours déposés démontre bien la forte opposition de la société civile contre ces projets et la volonté de mettre en place un autre modèle agricole.

Greenpeace est opposée à ce type de projets car ils contribuent à l’industrialisation de l’agriculture, et vont à contresens des enjeux et des besoins du monde agricole. Pour rappel, les fermes-usines ont de multiples conséquences négatives : émissions de gaz à effet de serre, pollution de l’eau par les nitrates qui favorisent par exemple la prolifération d’algues vertes, pollution de l’air par les émissions d’ammoniac, risques sanitaires pour les riverains et les animaux, perte d’autonomie des éleveurs et éleveuses… [3 et 4]. Quant aux mégabassines, elles accentuent la pression sur les ressources en eau, nuisent à la biodiversité et contribuent à une fuite en avant pour maintenir coûte que coûte un modèle agro-industriel dévastateur et inadapté [5].

Les député·es doivent se prononcer sur cette loi lors d’un vote final mardi prochain 28 mai.
« Nous appelons les député·es à voter contre cette loi mardi prochain, poursuit Sandy Olivar Calvo. Annoncée comme la grande loi agricole du quinquennat d’Emmanuel Macron il y a plus d’un an, le gouvernement a profité de la crise agricole et de la douleur du monde paysan pour accélérer sa politique d’industrialisation de notre agriculture, au détriment de notre environnement et de la majorité des agriculteurs. À ce stade, nous pouvons affirmer que cette loi est un échec puisqu’elle ne permet ni d’enclencher la nécessaire transition agro-écologique, ni de garantir le renouvellement de générations et encore moins d’assurer une meilleure rémunération aux agriculteurs : elle aura surtout servi à détricoter les normes environnementales difficilement acquises ces dernières années.

 

Notes aux rédactions :

[1] Voir “Loi agricole à l’Assemblée nationale : Greenpeace alerte les députés et exige une refonte profonde du texte”, communiqué de presse de Greenpeace France, 13 mai 2024
[2] Voir l’avis de la Défenseure des droits, avril 2024
[3] Voir “Élevage en France : des fermes, pas des usines !”, dossier de presse de Greenpeace France, 05/2023
[4] Voir les trois notes de décryptage :
– “Le méthane réchauffe le climat à plein gaz”, Greenpeace France, avril 2023
– “L’abus d’ammoniac est dangereux pour la santé et l’environnement”, Greenpeace France, avril 2023
– “Pollution de l’eau aux nitrates : un fléau européen”, Greenpeace France, avril 2023
[5] Voir “Mégabassines : pourquoi s’y opposer ?” sur le site de Greenpeace France