Nouveaux OGM : le Parlement européen approuve le projet de loi visant à leur déréglementation, aggravant encore la situation des agriculteurs
Le Parlement européen (PE) a approuvé un projet controversé de la Commission qui exempte de nombreux nouveaux OGM des règles de sécurité actuelles. Greenpeace France s’indigne contre cette décision qui ignore les avis de nombreux scientifiques et les droits des agriculteurs et des consommateurs.
« Les membres du Parlement européen ont manqué à leur devoir de protéger la santé des citoyens, l’environnement et l’avenir de l’agriculture européenne, s’indigne Ariane Malleret, chargée de campagne Agriculture à Greenpeace France. Les agriculteurs européens paieront le prix fort en devenant encore plus dépendants d’un petit nombre de semenciers. Pire, les semenciers pourront même poursuivre en justice les agriculteurs si leurs cultures sont contaminées de manière fortuite par ces plantes brevetées. Par ailleurs, il n’existe pas de preuve crédible quant à la résistance des nouveaux OGM aux effets du changement climatique. Cette déréglementation mettrait également en péril les vraies solutions pour faire face à la crise climatique et à l’effondrement de la biodiversité, comme le développement de l’agriculture biologique et l’agroécologie”.
La proposition de la Commission conduirait à davantage de brevets, s’étendant à la sélection conventionnelle et aux caractéristiques déjà présentes dans la nature [1]. En conséquence, les agriculteurs et les sélectionneurs pourraient perdre leur autonomie et la liberté de cultiver ce qu’ils veulent. Aujourd’hui, quatre entreprises contrôlent plus de 60 % du marché mondial des semences : Bayer, DowDupont/Corteva, ChemChina-Syngenta et BASF [2].
Une analyse juridique réalisée par Greenpeace en janvier dernier montre que l’adoption en l’état de cette loi pourrait violer le droit constitutionnel de l’UE, qui garantit un niveau élevé de protection de la santé et de l’environnement, ainsi que les droits des agriculteurs et des consommateurs [3]. La loi pourrait également enfreindre le protocole de Carthagène sur la biosécurité, traité international contraignant pour l’UE et ses États membres, qui réglemente la circulation transfrontalière des OGM [4].
Dans une lettre ouverte publiée en novembre 2023, plus de 70 scientifiques et universitaires ont exprimé leurs inquiétudes quant à la tentative d’adopter cette proposition à la hâte avant les élections européennes de juin 2024, sans débat public suffisant [5]. En France, l’avis de nombreux scientifiques n’a pas été suivi, dont celui de l’ANSES. Dans un rapport rendu en décembre dernier, celle-ci a estimé que plusieurs critères d’équivalence, utilisés pour déréguler la première catégorie, ne sont pas justifiés scientifiquement [6].
Un sondage réalisé en 2022 révèle que 77% de la population française souhaitent que les nouveaux OGM fassent l’objet d’une réglementation stricte au niveau européen [7], et près de 500 000 citoyens ont également signé une pétition [8] contre l’autorisation des nouveaux OGM en Europe, demandant à leurs représentant·es français et européens de défendre l’intérêt général et d’adopter une position ferme face à cette tentative de dérégulation.
Prochaines étapes
Une fois que les Etats membres de l’UE auront arrêté leur position sur le projet de la Commission, les négociations commenceront avec le Parlement européen.
Notes aux rédactions :
[4] Le protocole de Carthagène donne aux pays le droit de décider d’autoriser ou non les importations d’OGM. En déréglementant les nouveaux OGM, l’UE rendrait cette décision impossible pour les pays tiers, car la circulation transfrontalière de nouvelles plantes génétiquement modifiées ne serait plus soumise aux procédures de notification et de consentement qui, en vertu des règles actuelles, s’appliquent aux OGM avant leur exportation.
[6] Voir https://www.anses.fr/fr/content/plantes-ntg
[7] Voir [Sondage] Nouveaux OGM : 91% des Français favorables à plus de transparence dans leur caddie, communiqué de presse Greenpeace France, juillet 2022
[8] Voir pétition sur le site web de Pollinis.