Dieppe, le 16 mars 2010 – L’Esperanza va quitter Dieppe pour Rouen. Depuis 24 heures, les pêcheurs de Dieppe bloquent l’accès au port au navire de Greenpeace, qui venait, pour quelques jours, ouvrir ses portes au grand public et débattre du nucléaire, à l’occasion du début de l’enquête publique sur le projet de construction d’un réacteur EPR à la centrale de Penly, située non loin de là, sur le littoral. Les pêcheurs reprochent à Greenpeace ses positions sur la pêche…
« Nous n’avons rien contre la pêche artisanale et durable, déclare Yannick Rousselet, chargé de campagne nucléaire de Greenpeace. Nous avons fait escale sans problème à Cherbourg ou au Havre, c’est dommage que les pêcheurs dieppois nous refusent de nous laisser débattre et nous obligent à repartir : non loin d’ici, la centrale de Penly, où risque d’être construit un réacteur EPR avec le soutien aveugle du maire de Dieppe, rejette déjà de grandes quantités de tritium en mer, bien plus préjudiciables à l’activité des pêcheurs que la présence de Greenpeace ! »
L’EPR : à marche forcée vers un échec annoncé
« Depuis le début de l’année, nous nous opposons aux exportations de déchets nucléaires français vers la Russie, rappelle Yannick Rousselet. La France envoie environ 600 tonnes de déchets radioactifs tous les 15 jours en Russie depuis 1972. La solution pour faire cesser ce trafic scandaleux n’est certainement pas de construire un nouveau réacteur qui va produire des centaines de tonnes de déchets en plus. »
Sur décision unilatérale de Nicolas Sarkozy, la construction d’un deuxième réacteur EPR va être lancée à la centrale de Penly. Greenpeace condamne l’obsession nucléaire française et le fait du prince. Au lieu d’investir dans les renouvelables et l’efficacité énergétique, qui répondent à la crise climatique, au défi de l’indépendance énergétique et du pouvoir d’achat, la France va engloutir des sommes astronomiques dans un nouveau projet nucléaire qui a fait la preuve de graves insuffisances.
En novembre, les autorités de sûreté nucléaire britannique, finlandaise et française ont fait part à Areva d’un grave problème de sûreté lié à la conception de son réacteur EPR. Par ailleurs, sur le chantier du premier EPR français, à Flamanville (Manche), EDF accuse déjà un retard d’au moins 20 mois et des coûts supplémentaires importants. Quant à la Finlande, où se construit le premier EPR au monde, c’est encore pire ! Le chantier d’Areva affiche plus de trois ans de retard et des surcoûts vertigineux (de 3,3 milliards d’euros de budget prévisionnel à 5,5 milliards d’euros !
Que s’est-il passé à Dieppe ?
Le navire de Greenpeace a fait une première tentative pour entrer dans le port le 17 mars aux alentours de 10h et il s’est retrouvé encerclé par une dizaine d’embarcations de pêche. Suite à cet incident, une rencontre a été organisée entre les représentants des pêcheurs et ceux de Greenpeace. La rencontre a été cordiale. Les pêcheurs, qui affirment leur soutien à la plupart des combats de Greenpeace, reprochent à l’association ses critiques sur la pêche industrielle. À 20h30, le collectif stop EPR s’est réuni sur le port de Dieppe pour apporter son soutien à Greenpeace. À 22h, alors que l’Esperanza avait reçu le feu vert des autorités portuaires pour venir à quai, les pêcheurs ont une nouvelle fois bloqué le navire. La préfecture a constaté les infractions d’entrave à la circulation maritime dans la matinée et dans la soirée. Le procureur de la République décidera s’il poursuit les pêcheurs pour ces infractions.
« Nous avons insisté mais nous ne souhaitons pas aller à l’affrontement, c’est pourquoi l’Esperanza va repartir dans la journée en direction de Rouen, reprend Yannick Rousselet. Mais si le débat sur l’EPR de Penly nécessite notre présence à Dieppe, nous reviendrons. Nous serons présents pour le débat public qui débute bientôt et nous ferons tout pour que le sujet du nucléaire puisse être discuté par la population et ne reste pas entre les mains des technocrates et des politiques. »