Paris, le 8 septembre 2011 – La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a estimé que la clause de sauvegarde prise par la France en février 2008 pour suspendre la culture du maïs transgénique MON810 était illégale en raison d’un vice de procédure. Une décision lourde de conséquences : elle rouvre la porte à la culture de maïs OGM en France. A l’origine de cette conclusion fâcheuse, la multinationale Monsanto. En 2008, cette dernière avait saisi le Conseil d’Etat, qui avait à son tour saisi la CJUE.
« A la manœuvre, on retrouve une fois de plus Monsanto et ses complices habituels: l’Assemblée générale des producteurs de maïs (AGPM), le Syndicat des établissements de semences agréés pour les semences de maïs (SEPROMA) et plusieurs autres producteurs de semences », explique Sylvain Tardy, directeur des campagnes de Greenpeace France. « Pour Monsanto & Cie, tous les moyens sont bons pour imposer leurs OGM aux agriculteurs et aux consommateurs. Chassez-les par la porte, et ils reviennent par la fenêtre… en tirant profit d’un vice de forme au lieu de répondre aux questions de fond ! »
Le gouvernement doit s’engager à prendre une nouvelle clause de sauvegarde
Maintenant que la CJUE a rendu son arrêt, l’affaire retourne devant le Conseil d’Etat français qui devra annuler la décision prise en février 2008. Celui-ci peut mettre plusieurs mois à le faire mais quoi qu’il en soit, il devra tôt ou tard se conformer à la décision de la CJUE, comme le veut le droit européen.
« Monsanto et ses acolytes savent bien que les Français, dans leur immense majorité, ne veulent pas d’OGM. Et pourtant, ils n’hésitent pas à recourir à des stratagèmes douteux pour contourner la volonté des citoyens« , déclare Sylvain Tardy. « Désormais, c’est au gouvernement – au plus haut niveau – de prendre ses responsabilités : s’il ne met pas en place une nouvelle clause de sauvegarde, le moratoire français sur la culture du maïs MON 810 sera bel et bien condamné et on risque de voir réapparaître les OGM dans nos champs dès le printemps prochain« .
Il faut appliquer le principe de précaution
La CJUE a déclaré la clause de sauvegarde française illégale en remettant notamment en cause le choix de la procédure mise en œuvre. Sur ce point, elle a estimé que la France s’était trompée de fondement juridique et qu’elle n’avait pas le droit d’adopter unilatéralement des mesures pour interdire la culture du MON 810.
Sur le fond, en février 2008, la clause de sauvegarde française avait été motivée par des « risques sérieux pour l’environnement » (dissémination, apparition de résistances sur les ravageurs cibles, effets sur la faune non cible) en application du principe de précaution. Aujourd’hui, c’est un retour à la case départ.
« Le principe de précaution est inscrit dans la Constitution française. En l’absence d’études suffisantes, il est évident qu’on ne doit pas planter des OGM. Cela représente un trop grand risque. Mais il peut être évité si la France et les autres pays de l’Union européenne enclenchent des clauses de sauvegarde en se servant des fondements juridiques adaptés », poursuit Sylvain Tardy.
L’évaluation des risques liés aux OGM n’est pas à la hauteur des enjeux
En décembre 2008, l’ensemble des États membres avait demandé à la Commission européenne une réforme en profondeur des mesures d’évaluation des OGM. Ils estimaient que les conditions n’étaient pas réunies pour un examen complet, notamment, des éventuels risques sanitaires et environnementaux.
« Voilà plus de trois ans que la Commission européenne doit réformer les modalités d’évaluation des OGM, mais elle tarde à le faire. Comment dire qu’un OGM est risqué ou non pour l’environnement, l’imposer à un État souverain, alors que les moyens mêmes d’une évaluation complète et non partisane ne sont pas réunis ? ».