Après l’absence criante de la question climatique lors de la présentation des priorités de la présidence française du Conseil de l’Union européenne en décembre dernier, le Président-candidat a, devant les eurodéputé·es, tenté de rattraper cette erreur en assurant de la volonté de répondre au “défi” du changement climatique.
Mais Emmanuel Macron s’est contenté d’une liste à la Prévert de différentes mesures, sans en développer ni la cohérence, ni la portée.
“Aucune vision claire ne ressort du discours d’Emmanuel Macron, notamment sur le plan économique. Un changement de système, pourtant indispensable, n’est toujours pas à l’ordre du jour. Et ce ne sont pas des vœux pieux de technologies du futur qui pourront remplacer les mesures structurantes à prendre”, regrette Clément Sénéchal, chargé de campagne climat pour Greenpeace France. “Pourtant confronté à l’enjeu climatique tout au long de son mandat, à l’heure du bilan le chef de l’État français est toujours incapable de développer une vision courageuse de l’écologie. Quand il parle de promesses abandonnées, il sait mieux que personne de quoi il parle. Pourtant, l’État de droit tant loué par le président aujourd’hui ne survivra pas à un monde à +2,7°C, soit la trajectoire des promesses actuellement sur la table”.
Le diable se cache souvent dans les détails, et sujet par sujet, les ambitions affichées d’Emmanuel Macron se heurtent à la réalité de sa présidence et de son inaction climatique.
Taxe carbone aux frontières
Tant que les industries européennes sont dispensées de contraintes climatiques significatives, la taxe carbone aux frontières sera perçue surtout comme une tentative de diversion au niveau international, et n’aura aucune chance de voir le jour : les grands émetteurs comme l’Inde, la Chine ou les États-Unis ne fourniront pas les informations nécessaires à son application. Il faut d’abord renforcer les politiques climatiques au sein de l’Union européenne, ne pas mettre la charrue avant les bœufs.
Déforestation
Greenpeace sera par ailleurs vigilante à ce qu’une législation contre la déforestation importée robuste soit bel et bien adoptée, contrairement à la version française, adoptée il y a déjà trois ans.
L’échec de la Stratégie Nationale française de lutte contre la Déforestation Importée prouve une fois de plus que signer des accords n’est pas suffisant et que ces annonces sont vouées à l’échec si les États sont aux abonnés absents lors de la mise en œuvre de ces engagements. Pour être efficace, cette législation doit prendre en compte tous les écosystèmes et toutes les matières premières sans exception, et garantir la protection des droits des peuples autochtones.
Pour porter une telle ambition au sein des discussions européennes et être crédible auprès des États membres, la France devra prouver son engagement à domicile et prendre immédiatement des mesures contraignantes pour mettre en œuvre sa Stratégie Nationale de lutte contre la Déforestation Importée.
Protection des océans
Pour l’instant, Emmanuel Macron pratique un double-discours : malgré de belles paroles en faveur des océans, et l’organisation du One Ocean Summit en février prochain à Brest, il soutient le développement de l’exploitation minière en eaux profondes, une activité industrielle néfaste qui pourrait être une catastrophe pour le climat et la biodiversité marine.
Énergie
Le Président a pudiquement évité le sujet dans son discours, mais en défendant l’inclusion du nucléaire et du gaz dans la taxonomie verte, Emmanuel Macron a investi son énergie diplomatique dans la torpillage d’un instrument climatique indispensable, et cela au grand dam des milieux financiers eux-mêmes, qui se sentent aujourd’hui manipulés.
Interrogé ensuite sur le sujet, il a livré une lecture orientée des rapports du GIEC et feint d’oublier que son propre gouvernement admet qu’aucun nouveau réacteur ne sera prêt avant 2040. Par ailleurs l’uranium est importé en France, et donc en rien garant de l’indépendance énergétique du pays.
Le Président français s’est aussi gardé de commenter le fiasco de l’EPR qui, à Flamanville mais aussi dans d’autres pays, démontre l’incapacité d’une technologie nucléaire chancelante à faire face à l’urgence climatique.