Alors qu’Emmanuel Macron vient de présenter son plan Eau en cinq axes, dont un consacré à l’agriculture, Greenpeace constate qu’il passe à côté de l’enjeu essentiel pour les années à venir dans ce secteur : celui de réformer en profondeur notre système d’élevage.
Lors de son allocution, E. Macron a bien démontré qu’il était conscient des enjeux liés à l’eau et d’une plus grande sobriété dans nos usages collectifs de cette ressource fondamentale pour la vie sur Terre. Les problématiques de l’accès à l’eau en agriculture ont été évoquées dans ce plan : le Président a bien mentionné la nécessité de changer nos modes de cultures pour préserver les sols, la biodiversité et le climat. Malheureusement, cette prise de conscience n’a pas été traduite en mesures concrètes efficaces.
“Emmanuel Macron n’a pas du tout mentionné le système d’élevage français, au cœur des enjeux liés à l’eau : il passe ainsi à côté du problème en omettant ce sujet crucial, déplore Sandy Olivar Calvo, chargée de campagne Agriculture à Greenpeace France. L’élevage industriel est non seulement particulièrement gourmand en eau (le maïs représente 60% des surfaces irriguées et sert essentiellement à nourrir nos animaux d’élevage), mais en plus, il fait peser de graves menaces sur la qualité de l’eau. Par exemple, il existe une nette corrélation entre la concentration de nitrates dans les eaux de surface et la densité des élevages, avec pour conséquences l’eutrophisation des milieux aquatiques (prolifération d’algues vertes) et une contamination de l’eau potable (environ 25% de l’exposition alimentaire aux nitrates provient de la consommation de l’eau de boisson).”
Greenpeace rappelle que toutes les formes d’élevage ne se valent pas : seul un modèle d’élevage écologique, local et autonome peut permettre à notre système alimentaire et agricole d’être plus résilient face aux multiples crises environnementales, sociales, économiques et sanitaires auxquelles ce secteur est confronté.
Par ailleurs, dans le contexte actuel particulièrement tendu autour des méga-bassines, Greenpeace rappelle que ces réserves d’eau géantes sont une maladaptation au changement climatique et une énième diversion pseudo-technologique pour éviter de se confronter au vrai sujet : celui de la nécessaire sortie de l’agriculture industrielle au profit de l’agroécologie. Ces méga-bassines, en plus d’aggraver la sécheresse, ne bénéficieront qu’à une petite poignée d’agriculteurs, laissant sur le carreaux la majorité d’entre eux. L’opposition citoyenne et paysanne à ces projets doit être entendue.
La présence du ministre de l’Agriculture au congrès de la FNSEA aujourd’hui même pour présenter le volet agricole de ce plan Eau en dit long sur la position du gouvernement : plutôt que de défendre l’intérêt général, Marc Fesneau se place symboliquement du côté des promoteurs de l’agriculture industrielle, et de ceux pour qui les profits de quelques-uns valent plus que le droit à une alimentation saine sur une planète en bonne santé pour tous les autres.
Si le gouvernement souhaite une loi d’Orientation Agricole réussie, il sera incontournable de mettre au cœur des discussions parlementaires la refonte de notre modèle d’élevage. Pour faire face à la crise de l’eau qui se profile, Greenpeace rappelle qu’il est urgent et nécessaire de planifier la sortie de l’élevage industriel, en mettant en place dès maintenant un moratoire sur les fermes usines, et de repenser l’ensemble du système pour favoriser une transition vers des élevages extensifs, autonomes, écologiques et paysans, notamment dans les régions déficitaires. Ainsi, il n’y a pas d’autre choix que de réduire considérablement notre production et notre consommation de viande. Les filières végétales destinées à l’alimentation humaine, incluant les fruits et légumes frais, les céréales et les légumineuses, doivent également être soutenues par les pouvoirs publics.