Projet de loi Climat : le “sans filtre” à l’épreuve des faits
Ce lundi, le président de la République doit s’entretenir avec les membres de la Convention citoyenne pour le climat à 17h, au Conseil économique, social et environnemental, après avoir promis que leurs propositions seraient reprises “sans filtre”.
Cette nouvelle réunion intervient après une séquence diplomatique et politique qui a mis en évidence le retard grandissant de la France dans sa politique climatique, à l’heure même où l’UE a acté une accélération de sa transition.
À cet égard, les derniers développements relatifs au projet de loi Climat, censée reprendre les propositions de la Convention citoyenne pour le climat, sont particulièrement révélateurs : pour chaque chapitre (Se loger ; Consommer, Produire, Travailler ; Se nourrir et Se déplacer), un détricotage complet des propositions des citoyen·nes se profile, au profit de mesures symboliques qui n’auront pas l’effet escompté en termes de baisse de gaz à effet de serre. Une tendance qui se confirme et que Greenpeace avait dénoncée pendant les débats sur le budget 2021, où tout le travail de la CCC avait déjà été balayé.
Des arbitrages sont encore attendus concernant la rénovation et le forfait mobilité.
Se loger
Très attendu sur le sujet, le gouvernement laisse planer le doute sur l’arbitrage final qui sera rendu concernant le chantier de la rénovation énergétique des bâtiments.
Alors que les ONG et la CCC réclament une obligation de rénovation globale en donnant la priorité aux passoires énergétiques, la perspective de mesures non contraignantes ou d’un calendrier trop lâche semble se confirmer.
« Si ce renoncement se confirme et que le gouvernement retoque l’obligation de rénovation globale, il perdra une occasion majeure d’avancer sur le climat et la justice sociale en faisant baisser les émissions de CO2 en même temps que la facture des Français·ses les plus précaires », commente Nicolas Nace, chargé de campagne Énergie pour Greenpeace France.
Consommer / Produire / Travailler
Greenpeace dénonce le refus du gouvernement de reprendre la proposition des citoyen·nes réclamant une interdiction des publicités pour les produits fortement émetteurs de gaz à effet de serre, évoquant simplement une interdiction restreinte pour la publicité en faveur des énergies fossiles.
Pour Clément Sénéchal, chargé de campagne Climat à Greenpeace France :
« L’arnaque se confirme : les mesures de la Convention citoyenne pour le climat, en particulier les plus pertinentes, sont abandonnées ou défaites. Sur la publicité, pour être cohérent, il faudrait inclure tous les biens et services qui reposent sur des énergies fossiles : véhicules et transports aériens, maritimes et routiers ».
Comme l’a montré le rapport de Greenpeace, du Réseau Action Climat et de Résistance à l’agression publicitaire, réclamant une loi Evin Climat, 5,1 milliards d’euros ont été investis l’an dernier pour la promotion des biens et services fossiles, mais seule une infime partie pour la promotion des énergies fossiles en tant que telles.
« Ce recul est d’autant plus incompréhensible que l’interdiction des publicités climaticides est plébiscitée par une majorité des Français·es sondé·es sur le sujet. Quant aux éco-conditionnalités et à l’obligation de réduire leurs émissions de CO2 pour les grandes entreprises, la feuille de route est… vide. Aucune obligation. En bref, rien dans ce qui se profile pour la prochaine loi Climat n’est de nature à transformer en profondeur nos manières de produire et consommer : le gouvernement donne dans la publicité mensongère ».
Se Nourrir
Greenpeace regrette le manque d’ambition, par exemple sur la solution retenue au sujet de l’introduction de menus végétariens dans la restauration collective publique. Alors que la Convention propose qu’un choix végétarien quotidien soit prévu pour l’ensemble de la restauration collective publique dès janvier 2022, le gouvernement propose lui de mettre en place une expérimentation sur la base du volontariat à partir de septembre 2021.
« Expérimenter ce qui existe déjà par ailleurs ne constitue pas une avancée en soi. Rien qu’en restauration scolaire, ce sont plus de 50 villes qui ont déjà mis en place une option végétarienne quotidienne, et ce depuis plusieurs années parfois. Une expérimentation basée sur le volontariat ne changera donc rien à la situation actuelle », commente Laure Ducos, chargée de campagne Agriculture et alimentation de Greenpeace France.
Voir la réaction complète de Greenpeace France.
Se déplacer
Le secteur des transports représente 29 % des émissions de gaz à effet de serre en France métropolitaine.
Greenpeace déplore les renoncements gouvernementaux sur la fin de vente des véhicules les plus polluants (décalée dans le temps), sur la fiscalité du transport routier de marchandises (reportée à plus tard) et surtout sur les propositions relatives à la baisse du trafic aérien.
« Au lieu d’acter un abandon clair et définitif de tous les projets d’extension d’aéroports, le gouvernement entretient un flou inacceptable sur le sujet. Il laisse au contraire la porte ouverte à la poursuite des projets prévus, parfois saupoudrés d’un bon “greenwashing” comme cela risque d’être le cas avec le Terminal 4 de Roissy. La question est simple et la réponse devrait l’être aussi : les projets d’extension à Roissy, Nice, Marseille, Lille, etc., sont-ils, oui ou non, abandonnés ? Le flou pour masquer le vide, c’est intolérable », commente Sarah Fayolle, chargée de campagne Transports chez Greenpeace France.
Voir la réaction complète de Greenpeace France.