Alors que les échanges à la Commission nationale du débat public (CNDP) ont débuté le 17 septembre dernier, Greenpeace France dévoile ce matin un rapport inédit intitulé La centrale de Gravelines : un château de sable en bord de mer, sur la vulnérabilité du territoire (59) du Nord de la France au risque de submersion. EDF ambitionne d’y construire deux nouveaux réacteurs nucléaires (EPR2). Greenpeace France dénonce un projet à contresens de toute logique scientifique.
Le chef de l’État a annoncé, en 2022, son intention de construire au moins six nouveaux réacteurs nucléaires en France dont une paire à Gravelines. Pourtant, ce territoire, une étendue de terre asséchée artificiellement ou polder, est déjà situé en quasi-totalité sous le niveau de la mer aux plus hautes marées et exposé aux risques d’inondations, notamment par submersion marine.
Au regard de l’aggravation du dérèglement climatique et de la trajectoire de réchauffement actuelle de la France vers +4 °C, les événements climatiques extrêmes pourraient entraîner des submersions et des inondations de plus en plus intenses et une vulnérabilité croissante de la centrale face à ces risques.
Pour Pauline Boyer, chargée de campagne nucléaire à Greenpeace France et rédactrice du rapport :
« Le projet de construction des nouveaux réacteurs en zone inondable à Gravelines est une bombe à retardement. Ce projet n’existe que parce qu’il est soumis à des pressions politiques déconnectées des conséquences du dérèglement climatique. »
De fait, la centrale actuelle de Gravelines, la plus importante d’Europe avec ses six réacteurs (REP), est déjà vulnérable à la montée des eaux. Elle est ceinturée d’ouvrages de protection pour être isolée en île, ce qui pose déjà de sérieuses questions sur la capacité à maintenir la sûreté nucléaire lors d’épisodes climatiques extrêmes.
Concernant son projet de construction de nouveaux réacteurs sur ce même site, EDF fait preuve d’opacité sur la prise en compte de ces risques. On peut le constater dans son dossier des maîtres d’ouvrage (DMO) publié il y a quelques semaines. L’électricien projette de construire les deux nouveaux réacteurs « en altitude », sur une plateforme de 11 mètres de haut. Aucune analyse de risque, aucun calcul n’est disponible pour expliquer cette décision de hauteur de plateforme, ou pour la « marge » d’un mètre annoncée par l’électricien.
En cas de situation extrême, l’objectif vital pour la centrale est de garantir l’évacuation de l’électricité produite et le refroidissement des réacteurs nucléaires pour éviter une fusion des cœurs et le dégagement de matières radioactives dans l’atmosphère et l’eau.
Mais combien de temps la sûreté de la centrale de Gravelines peut-elle être assurée si celle-ci devient une île ? Qu’en est-il d’une conjonction d’événements météorologiques extrêmes dans une région déjà soumise à un risque important d’inondations, lui-même aggravé par le dérèglement climatique ? Autant de questions sans réponses dans les documents d’EDF.
>> Vous trouverez le rapport entier ici <<
>> Le résume exécutif ici <<
>> Le lien vers la pétition ici <<
À travers un travail de cartographie projetant la montée des eaux sur le territoire de Gravelines jusqu’à la fin de la durée de vie des réacteurs, Greenpeace démontre qu’en 2100 et 2120, l’ensemble du site de la centrale de Gravelines pourrait se retrouver temporairement sous le niveau de la mer [1].
Greenpeace dénonce une mauvaise gestion du risque lié au dérèglement climatique par EDF puisque l’entreprise ne garantit la sûreté de ses réacteurs que jusqu’en 2070, tout en basant ses calculs sur des référentiels ne reflétant pas les scénarios climatiques les plus impactants (cf. DMO).
Si l’électricien ne peut pas déplacer ses réacteurs déjà existants, il peut encore appliquer le principe de précaution. EDF peut décider d’éviter la construction de nouveaux réacteurs sur cette zone située au milieu d’une zone industrielle avec de nombreux sites Seveso qui deviendra au fil du temps de plus en plus vulnérable au risque de submersion et d’inondations. A ce sujet, une pétition locale a été lancée par le Collectif Stop EPR Hauts-de-France pour ne pas ajouter deux réacteurs nucléaires aux infrastructures industrielles déjà existantes.
Avec ce rapport, Greenpeace France demande à EDF de renoncer à la construction de nouveaux réacteurs dans une zone aussi vulnérable à la montée des eaux que le territoire de Gravelines.
Le nucléaire n’est pas la solution pour lutter contre le changement climatique. Greenpeace rappelle l’urgence de mettre en place une politique basée sur les économies d’énergie, l’efficacité énergétique notamment via la rénovation des logements, et le développement des énergies renouvelables.
[1] au moment des marées hautes (PHMA) et dans les conditions d’une surcote centennale