Greenpeace déplore la réattribution de concessions forestières par le ministre de l’Environnement de la République Démocratique du Congo, en violation du moratoire de 2002. Greenpeace France demande à la France de suspendre tout nouveau programme de développement du secteur forestier congolais et de peser sur l’Initiative pour la forêt de l’Afrique centrale (CAFI, en anglais) pour qu’elle bloque ses financements.
Le 1er février dernier, le ministre de l’Environnement de la République Démocratique du Congo (RDC), Amy Ambatobe, a rétabli 6 500 km2 de concessions forestières illégales, chevauchant des zones de tourbières cruciales pour la préservation du climat. En août 2016, ces concessions avaient pourtant été annulées par l’un de ses prédécesseurs, Robert Bopolo, sur les instructions du Premier Ministre d’alors, Augustin Matata Ponyo, car elles constituaient une violation du moratoire de 2002 sur l’attribution de nouvelles exploitations forestières.
« Greenpeace Afrique appelle le gouvernement congolais à révoquer de nouveau ces concessions et, cette fois, à sanctionner les personnes responsables de cette situation », déclare Irène Wabiwa Betoko, Responsable de la campagne Forêts à Greenpeace Afrique.
En octobre 2017, la CAFI, principalement financée par la Norvège et aujourd’hui présidée par la France, a autorisé le transfert de 41,2 millions de dollars au fonds national pour la réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts (REDD+) de RDC. Ce versement était censé faire suite à la mise en place d’un « plan d’action solide » et de mesures de surveillance interne par le gouvernement congolais. Or, les attributions illégales du 1er février 2018 montrent que ce plan est en réalité bien fragile et que la CAFI n’a pas réussi à faire en sorte que la RDC respecte le moratoire.
La France, via l’Agence française de développement (AFD), a soumis plusieurs fois à la CAFI un programme pour la forêt de RDC destiné à soutenir le développement de l’exploitation forestière et à préparer la levée du moratoire. Avec ce programme, l’AFD s’affiche en contradiction totale avec son engagement de s’orienter vers des projets « 100% compatibles avec l’Accord de Paris », formulé lors du One Planet Summit de décembre 2017. Alors que l’Accord de Paris demande à tous ses signataires de promouvoir l’accroissement des stocks de carbone forestiers dans les pays en développement, la levée du moratoire en RDC menacerait notamment les immenses tourbières récemment découvertes et susceptibles de contenir plus de 30 milliards de tonnes de carbone, ce qui équivaut à trois ans d’émissions mondiales issues des combustibles fossiles.
« Pour se conformer à ses engagements climatiques, l’AFD devrait donner les moyens à la RDC d’assurer le respect du moratoire de 2002 plutôt que de soutenir sa levée, en particulier dans un contexte de crise politique et d’instabilité », analyse Clément Sénéchal, chargé de campagne Forêts à Greenpeace France. « Nous demandons à la France de ne pas engager de nouveau programme en RDC tant que des sanctions claires n’ont pas été prises contre les responsables de ces violations répétées du moratoire. Cela implique évidemment une suspension des financements de la CAFI. C’est la crédibilité de l’action climatique et diplomatique française qui est en jeu. »