Les gouvernements se réunissent pour débattre de l’avenir de l’exploitation minière en eaux profondes alors que le chef de l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) fait l’objet de critiques de plus en plus vives. Michael Lodge a récemment fait l’objet de diverses accusations pour ses liens étroits avec l’industrie minière et pour l’utilisation abusive des fonds de l’agence, comme l’a rapporté le New York Times.
La 29e session de l’Autorité internationale des fonds marins reprend aujourd’hui à Kingston, en Jamaïque, avec une réunion de son Conseil. Elle sera plus tard suivie d’une réunion de l’Assemblée, avec deux points cruciaux à l’ordre du jour : l’élection du secrétaire général et le débat sur un moratoire sur l’exploitation minière des fonds marins. Le débat sur la protection des grands fonds marins a finalement été inscrit à l’ordre du jour après avoir été bloqué l’an dernier par les pays favorables à l’exploitation minière.
« Les données scientifiques sont claires : l’exploitation minière des grands fonds marins ne peut se faire sans impact environnemental, et la seule solution est un moratoire. Plus nous en apprenons sur l’exploitation minière en eaux profondes, plus il devient difficile de la justifier. Les gouvernements présents à l’AIFM ne doivent pas se plier aux demandes de l’industrie et approuver à la hâte des règles qui ne profiteront qu’à quelques-uns, au détriment des intérêts des communautés du Pacifique et de l’avis des scientifiques », déclare François Chartier, chargé de campagne Océans à Greenpeace France, présent à la réunion.
Au cours de la réunion du Conseil, les États membres de l’AIFM poursuivront les négociations sur le projet d’adoption d’un code minier, reprenant là où les États s’étaient arrêtés en mars, alors que les divergences d’opinions entre les délégations ne cessent de s’accentuer [1][2].
Pour la première fois dans l’histoire de l’AIFM, une discussion sur la nécessité d’une politique générale sur la protection et la préservation de l’environnement marin aura lieu à l’Assemblée – un débat similaire avait été bloqué pendant toute la réunion de l’Assemblée l’année dernière.
L’élection du secrétaire général de l’AIFM aura lieu le dernier jour de l’assemblée (2 août). Empêtré dans un scandale, le Britannique Michael Lodge n’est plus soutenu par le Royaume-Uni ; il tentera toutefois d’obtenir un troisième mandat avec l’appui de Kiribati. Leticia Carvalho, spécialiste des sciences de la mer et diplomate internationale, a été présentée comme candidate alternative par son pays, le Brésil.
« Il est temps de changer l’AIFM. Un troisième mandat de Michael Lodge non seulement représenterait une menace pour les océans, mais risquerait aussi d’entamer davantage la confiance du public dans l’organisme de réglementation. Les compagnies minières trépignent d’impatience, et des preuves de plus en plus nombreuses indiquent que M. Lodge outrepasse son rôle supposément neutre pour s’aligner sur les intérêts commerciaux. L’AIFM doit écouter les millions de personnes et les gouvernements, de plus en plus nombreux, qui disent non à l’exploitation minière en eaux profondes. Il est temps de placer la préservation de l’environnement au cœur des travaux de l’AIFM », ajoute François Chartier.
D’autres candidats et candidates peuvent être désigné·es jusqu’au dernier jour de la réunion du Conseil, le 26 juillet. Même si Michael Lodge souhaite être considéré comme un « champion international de l’égalité des sexes », l’AIFM célèbre cette année son 30e anniversaire et n’a jamais eu de femme secrétaire générale.
Malgré le contexte politique incertain en France, Greenpeace France appelle le futur nouveau gouvernement à soutenir le moratoire sur l’exploitation minière des grands fonds et à garantir tout le portage politique et diplomatique nécessaire pour que ce moratoire soit adopté. C’est d’autant plus important que notre pays accueillera à Nice en juin 2025 la 3e conférence des Nations unies sur les Océans (UNOC), un rendez-vous international crucial pour la protection et l’avenir des océans.
Notes
[1] Les deux premières semaines seront principalement consacrées aux négociations sur le code minier, c’est-à-dire sur les règles édictées par l’AIFM pour l’exploration et l’exploitation des minéraux marins dans la zone internationale des fonds marins. Sous le mandat de Michael Lodge, et avec le soutien de quelques pays favorables à l’exploitation minière, le Conseil de l’AIFM se réunit désormais trois fois par an pour tenter de finaliser rapidement ces négociations. Cela va à l’encontre des demandes des scientifiques, de la société civile, des communautés autochtones et d’un nombre croissant de pays favorables à un moratoire, qui réclament du temps pour réfléchir attentivement à l’avenir des grands fonds marins.
[2] Status of the deep-sea mining regulations and underlying drivers for outstanding issues