Terminal méthanier du Havre: le pari perdant du gouvernement
À l’heure où l’hiver touche à sa fin, Greenpeace France propose un bilan de la situation du gaz en France et revient sur la crédibilité des arguments mis en avant par le gouvernement pour légitimer la mise en place du terminal méthanier du Havre au lendemain de la guerre en Ukraine. Le gouvernement avait justifié cette nouvelle infrastructure fossile dans le cadre de la loi pouvoir d’achat au nom de la sécurité d’approvisionnement du pays et de la nécessité de sortir de la dépendance au gaz russe. Au niveau européen, les États membres ont récemment accepté de reconduire l’objectif de réduction de la consommation de gaz de 15 % par rapport à la consommation moyenne de la période 2017-2022, d’ici le 31 mars 2025.
L’ONG a analysé les chiffres provenant de plusieurs bases de données relatives à la consommation et aux flux de gaz en France. Ilsmontrent qu’entre 2022 et 2023 :
- la consommation de gaz a baissé de 11 % et a atteint son plus bas niveau depuis au moins 20 ans,
- les importations de gaz naturel liquéfié (GNL) ont baissé de 15 %,
- les importations par gazoduc ont baissé de 20 %,
- il n’y pas de tension dans les stocks.
Par ailleurs, depuis la mise en service du terminal du Havre fin octobre 2023, son taux d’utilisation n’a pas dépassé 50 % et n’a pas excédé 37 % depuis décembre 2023. Le terminal a surtout été utilisé par TotalEnergies pour importer des volumes issus de son portfolio de GNL. Cette tendance baissière se vérifie au niveau des autres terminaux terrestres fixes dont l’utilisation diminue en 2023 par rapport à 2022.
Enfin, les importations de GNL de la France correspondent en majorité à du gaz de schiste américain (47,6 %), du gaz en provenance de Russie (16,6 %), d’Algérie (14,9 %) et du Qatar (7,3 %).
Pour Greenpeace France, ces données remettent à nouveau en question l’utilité réelle du terminal méthanier du Havre, mis en place à l’automne suite au lobbying de TotalEnergies* et pointé du doigt dans un rapport de l’ONG dès juin 2023.
« Sous couvert de crise énergétique, le gouvernement a cédé aux sirènes de TotalEnergies en facilitant la mise en place de son terminal méthanier au Havre alors que les capacités d’importation de GNL étaient déjà suffisantes. Résultat : avec ce cadeau fait à TotalEnergies, la France a encore plus ouvert les vannes à l’importation de gaz de schiste américain sur le continent européen, source de profits juteux pour la major française. En revanche, les factures des particuliers et des entrepreneurs ont augmenté, et TotalEnergies est le seul bénéficiaire de cette opération absurde. Le gouvernement doit donner l’ordre de désinstaller cette infrastructure s’il veut être crédible quant à ses annonces de sortie des fossiles lancées à l’international », commente Edina Ifticène, chargée de campagne Énergies fossiles à Greenpeace France.
La Commission d’enquête du Sénat sur les activités de TotalEnergies pourra par ailleurs se pencher sur ce dossier qui est un symptôme de la complaisance du gouvernement à l’égard de TotalEnergies.
* 2022 : https://www.hatvp.fr/fiche-organisation/?organisation=542051180#&fiche=OHZAXPU3
2023 : https://www.hatvp.fr/fiche-organisation/?organisation=542051180#&fiche=X3CFWXE3