Les jeunes très sensibles à l’écologie
Le premier enseignement de ce baromètre, c’est que le réchauffement climatique inquiète les jeunes : 80% d’entre eux pensent que la situation est très préoccupante ou dramatique et qu’il est urgent d’agir pour le climat. Mieux, une large majorité (76%) reconnaît la nécessité d’opérer des changements importants ou radicaux dans nos modes de vie. La jeunesse est prête à agir dans tous les domaines du quotidien : le transport du quotidien (79%), le tourisme (81%), l’alimentation (87%), la consommation (92%), l’énergie (92%), le recyclage (95%).
Seule une minorité prend souvent l’avion
Une majorité de jeunes (53%) ne prend pas, ou très rarement l’avion pour ses loisirs. A l’inverse, un tiers le prend régulièrement (plus d’une fois par an), et 16% de manière occasionnelle (une fois tous les deux à trois ans). Les personnes très diplômées (> bac+4) et celles habitant l’agglomération parisienne, sont particulièrement nombreuses à prendre l’avion au moins deux fois par an pour leurs loisirs (respectivement 27% et 25% contre 14% des jeunes en moyenne).
Cette observation est à mettre en parallèle avec les résultats de l’Étude Nationale Transport et Déplacement 2008, qui montrent que les personnes aisées et les Francilien·nes ont plus souvent recours à l’avion. C’est aussi ce que révèlent les travaux des sociologues Yoann Demoli et Jeanne Subtil, selon lesquels l’avion s’est bien moins démocratisé qu’on ne l’imagine. Pour ces deux chercheur·ses, on assiste à une “multiplication des voyages plutôt qu’une multiplication des voyageurs.”
Voler moins souvent ? C’est d’accord
Pas besoin d’avion pour éprouver du dépaysement
Sept jeunes sur 10 estiment qu’il n’est pas nécessaire de prendre l’avion pour être dépaysé·e et 88% estiment qu’il est possible de passer de bonnes vacances sans prendre l’avion. Surtout, cette conviction se retrouve à peu près dans les mêmes proportions chez les jeunes qui prennent l’avion : 63% pour le premier item et 86% pour le deuxième. Autrement dit, que leurs voyages soient réguliers ou non, les jeunes n’ont pas besoin de l’avion pour se sentir dépaysé·es. D’autant que 89% pensent que la France et ses pays frontaliers regorgent d’endroits magnifiques.
Un large soutien pour réduire la fréquence des vols de loisirs…
C’est un enseignement majeur de cette étude : 3 jeunes sur 4 sont d’accord avec l’idée que les vols de loisirs doivent rester exceptionnels pour limiter leur impact sur le réchauffement climatique. Même les plus grand·es voyageur·ses en avion soutiennent cette affirmation : 56% chez les jeunes qui font 2 à 3 vols de loisirs tous les ans, 71% pour celles et ceux qui prennent l’avion une fois par an.
Toutes les propositions pour réduire l’impact de leurs voyages sur l’environnement sont très majoritaires chez les jeunes qui prennent l’avion : partir moins loin (59%), voyager plus lentement (61%), privilégier des modes de transports moins polluants (63%). L’idée de partir moins souvent quitte à rester plus longtemps sur place est même plébiscitée par 3 jeunes sur 4, y compris parmi les personnes qui le prennent régulièrement.
… qui peine à se matérialiser au moment de réserver ses vacances
Malgré cet accord de principe, les jeunes ne choisissent pas leur destination en fonction de l’impact écologique de leur séjour. L’empreinte carbone est même le dernier critère cité dans le choix d’un mode de transport. En parallèle, 38% des jeunes interrogé·es déclarent éprouver un sentiment de culpabilité lorsqu’il·elles prennent l’avion, et 1 sur 5 ressent une pression de la part de son entourage face à cette pratique, signe que la norme sociale en la matière commence à évoluer.
C’est le grand paradoxe de cette étude : sur le papier les jeunes s’accordent sur la nécessité de voyager moins souvent en avion, mais ces intentions s’effritent en partie au moment de partir en vacances. Deux hypothèses émergent de l’étude pour expliquer cette apparente contradiction : le manque d’information sur la pollution générée par un trajet en avion, et le manque de compétitivité des alternatives comme le train.
Le rôle de l’Etat pour encourager le voyage bas-carbone
Une méconnaissance de la pollution liée au secteur aérien
Si les jeunes savent que prendre l’avion pollue, rares sont ceux qui savent à quel point l’empreinte carbone de chaque passager est élevée. Près de 80% déclarent ne pas savoir qu’un seul long-courrier est en mesure de consommer tout le budget carbone d’un individu. Un aller-retour à Rio de Janeiro produit pourtant 2,8 tonnes équivalent CO2 pour chaque passager·e. Cela représente ce que chaque être humain devrait émettre par année d’ici 2030, pour espérer rester sous les 1,5 degré de réchauffement.
De la même manière, l’évaluation de l’efficacité des différentes actions individuelles est imprécise. 24% des jeunes identifient les vacances en avion comme particulièrement néfastes pour le climat, contre 40% pour les emballages et déchets. Pour les jeunes qui prennent l’avion, réduire la fréquence de ces vols a pourtant un impact climatique bien plus puissant encore que la réduction et le tri des déchets.
Ce constat est à mettre en relation avec les efforts des compagnies aériennes pour minimiser l’impact de leurs vols sur le climat. Une moitié des répondant·es pense ainsi que la compensation carbone permettrait de voyager sans polluer (une idée souvent induite par les compagnies), alors que ces initiatives ne permettent de réduire les émissions liés à l’aviation. Parmi les solutions proposées, 61% des jeunes sont en faveur d’une « loi Evin climat », soit interdiction pure et simple de la publicité des secteurs les plus polluants, comme l’aérien.
Le coût du trajet, un élément central de la décision
Pour 38% des jeunes interrogés, le coût du trajet est un élément déterminant pour choisir leur destination de vacances. C’est le deuxième critère le plus cité après le cadre naturel (44%). Autrement dit, une partie importante des jeunes choisit le lieu de ses vacances en fonction du prix des billets.
Au vu de l’importance du critère de coût, les avantages fiscaux offerts au secteur aérien apparaissent d’autant plus scandaleux, puisqu’ils pénalisent des modes de transport moins polluants comme le train. L’Etat aurait aussi tout son rôle pour démocratiser l’accès au train. Parmi les solutions évoquées pour limiter l’impact du secteur aérien sur l’environnement, celle d’offrir un billet de train à chaque jeune de 20 ans pour pouvoir voyager gratuitement en Europe est plébiscitée à 78%.
Au regard de cette étude, les pouvoirs publics ont donc un rôle prépondérant pour permettre aux jeunes de limiter la fréquence de leurs vols de loisirs : en interdisant la publicité pour l’avion, en sensibilisant sur les ordres de grandeur climat, en mettant fin aux avantages fiscaux pour le secteur aérien, en supprimant les lignes aériennes lorsqu’une alternative en train existe en moins de 6h, en investissant massivement dans l’offre ferroviaire européenne et française.
Mais nous avons également un rôle important à jouer en changeant nos habitudes et en déconstruisant notre regard sur le voyage. L’avion n’est pas indispensable pour se sentir dépaysé·e. Mais ce n’est pas toujours facile de savoir où partir ni comment lorsque l’on a toujours pris l’avion. Pour vous aider dans cette transition vers le voyage responsable, nous avons créé un site web et un guide réunissant plus de 41 idées de destinations accessibles sans avion, classées selon la durée de vos vacances !