Imaginez une sorte de griffe, accrochée au plafond d’une grange, qui permettrait de déplacer de grandes quantités d’herbe en un seul mouvement, le tout piloté habilement par un jeune agriculteur. « Ce serait tellement pratique si j’avais ça dans ma ferme ! », s’exclame Jarno avec enthousiasme. La petite vingtaine, Jarno fait partie du troisième échange de FarmErasmus. Pour ce voyage, deux agriculteurs belges et deux agriculteurs bulgares sont en visite en France, dans le Loir-et-Cher.
Côté Belgique, nous avons donc Jarno, qui va reprendre l’exploitation de ses parents, une ferme laitière en agriculture conventionnelle, et Anne-Leen, une trentaine d’années, est dans la même situation. Côté Bulgarie, Nevena, qui possède une très petite ferme d’élevage, et Simeon, éleveur laitier, sont aussi de la partie. « Aucun d’entre eux ne travaille en agriculture biologique, souligne Suzanne Dalle, chargée de campagne agriculture chez Greenpeace, mais ils sont tous curieux de voir comment faire autrement, c’est ce qui est très intéressant ».
Visite de la ferme de la Guilbardière
Pour l’heure, ils sont en compagnie d’Anne et Gilles, les heureux propriétaires de la ferme de la Guilbardière, à Monthou-sur-Bièvre. Cette ferme laitière fonctionne sur un modèle très écologique, en cycle fermé, ce qui lui permet de trouver un équilibre économique et social assez rare dans la région. En effet, dans cette zone et avec la crise du secteur, difficile pour les exploitants de s’en sortir ces dernières années. « La clé, c’est de tout maîtriser, de l’amont à l’aval, explique Anne. Nous nourrissons nos vaches uniquement avec de l’herbe, produite sur la ferme. Pas d’ensilage donc. Nous transformons ensuite nos produits et vendons fromage blanc et lait en vente directe. Enfin, nous recyclons et réutilisons au maximum. Par exemple, le petit-lait servira à nourrir nos quelques cochons ».
Ce qui passionne particulièrement nos agriculteurs aujourd’hui, c’est ce système de séchage de l’herbe, très innovant avec sa grue mobile. « Moi je nourris mes vaches avec du maïs et autres compléments, explique Simeon. Mais Anne et Gilles sont beaucoup plus autonomes. Ils n’ont pas besoin d’acheter de compléments alimentaires à l’extérieur, c’est plus économique, et leur lait et leur viande sont de très bonne qualité ».
S’inspirer encore et toujours
Durant leurs quatre jours de visite, les agriculteurs auront visité une ferme avec des vaches Highland, cette race écossaise qui a la spécificité de s’adapter à tout type de climat. Ils auront également rencontré Margaux qui propose de la cueillette et de la vente directe, ou encore des Amaps et des exploitations qui font de la transformation et de la vente directe. Bref, tout un réseau d’agriculteurs écologiques et innovants, loin des modèles parfois très industriels de leur pays.
Nevena, 38 ans, repart de ce voyage ravie et pleine d’idées : « ce que j’ai vu ici en France va beaucoup me servir. Nous ne sommes pas certifiés bio, car il nous faudrait investir énormément pour respecter le cahier des charges, et il n’y a pas d’aides de l’État pour ça. Mais dans la réalité, nous travaillons comme si nous étions en bio. En Bulgarie, ce n’est pas facile de partager des connaissances agricoles avec d’autres cultivateurs. Ceux qui sont déjà installés depuis des années gardent leur savoir. »
Pour Greenpeace, c’est la logique inverse qu’il faut mettre en place : partager les savoir-faire et les techniques afin de développer l’agriculture écologique. La seule à assurer l’avenir de nos assiettes et celui des agriculteurs.
Vous pouvez (re)découvrir les récits des deux premières visites FarmErasmus ici et là.