De la neige à perte de vue. Il fait froid en cette fin janvier dans le nord de la Bulgarie et les terres agricoles sont cachées sous des centimètres de poudreuse blanche. Pourtant, cela ne décourage pas Daniel, Stéphane, Sébastien et Jean-Bernard, bien décidés à profiter au maximum de leur « FarmErasmus » avec Greenpeace. « Je ne connais pas du tout ce pays, confie Jean-Bernard, exploitant dans l’Eure. J’espère surtout découvrir de nouvelles techniques et une autre agriculture européenne ». Lui-même pratique sur ses terres une agriculture intégrée, qui utilise le moins de pesticides possible.
On retrouve plus ou moins les mêmes motivations chez Stéphane, éleveur porcin dans le Finistère, Sébastien, qui possède une ferme biologique en Vendée, ou encore Daniel, qui a converti au bio la quasi-totalité de son exploitation, près de Toulouse. Pour eux, l’avenir de la filière agricole française se trouve dans les pratiques locales et de qualité, et ils sont venus confronter leur vision à ce qui se pratique en Bulgarie.
À la découverte des pratiques locales
Pour cette première matinée, direction une ferme laitière en conversion. Turai, le propriétaire, y élève 180 vaches et produit lait, crème et fromages : les fameux « yellow » et « white » cheese. Le tout est écoulé en circuit court, dans les magasins alentour et les marchés. « C’est intéressant de voir cette dynamique de conversion et le fait qu’ici aussi, les agriculteurs cherchent à faire de la qualité », salue Daniel.
Cap ensuite sur une bergerie de 400 brebis, elle aussi en passe d’obtenir le label bio européen. Là encore, nos agriculteurs échangent avec les fermiers locaux et leur demandent comment ils travaillent. « C’est dingue, ils traient toujours leurs brebis à la main, s’étonne Jean-Bernard. C’est là que l’on voit la frontière entre nos deux agricultures. Eux sont encore dans une logique très paysanne. Moi je veux produire bien mais je ne renoncerai pas à mon confort pour autant. La salle de traite c’est tout de même une belle avancée ».
En deux jours, les découvertes se poursuivent et au final, ils auront vu des vignes, des producteurs de miel, de lait, de brebis ainsi qu’un meunier, tous en bio ou en conversion. Le tout émaillé de folklore local comme la bénédiction des vignes du 1er février.
La rencontre avec une pionnière du bio
Toutes ces visites ont été planifiées par Albena Simeonova, agricultrice et pionnière du mouvement bio en Bulgarie. Cette femme à l’énergie communicative travaille dans le secteur agricole depuis 1999. Son exploitation totalise 275 hectares en bio (céréales, cultures maraîchères et vignes), dont : 70 ha de grandes cultures, 30 ha de vignes et 175 ha pour l’alimentation des poules, cochons et vaches. Mais surtout, elle se consacre corps et âme au développement du bio dans le pays. « Nous n’avons droit à aucune aide du gouvernement, explique-t-elle, et c’est très difficile d’exister à côté des grosses coopératives agricoles. C’est pour cela qu’il est très important de créer des contacts, des réseaux, comme ce que nous faisons avec FarmErasmus ».
Aujourd’hui, l’agriculture bio comptabilise 7000 exploitations, soit 2% de l’agriculture du pays. Le secteur est encore très fragile et peine à exister à côté des énormes exploitations céréalières, très productivistes et destinées à l’export, qui se sont développées depuis la chute du bloc soviétique. « Notre rencontre avec Albena aura été le moment le plus enrichissant du voyage à mon sens, conclut Sébastien. Voir les difficultés qu’elle doit surmonter et malgré tout, toute cette énergie qu’elle déploie pour défendre l’agriculture écologique, c’est vraiment très porteur et plein d’espoir ».
Prochaine étape de notre voyage dans l’agriculture européenne : retour en France, avec des agriculteurs bulgares et belges… À suivre !
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