Les dirigeants du « club des 8 » (Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni et Russie) se sont réunis en Irlande du Nord pour les réjouissances annuelles du G8.
La question du dérèglement climatique a été totalement gommée de l’agenda de ce club des puissants, alors que même les organismes les plus conservateurs appellent à une mobilisation urgente contre les changements climatiques !
La Banque mondiale nous met en garde contre notre inaction, qui nous conduit vers une hausse des températures de 4°C et vers un monde dans lequel, justement, il ne ferait pas bon vivre. Et l’Agence internationale de l’énergie nous rappelle que, pour éviter le chaos, nous avons tout intérêt à laisser la grande majorité des réserves de pétrole, de charbon et de gaz là où elles se trouvent, reconnaissant ainsi – enfin – que la planète doit rester dans les clous d’un « budget carbone« .
Malgré ces rapports alarmistes, le dérèglement climatique brille par son absence sur le site Internet du sommet du G8. Mais cela n’a pas toujours été ainsi.
En 2007, 2008 ou 2009, par exemple, le climat était un sujet de préoccupation prioritaire. Cette année, grâce notamment au lobbying du gouvernement britannique, il a été rayé de la carte. Malgré l’urgence, c’est dans le communiqué final que la lutte contre les changements climatiques est vaguement évoquée, sans ambition, sans précisions.
A deux ans de l’échéance fixée pour le prochain accord mondial sur le climat, la situation n’est pas très encourageante.
Prouvez-nous que nous avons tort !
Nous ne demandons qu’à avoir la preuve que nous nous trompons. Si les dirigeants du G8 décidaient de se ressaisir, voici les points qu’ils devraient inscrire à l’ordre du jour climatique :
définir clairement d’où proviendra l’aide promise pour financer les activités d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques et de lutte contre la déforestation, et à quelle hauteur chaque État du G8 contribuera aux » financements climatiques » pour les pays qui en ont besoin entre 2013 et 2015 ;
trouver des sources de financement innovantes pour lutter de toute urgence contre la pauvreté et les changements climatiques, notamment en mettant à contribution les transports maritime et aérien pour les dégâts qu’ils causent au climat, en taxant les transactions financières et en réinjectant dans la transition énergétique les subventions absurdes actuellement accordées aux combustibles fossiles.
montrer qu’ils sont déterminés à conclure un accord mondial ambitieux, équitable et contraignant sur le climat lors du prochain sommet de l’ONU en 2015, qui devrait se tenir à Paris. Pour être crédibles, tous les pays du G8 doivent prendre des mesures immédiates pour que les émissions atteignent leur niveau maximal en 2020, et accélérer leurs efforts d’ici à cette échéance.
On ne peut pas frauder avec le climat…
Bien entendu, les questions inscrites à l’ordre du jour – le commerce, la fiscalité et la transparence – sont importantes…
Mais on ne peut que déplorer le fait que les changements climatiques n’aient pas leur place dans les débats sur la transparence. À plus forte raison quand on constate que le G8 relève le manque de transparence des transactions foncières des entreprises dans les pays en développement, et les problèmes de corruption liés à l’industrie extractive dans ces mêmes pays.
Après tout, les changements climatiques sont un moteur de l’accaparement de terres. Et s’il est nécessaire de faire la transparence sur les paiements qui facilitent l’extraction des combustibles fossiles, nous savons bien que nous devrions de toute façon nous garder d’exploiter ces ressources.
Car avec le climat, on ne peut pas tricher, il n’y a pas d’évasion ou d’optimisation qui tienne.
Un accord sur l’évasion fiscale est bénéfique pour la planète et ses habitants. Car lorsqu’elles contournent les règles fiscales, les entreprises contribuent non seulement à creuser les injustices, mais aussi à diminuer les ressources disponibles pour financer les services publics, la lutte contre les changements climatiques et la pauvreté.
De plus, c’est dans le propre intérêt du G8 que de parvenir à une entente en matière d’évasion fiscale : cela lui permet de montrer qu’il n’est pas totalement inutile dans un monde multipolaire.
De ce côté-là, l’importance du G8 ne fait aucun doute pour le climat. En effet, les pays du G8 sont historiquement responsables de la très grande majorité des émissions mondiales de gaz à effet de serre, et ils restent encore de gros émetteurs. Et s’il faut que tous ceux qui ont une empreinte carbone importante agissent, qu’ils vivent à Manille ou à New York, les pays du G8 ont le devoir de mettre la main à la pâte et à la poche en premier et d’envoyer un signal fort. Cela pourrait briser l’attentisme qui paralyse les négociations internationales sur le climat, et faire comprendre clairement aux marchés et aux investisseurs que les énergies fossiles ne seront pas rentables à long terme.
« Bien sûr, le G8 ne peut pas tout, tout seul »
Bien sûr Monsieur le Président, on n’aurait pas dit mieux… Dans une tribune publiée à quelques jours de l’ouverture du G8, François Hollande a tenu ces sages propos…
Mais concrètement, que fait la France… ?
Le président ne semble guère se soucier du débat en cours en France sur la transition énergétique, ni prêt à infléchir significativement la politique énergétique de son pays. Et il aurait tort de miser un succès à Paris en décembre 2015 quand il prône une réduction de seulement 40% des émissions européennes de gaz à effet de serre à l’horizon 2030, au lieu des 55% requis…
La France a aussi sa part à accomplir.