Quelle est la position de Greenpeace sur l'huile de palme ?
Dans quels produits trouve-t-on de l’huile de palme ?
De la pâte à tartiner au dentifrice en passant par les biscottes ou le shampoing, l’huile de palme est présente dans d’innombrables produits du quotidien. On estime qu’environ la moitié des produits présents en supermarché contient de l’huile de palme ou des produits chimiques dérivés de l’huile de palme.
Au niveau mondial, près de 70% de la production d’huile de palme est destinée à l’industrie agroalimentaire, 27% à l’industrie cosmétique (mais aussi détergents, produits d’entretien). Le reste de la production d’huile de palme est utilisé pour la production d’énergie, comme les agrocarburants par exemple. Mais au niveau européen, ce ne sont pas moins de 46% des volumes importés qui ont été utilisés pour les agrocarburants ! Aujourd’hui donc, près de la moitié de l’huile de palme que nous importons termine dans nos voitures.
Quels sont les problèmes environnementaux causés par la production d’huile de palme?
Afin de répondre à une demande mondiale en hausse constante depuis les années 2000, l’Asie du Sud-Est a sacrifié des millions d’hectares de forêts à une production d’huile de palme en croissance exponentielle, entraînant par la même occasion de nombreux conflits avec les communautés touchées.
L’Indonésie produit la moitié de l’huile de palme mondiale et la production d’huile de palme y demeure la première cause de déforestation : en Indonésie plus de 60% des nouvelles plantations ont été plantées au détriment de forêts tropicales riches en biodiversité. Au total, depuis 1990, ce sont 31 millions d’hectares de forêts – presque la superficie de l’Allemagne – qui ont disparu en Indonésie !
Les conséquences de la disparition de ces forêts tropicales sont dramatiques pour le climat et la biodiversité. La déforestation est responsable au niveau mondial de 12% des émissions de GES et la déforestation a fait de l’Indonésie l’un des plus gros pollueurs de la planète. Par ailleurs l’Indonésie abrite plus d’espèces menacées ou en danger (comme l’orang-outan, le tigre de Sumatra, les éléphants de forêts…) que n’importe quel autre pays. Ce triste record est largement dû à la disparition de l’habitat de ces espèces.
Qu’est-ce que Greenpeace attend des entreprises de la filière huile de palme ?
En 2010, et dans les années qui ont suivies, des dizaines de multinationales des secteurs agroalimentaire et cosmétique ont pris des engagements pour lutter contre la déforestation. Elles se sont donné jusqu’à 2020 pour mettre en œuvre ces engagements “Zéro Déforestation”. Il y a urgence, c’est dorénavant une question de mois. Greenpeace attend de toutes ces entreprises qu’elles présentent des plans d’action pour garantir qu’en 2020 toute l’huile de palme qu’elle incorporent dans leurs produits n’aura pas contribué à la déforestation. Les industriels doivent pouvoir garantir aux consommateurs-trices qu’en 2020 ils n’utiliseront plus que de l’huile de palme “Zéro Déforestation”, quitte à réduire leurs volumes.
Ou en sont les entreprises de la filière huile de palme dans la mise en oeuvre de leurs engagements à lutter contre la déforestation ?
En 2007, Greenpeace avait publié un premier rapport, intitulé Cooking the climate (synthèse disponible en français : La palme du réchauffement) . A l’époque, l’impact de la production et de la consommation d’huile de palme sur l’environnement (et sur les forêts tropicales indonésiennes en particulier) n’était pas un sujet préoccupant pour la plupart des entreprises concernées. Les consommateurs-trices n’étaient pas encore très familiers non plus des conséquences néfastes que peut avoir la production d’huile de palme sur les forêts et le climat.
Selon notre rapport Still cooking the climate (novembre 2017) les principaux négociants d’huile de palme du monde qui vendent l’huile de palme aux plus grosses entreprises de biens de consommation ne sont aujourd’hui pas en mesure de garantir la mise en place effective de leur politique zéro déforestation, c’est-à-dire que leur huile de palme n’a pas contribué à la déforestation. Si la trajectoire actuelle se poursuit, l’industrie de l’huile de palme, et par conséquent ses clients directs, n’ont aucune chance d’atteindre leur objectif d’avoir une huile de palme zéro déforestation d’ici à 2020. Une très mauvaise nouvelle pour les forêts, la biodiversité, le climat ainsi que les populations locales.
Début 2018, Greenpeace a demandé à 16 entreprises qui s’étaient engagées à “zéro déforestation” de publier la liste de l’ensemble de leurs fournisseurs et des usines auprès desquels elles s’approvisionnent. En effet, la première étape pour un industriel qui veut respecter ses engagements “Zéro Déforestation” est de savoir auprès de quels producteurs d’huile de palme il se fournit. Pour mettre en œuvre un engagement zéro déforestation, il y a deux critères primordiaux : la transparence et la traçabilité. Nous avons voulu savoir où en étaient les entreprises consommatrices d’huile de palme sur ces deux volets et nous avons publié les résultats de nos enquêtes en mars 2018 dans un rapport intitulé Moment of Truth. Les conclusions ne sont pas bonnes et sont à lire en détail ici. Greenpeace demande aux entreprises de faire toute la lumière sur l’origine de leur huile de palme et de ne plus s’approvisionner auprès des producteurs qui refusent de changer leurs pratiques.
Peut-on produire de l’huile de palme qui ne contribue pas à la déforestation ?
Oui, il est possible de produire de l’huile de palme qui ne contribue pas à la déforestation : si une entreprise productrice d’huile de palme applique rigoureusement une méthodologie scientifique précise appelée High Carbon Stock (HCS) pour ses nouvelles concessions alors elle produira de l’huile de palme qui n’aura pas contribué à la déforestation. L’approche High Carbon Stock est la seule méthodologie permettant de mettre en oeuvre sur le terrain les engagements “Zéro Déforestation” pris par les industriels.
La certification “RSPO” n’est-elle pas censée garantir de l’huile de palme durable ?
La certification RSPO ne garantit pas l’absence de déforestation. Pour Greenpeace, il est donc très clair que la certification RSPO n’est pas suffisante pour qualifier une huile de durable. Seule l’approche High Carbon Stock (HCS) permet de couper le lien entre déforestation tropicale et production d’huile de palme. Si les producteurs d’huile de palme mettent en oeuvre de façon rigoureuse la méthodologie HCS, alors ils pourront produire de l’huile de palme qui n’aura pas contribué à la déforestation. En revanche, qu’une entreprise de plantations se repose sur la certification RSPO ne lui garantit en aucun cas l’absence de déforestation.
La RSPO, principale certification sur le marché de l’huile de palme, ne couvre encore que de faibles volumes. Mais déjà, elle souffre de lourdes carences dans la définition de ses critères de durabilité, de manquements répétés dans sa mise en oeuvre ou encore de faiblesse chronique sur le plan de la transparence.
Greenpeace appelle-t elle au boycott de l’huile de palme ?
Greenpeace ne préconise pas le boycott des produits contenant de l’huile de palme. Nous ne souhaitons pas éliminer l’huile de palme, nous souhaitons éliminer l’huile de palme qui a engendré la destruction de forêts tropicales et de tourbières. C’est la raison pour laquelle les entreprises consommatrices d’huile de palme doivent identifier avec précision la provenance de l’huile de palme qu’elles achètent et exclure les fournisseurs qui se rendent coupables de déforestation. Par ailleurs, la substitution de l’huile de palme par une autre huile végétale ne serait pas sans conséquences sur la forêt et l’environnement et doit donc être envisagée avec précaution.
Que pense Greenpeace des agrocarburants ?
L’essor actuel des agrocarburants est particulièrement inquiétant. Pour réduire significativement l’empreinte forêt (qui représente l’impact des produits que nous consommons sur la destruction des forêts naturelles) de la France , il faut que le gouvernement décide d’une sortie progressive des agrocarburants de première génération.