Huile de palme : cartes sur table avec les marques

Il ne reste plus que 400 tigres de Sumatra dans les forêts indonésiennes. Et ils sont en sursis.

Leur habitat est grignoté, jour après jour, par d’immenses plantations de palmiers à huile. D’après les cartes officielles du ministère indonésien des Forêts, l’Indonésie a perdu au moins 1 240 000 hectares de forêts entre 2009 et 2011, soit 620 000 hectares par an. L’expansion des plantations de palmier à huile est le principal moteur de cette déforestation.

Les grandes marques ont des responsabilités envers nous en tant que consommateurs

Greenpeace a analysé les politiques d’approvisionnement de 8 grandes firmes multinationales, qui sont toute clientes de la firme Wilmar International, premier négociant en huile de palme du monde et contributeur notoire à la destruction des forêts indonésiennes.
La plupart de ces entreprises se retranchent encore derrière le label de durabilité RSPO, qui est pourtant insuffisant à garantir des achats d’huile responsable.

D’autres ont enfin pris la mesure de l’enjeu lié à la présence d’huile de palme dans leurs produits, tels Nestlé et tout récemment Ferrero ou encore Unilever !

Voir la totalité des réponses des marques sur le site du « Tiger Challenge »

12 entreprises françaises contactées

Enseignes de la grande distribution, industriels de l’agroalimentaire ou des cosmétiques, membres de la Roundtable for Sustainable Palm Oil (RSPO, Table ronde pour une huile de palme durable) ou importantes utilisatrices d’huile de palme, Greenpeace les a contactées.

Dans la grande distribution française, les mauvais élèves sont Système U et Casino, qui n’ont aujourd’hui communiqué aucune information à Greenpeace. Le cas de Casino est tout particulièrement ironique. Côté pile, cette enseigne s’est saisie de longue date de la controverse sur l’huile de palme, en lançant une campagne de communication sur la substitution d’huile de palme dans des produits alimentaires. Pur opportunisme marketing? Car côté face, Casino ne donne aucun signe montrant qu’elle prend sérieusement en compte le problème de sa contribution à la déforestation dans ses produits non alimentaires.

Aux actes !

Carrefour, Auchan, Intermarché et Leclerc ont déclaré avoir contacté certains de leurs fournisseurs pour qu’ils garantissent à terme une huile de palme « zéro déforestation ». Mais si cette demande n’est pas assortie d’une échéance et de sanctions éventuelles (et notamment des sanctions économiques, voire une suspension de contrat), on peut s’interroger sur la sincérité de leur résolution.

Carrefour en particulier est très investi au sein de la RSPO. La crédibilité des engagements du distributeur dans ce dossier est donc étroitement liée à celle de la table ronde … sérieusement écornée ces derniers temps. Près de dix ans après sa création, le bilan de la RSPO est en demi-teinte. Alors que l’organisation aurait dû contribuer à briser le cercle vicieux entre fabrication d’huile de palme et déforestation, les résultats ne sont pas là… (lire notre billet : Huile de palme : vous avez dit “durable” ? )

Carrefour vient toutefois de reconnaître la nécessité d’aller au-delà du « socle RSPO » pour « préserver tourbières et forêts naturelles ». Il lui faut maintenant joindre les actes à la parole, rendre public un engagement zéro déforestation et établir un plan d’action avec ses fournisseurs.

Côté entreprises consommatrices d’huile de palme, L’Oréal a entamé un dialogue avec ses fournisseurs en leur indiquant sa volonté de ne plus travailler, à terme, qu’avec des fournisseurs garantissant une huile de palme zéro déforestation. C’est un signal significatif donné au secteur par le leader mondial des cosmétiques, mais là encore L’Oréal doit assumer jusqu’au bout cette démarche, s’engager publiquement auprès du public à ne plus contribuer à la déforestation tropicale par ses achats d’huile de palme, et établir un plan d’action à échéance rapide pour y parvenir. L’Oréal doit en particulier signifier clairement à Wilmar International, dont Greenpeace vient de dénoncer les pratiques conduisant à la déforestation tropicale (voir en anglais, le rapport Permis de tuer), qu’il perdra des clients importants si Wilmar ne s’engage pas vers le « zéro déforestation ».

Danone s’est engagé à 100% d’huile certifiée RSPO et physiquement tracée d’ici 2015, mais cela ne constitue qu’une première étape vers la responsabilité environnementale. Danone doit impérativement s’engager à aller au-delà des critères RSPO, largement insuffisants! Car les déboisements et incendies catastrophiques qui affectent l’Indonésie continuent d’impliquer des plantations certifiées “durables” et donc, de fait, des membres de la RSPO … Comme Danone.

La palme de l’hypocrisie revient à Bongrain (St Morêt, Elle et Vire, etc.), Lactalis (Président, Nesquik, La Laitière parmi beaucoup d’autres) et Pasquier (brioches), qui sont des groupes membres de la RSPO et fiers de l’être … Mais qui n’ont pas daigné répondre au questionnaire !

Nous estimons, comme de plus en plus de citoyens, qu’il est légitime de savoir si les produits que nous utilisons au quotidien sont liés à la disparition des forêts et des tigres. Des mesures doivent être prises de toute urgence pour arrêter la destruction des forêts liée à l’huile de palme, produite pour fabriquer les produits que nous consommons. Des alternatives existent : il est possible de cultiver des palmiers à huile sans détruire l’environnement.

Si les grandes marques veulent cesser de faire partie du problème, elles doivent appliquer des normes plus strictes que celles de la RSPO, faire le ménage dans leurs chaînes de production et choisir des fournisseurs qui respectent l’environnement.