Après les promesses, quels actes ?
Les activités industrielles liées à l’exploitation de l’huile de palme constituent l’une des menaces les plus importantes pour les forêts de la planète : les plantations de palmiers à huile remplacent un écosystème forestier naturel d’une grande richesse, impliquent de recourir à des feux de forêt dommageables pour l’atmosphère et la régulation du climat, et empiètent sur les cultures et les activités de subsistance des populations locales. Nulle part ailleurs qu’en Indonésie ces dégâts ne sont aussi visibles : depuis 1990, le pays a perdu plus de 31 millions d’hectares de forêts, soit une surface équivalente au territoire allemand.
Il y a deux ans, suite à nos campagnes, plusieurs grandes enseignes concernées par l’exploitation de l’huile de palme indonésienne publiaient des engagements “Zéro Déforestation”. Il est temps aujourd’hui pour Greenpeace de mener une première évaluation de la mise en œuvre de ces déclarations positives. Nous avons donc élaboré un premier classement de ces grandes marques pour voir dans quelles mesures leurs promesses avaient été suivies d’effet.
Nos critères d’évaluation
Nous avons étudié l’action de ces enseignes mondiales d’après trois axes principaux : comment traduisent-elles concrètement leurs engagements contre la déforestation ? Avec quel niveau de transparence ? Et que font-elles aujourd’hui pour transformer l’industrie mondiale de l’huile de palme avec laquelle elles interagissent d’une façon ou d’une autre via les produits qu’elles commercialisent.
Concrètement, nous considérons que les enseignes sont enclines à respecter leurs engagement si:
- Elles ont fait des progrès considérables sur la manière dont elles parviennent à mettre en place une traçabilité de l’huile de palme utilisée dans leurs produits, ce qui implique une information précise sur les plantations de palmiers à huile d’où elle provient à l’origine,
- Elles ont réussi à mettre en place un organisme tiers et indépendant pour vérifier que leurs produits contenant de l’huile de palme répondent aux critères Zéro Déforestation,
- Leurs produits sont certifiés par un organisme tiers d’après la méthodologie HCS [en] (“High carbon stock”), qui fait la différence entre les parcelles forestières sensibles pour le climat et les autres (c’est-à-dire une batterie de critères scientifiques qui établissent un nuancier quant à la valeur écologique des différentes parcelles forestières).
Les résultats
Après un long travail d’enquête, nous sommes arrivés aux résultats suivants :
- Les marques en échec : Colgate-Palmolive, Johnson & Johnson, Pepsi
- Les marques qui font des progrès décents : Danone, General Mills, Ikea, Kellogg’s, Mars, Mondelez, Orkla, Procter & Gamble, Unilever
- Les marques fournissant un effort satisfaisant :Ferrero, Nestlé
Des progrès sont donc observés, mais ils sont encore trop lents. Nous souhaitons aujourd’hui que ces grandes enseignes deviennent de réels acteurs d’une transformation écologique significative de l’industrie de l’huile de palme. Comment ? En appliquant et promouvant la méthodologie HCS, en rejoignant le Palm Oil Innovation Group (Groupe d’innovation pour l’huile de palme), et en faisant en sorte que les politiques Zéro Déforestation ne concernent pas seulement leur propre chaîne d’approvisionnement, mais l’ensemble des activités de leurs fournisseurs.
La nouvelle frontière de l’huile de palme
En outre, la frontière de l’huile de palme tend à se déplacer vers l’Afrique, où les forêts du bassin Congo sont aujourd’hui menacées par les appétits industriels de quelques grands groupes, comme la Socfin qui possède plusieurs concessions sensibles et refuse pour le moment de s’engager en faveur d’une politique Zéro Déforestation (voir notre enquête). La Socfin est détenue à 38, 75 % par le groupe Bolloré, qui refuse pour l’instant de faire jouer son pouvoir d’influence. Nous avons donc lancé une pétition à l’attention de V. Bolloré, que vous pouvez signer à votre tour si vous ne l’avez pas encore fait.