Greenpeace Russie “indésirable” : réaction de Greenpeace international
Amsterdam, Pays-Bas – Le bureau du procureur général de la Fédération de Russie a déclaré Greenpeace International « organisation indésirable » au motif que le travail de Greenpeace « constitue une menace pour les fondements de l’ordre constitutionnel et la sécurité de la Fédération de Russie. Dans les faits, les activités environnementales de Greenpeace en Russie s’accompagnent de la promotion active d’une position politique, de tentatives d’ingérence dans les affaires intérieures de l’État et visent à saper ses fondements économiques. »
Cette décision implique l’interdiction de toute activité de Greenpeace en Russie, mettant fin au travail que Greenpeace Russie a accompli depuis 30 ans pour protéger l’environnement – un travail dont elle peut être fière. Greenpeace International condamne cette décision.
En réalité, cette décision malavisée signifie qu’il n’est pas désirable de protéger la nature en Russie. Mais alors, qu’est-ce qui est désirable ? Soutenir une activité industrielle nuisible à la nature et à la santé humaine, déverser du pétrole, rejeter des déchets toxiques dans de l’eau potable, exposer les populations à des émissions toxiques, brûler du charbon, produire des montagnes de déchets plastiques, raser des forêts protégées, ignorer les incendies de forêt et ne rien faire face à la crise climatique ?
Il est clair que Greenpeace International – et par conséquent Greenpeace Russie – a été qualifiée d’indésirable parce que nous nous opposons à la mise en œuvre de projets désastreux pour l’environnement. Chaque fois que nous nous y opposons, nous devons faire face à la pression intense de ceux qui considèrent la nature uniquement comme une source de profits. Ainsi, la protection de la nature est désormais présentée à tort comme une menace pour la sécurité nationale et les intérêts de la Russie.
Quiconque dresse ce tableau sombre de Greenpeace Russie n’a manifestement aucune idée de ce qu’a accompli Greenpeace Russie depuis 30 ans. Voici quelques exemples :
En 1995, à l’initiative de Greenpeace Russie, les forêts vierges de Komi sont devenues le premier site de Russie à obtenir la protection de l’UNESCO. Greenpeace Russie a non seulement aidé ces territoires à obtenir le prestigieux statut international de patrimoine mondial, mais y a également empêché plus de 10 tentatives destructrices d’extraction d’or. Depuis 30 ans, grâce à notre travail, d’autres territoires russes sont devenus des sites du patrimoine mondial de l’UNESCO, par exemple, les volcans du Kamtchatka ou le lac Baïkal. En collaboration avec des bénévoles, Greenpeace plante et protège les forêts dans les parcs nationaux, combat les incendies de forêt dans les réserves naturelles de l’Oural, de la Sibérie et de l’Extrême-Orient.
Depuis plus de 20 ans, Greenpeace Russie travaille sans relâche pour défendre le lac Baïkal, luttant contre les braconniers qui chassent le phoque du Baïkal et aidant à mettre fin aux activités d’une usine de pâte et papier qui empoisonnait les eaux de ce lac unique depuis des décennies. En collaboration avec Greenpeace, des citoyens et citoyennes russes engagés ont réussi à déplacer le site d’un oléoduc qui devait être installé à seulement 800 mètres de la rive du lac. Récemment, Greenpeace a étudié la pollution plastique du Baïkal et la contamination de ses eaux par des produits chimiques dangereux, et s’est efforcée de faire interdire l’exploitation forestière massive près de ses côtes.
Pendant de nombreuses années, Greenpeace Russie a combattu la pollution toxique par les dioxines et autres produits chimiques, empêchant les importations de déchets dangereux d’autres pays. En collaboration avec des bénévoles, les patrouilles de Greenpeace ont identifié et nettoyé la pollution causée par de nombreux déversements de pétrole dans le Nord et en Sibérie. Suite à l’action de Greenpeace, l’entreprise Norilsk Nickel a été contrainte de payer une amende sans précédent d’environ deux milliards de dollars pour la vaste marée noire de Norilsk en 2020.
Greenpeace Russie a été la première à dénoncer les problèmes de tri et de traitement des déchets dans le pays. Après des années de travail, de lutte contre la construction d’incinérateurs de déchets dangereux, d’expertises et de protestations, le tri des déchets est devenu la norme. Afin d’aider les populations, Greenpeace et des centaines de bénévoles à travers le pays ont conçu et mettent constamment à jour la Recyclemap, une carte unique en son genre qui indique environ 30 000 points de collecte des déchets dans 64 villes.
Les experts de Greenpeace ont mené des études sur les côtes des lacs, des rivières et des mers russes, réalisé un audit public national des polluants côtiers et mené d’autres recherches dont les résultats ont appuyé une demande de restriction des emballages en plastique à usage unique. Une interdiction de leur utilisation est attendue vers 2025.
En collaboration avec des experts de premier plan, nous avons effectué des recherches approfondies et proposé des solutions concrètes pour atteindre la neutralité carbone grâce au développement d’une économie circulaire, à la réduction des déchets, à la protection des forêts, à la prévention des incendies, à l’utilisation de sources d’énergie renouvelables et à l’efficacité énergétique.
Greenpeace et d’autres organisations environnementales en Russie ont contribué à lancer le débat public dans le pays sur la crise climatique et les mesures pour la résoudre. Nos spécialistes ont étudié des sites d’énergie renouvelable en Russie, proposé publiquement aux autorités régionales d’inclure le développement de sources d’énergies renouvelables dans leurs plans d’adaptation au changement climatique et, dans de nombreuses régions, ont reçu un soutien officiel à cet égard.
Grâce à Greenpeace et à ses sympathisants, l’interdiction des brûlis a été adoptée. Depuis plus de dix ans, 25 groupes de pompiers forestiers volontaires ont été créés dans tout le pays et, aujourd’hui, c’est tout un mouvement de bénévoles hautement qualifiés qui travaille aux côtés de Greenpeace pour sauver les forêts et les tourbières des incendies.
Ce ne sont là que quelques-unes des actions que mène Greenpeace pour la protection de la nature en Russie depuis 30 ans. L’organisation s’est toujours appuyée sur ses sympathisants et la population. Plus d’un million de personnes ont signé des pétitions, partagé des informations sur des cartes, planté des arbres, éteint des incendies et aidé à mener des recherches. Des dizaines de milliers de citoyens et citoyennes russes nous ont soutenus financièrement pour que Greenpeace puisse exister sans financement de l’État, des partis politiques ou des entreprises. En interdisant Greenpeace en raison de sa position critique sur les questions environnementales, la Russie sera privée de l’un de ses principaux experts des problèmes et des solutions en matière environnementale, et les populations qui ont essayé de protéger la nature seront désormais privées d’un allié solide. L’interdiction des activités de Greenpeace en Russie est absurde et irresponsable et constitue une décision destructrice face aux crises du climat et de la biodiversité.