Signez la pétition ici : Récifs de Grande Anse
Les récifs coralliens de La Réunion sont en perdition, toutefois Grande Anse abrite les récifs les plus vivants de toute La Réunion (selon le rapport de Broudic et al. 2024).
Le bassin de baignade est connecté à ce récif, favorisant la prolifération d’une biodiversité exceptionnelle (selon le livret de VieOcéane, 2024). Malgré ces enjeux écologiques majeurs, le commune de Petite-Ile a pour projet l’extension du bassin de Grande Anse qui est budgétisée à 5,07 millions d’euros. Les impacts physiques des machines de construction à proximité et dans le bassin viendront déstabiliser la biodiversité y vivant et des tonnes de sédiments vont se mettre en suspension et venir étouffer les coraux du bassin mais aussi du récif corallien juxtaposé. L’extension prévoit de quasiment doubler la surface du bassin actuel et de construire une fosse de natation sur 650m² avec une profondeur nivelée et atteignant un maximal à 1,50m. Cette fosse représentera 10% de la surface du futur bassin de Grande Anse.
Au vu de la dépendance de la population côtière réunionnaise aux récifs coralliens, venir détruire le seul espace de vie sous-marine restant est une hérésie. De plus, la population de Petite Ile et les usagers de Grande Anse n’ont pas été sollicités en amont du projet. Cette extension ne répond à aucune demande citoyenne, elle répond aux intérêts économiques du tourisme, dont le Comité d’Orientation Stratégique du Tourisme avait stipulé en 2013 que la « création de zones de loisirs structurées autour du bassin de baignade est une orientation prioritaire pour l’attractivité touristique de l’île de La Réunion ».
L’extension du bassin de Grande Anse et la fosse de natation ne doivent pas voir le jour. Les récifs coralliens resplendissants auront peu de chance de pouvoir revenir à leur état actuel après les travaux, le changement climatique et les pressions grandissantes du bassin versant ne donnent pas les conditions environnementales à cette résilience. A l’heure de la disparition des récifs coralliens, évitons les projets mortifères et protégeons-les par la loi. Selon la Stratégie Nationale pour les Aires Protégées, 100% des récifs coralliens français seront protégés d’ici 2025. Tendons vers cet objectif et disons non à l’extension du bassin de baignade de Grande Anse.
Pourquoi faut-il agir maintenant ?
Nous l’avons fait, les scientifiques l’ont fait. Ils ont parcouru tous les récifs coralliens de La Réunion pendant trois ans. Leur constat est clair, Grande Anse abrite le plus de coraux (recouvrement corallien moyen d’environ 54%) alors qu’à l’ouest, la situation est très problématique (recouvrement corallien moyen d’environ 16%). À cela vient s’ajouter un livret rédigé par VieOcéane pour témoigner de la biodiversité exceptionnelle du bassin de baignade de Grande Anse. Ces résultats ont été partagés aux services de l’État compétents en la matière (la commune de Petite Ile, Préfecture, DEAL, etc.)
Toutefois, le bassin va être agrandi. Cette extension est justifiée par deux points majeurs : acquérir la compétence du savoir nager en classe primaire et sécuriser la baignade. En ce sens, la digue marine va être reconstruite pour atteindre un total de 6 400m² (presque le double de la surface actuelle). Une fosse de natation va être creusée sur une surface de 650m² (environs 22x30m) avec une profondeur maximale de 1,50 m. Une canalisation d’une longueur d’environ 120 m sous la plage et le bassin de baignade sera construite pour dévier les eaux pluviales – polluées par les différents usages du bassin versant (agriculture, eaux usées domestiques) – directement sur le récif de Grande Anse (le plus vivant des récifs de La Réunion).
Incohérence sociale : Un argument fort en faveur de l’extension du bassin de baignade de Grande Anse est la protection face aux requins. La commune de Petite-Ile affirme des observations récurrentes de requins dans le bassin sans pour autant donner les sources de ses propos. Le seul accès potentiel pour un requin de rentrer et sortir est par l’ouverture à l’ouest du bassin lors des marées hautes. Est-ce que la commune de Petite-Ile assure la protection des usagers en ayant connaissance de ce fait sans n’avoir jamais fermé l’ouverture à l’ouest du bassin ? Si le problème requin est la raison principale du projet d’extension du bassin de Grande Anse, alors la construction d’un poste de secours et l’installation de blocs basaltiques pour fermer l’ouverture ouest semble amplement suffisante. Ces installations devraient réduire drastiquement les impacts sur les colonies coralliennes par rapport aux projets actuels.
Un autre argument pour cet aménagement est d’offrir une capacité de charge supérieure au bassin actuel, qui selon la commune de Petite-Île est atteinte (selon quelle étude ?). Cela assurerait l’accueil d’un public croissant. Sur le fond, la stratégie est intéressante et sûrement efficace. Or, aucune stratégie pour limiter la croissance de fréquentation du site n’est prévue. Ainsi, quand la commune de Petite-Ile stipule qu’en « agrandissant le bassin et en créant des espaces d’activité en dehors des zones de développement des coraux, le pétitionnaire vise à délocaliser la pression anthropique en dehors des zones d’enjeux et à rediriger / contrôler les usages, tout en assurant la sécurité et le confort des usagers », elle n’apporte aucune proposition pour freiner l’augmentation de la fréquentation à venir. Il semble y avoir une incohérence entre les prérogatives de soutenabilité soulignées par France Stratégie et la stratégie locale d’augmenter l’attractivité d’un site touristique sans objectif de limiter l’augmentation de fréquentation.
Incohérence écologique : Ce projet d’aménagement s’inscrit dans un contexte plus global que le site de Grande Anse, qui sont (i) la dégradation accélérée des récifs coralliens mondiaux (50% des récifs coralliens mondiaux ont déjà disparu) (ii) les prérogatives nationales avec la loi pour la reconquête de la biodiversité et les stratégies nationales biodiversité et aires protégées qui visent une protection de 100% des récifs coralliens en 2025 et (iii) la dégradation aiguë des récifs coralliens de La Réunion (environ 65% de recouvrement par les coraux en 1980 pour environ 20% de recouvrement en 2024). Cette dégradation nous rend plus vulnérables face aux fortes houles et aux cyclones qui vont augmenter en intensité au vu des prévisions météorologiques locales.
Les travaux vont engendrer une destruction physique des colonies coralliennes du bassin. De part et d’autre de la fosse de natation prévue, des platiers coralliens se développent avec des recouvrements coralliens supérieurs à 50%. La commune de Petite-Ile affirme que les travaux d’extension ne viendront pas impacter directement les formations coralliennes. Un suivi en continu de la turbidité des eaux sera mis en place pour éviter les impacts indirects sur les colonies coralliennes. Théoriquement, c’est possible, mais dans la mise en pratique, la complexité vient questionner l’efficacité d’une telle mesure. Puis, comment les colonies seront protégées de la fréquentation croissante du bassin par les différents usagers ? L’élaboration d’un plan de gestion est également prévue. Or, à l’échelle nationale, préfigure déjà la mise en protection de tous les récifs coralliens français d’ici 2025. Enfin, il a été fait mention d’être « précurseurs dans la mise en place d’un protocole de transplantation des coraux afin de compenser l’impact sur certaines colonies ». La transplantation corallienne est une compétence absente du territoire. Qui sera responsable de cette action ? D’autant plus que la thèse de Charlotte Bigard sur la mise en œuvre du concept de la séquence Eviter – Réduire – Compenser, qui affirme que les mesures de compensation en milieu corallien est, en grande majorité, un échec.
À l’heure où la biodiversité réunionnaise s’effondre, à l’heure où notre vulnérabilité face aux changements climatiques est galopante, avons-nous besoin de projets comme celui défendu par la commune de Petite-Île ? Pour donner votre avis, une enquête d’avis public est proposée entre le 08 juillet et le 07 août 2024. À la suite de l’enquête d’avis public, les travaux pourront être initiés avant la fin 2024. Il est donc urgent de se mobiliser pour affirmer à la commune de Petite-Ile que la population locale est contre ce projet qui est en incohérence avec les stratégies de soutenabilité que nous devons prendre. Cette mobilisation doit être aussi massive que possible pour faire face aux différents intérêts économiques du présent projet. À vous de jouer. À nous de jouer !