Revenons sur ce qui a conduit les agriculteurs et leurs tracteurs à manifester dans les rues de Paris. Cette crise est loin d’être la première crise de l’élevage en France. Et contrairement à ce que prétend la FNSEA, ce ne sont pas des pseudo contraintes environnementales qui en sont à l’origine. Rappelez-vous la crise laitière de 2009 qui secouait tout le monde agricole, ou bien encore la crise de la filière volailles en Bretagne.
Le modèle agricole actuel prend en tenaille les agriculteurs et leur marge de manœuvre est extrêmement faible, voire inexistante, notamment lorsqu’il s’agit de négocier les prix de vente de leurs productions. Dans le monde, une poignée de multinationales détient un quasi-monopole pour l’achat, la transformation et la distribution des produits agricoles, alors qu’il y 570 millions d’agriculteurs pour nourrir 7,2 milliards de consommateurs!
Les prix baissent, mais en face de cela, les coûts de production des agriculteurs explosent ! Car l’agriculture industrielle est un modèle coûteux : il engendre une très forte dépendance des agriculteurs aux intrants extérieurs, notamment pour l’alimentation animale. D’où une situation économique catastrophique pour beaucoup d’éleveurs engagés dans ce modèle industriel.
La conclusion de tout cela reste qu’une perfusion de trois milliards d’euros telle que demandée par Xavier Beulin et accordée par le gouvernement ne réglera pas un problème qui dure depuis des années. Ce n’est pas avec quelques rustines pour continuer cette course suicidaire au plus gros volume que l’on sauvera nos éleveurs, ni avec des fermes usines. Et nous faire croire que moins de normes environnementales permettrait de sauver l’élevage, c’est se moquer des gens! Cela fait bien longtemps que Xavier Beulin et la FNSEA savaient que les agriculteurs subiraient aujourd’hui une crise telle que celle des éleveurs laitiers en 2009. Alors pourquoi Xavier Beulin se réveille t-il maintenant ?
Pourtant, l’environnement est une vraie opportunité pour réformer l’agriculture et en particulier l’élevage. Choisir un système à bas niveaux d’intrants (par exemple un cheptel réduit nourri exclusivement à l’herbe), cela revient à baisser ses coûts de production et permet de mieux valoriser ses produits. Il faut avoir une vraie réflexion, afin de refondre le système agricole en profondeur : sortir d’une logique de produire “plus”, pour entrer dans la logique du produire “mieux” (la Confédération Paysanne et l’agronome Marc Dufumier ont d’ailleurs d’excellentes idées pour entrer dans cette logique. D’autant plus que nous consommons à l’heure actuelle trop de viande et de produits laitiers pour que cela puisse être soutenable. Car il ne s’agit pas de travailler uniquement sur notre façon de produire mais également sur notre façon de consommer : en consommer moins et privilégier la qualité.
L’agriculture écologique est la seule à garantir des pratiques agricoles saines et une alimentation de qualité aujourd’hui et pour les générations à venir, en s’appuyant sur les principes de l’agroécologie. Ce sont donc des pratiques durables qui respectent et utilisent l’environnement.
> Lire notre rapport sur les 7 principes clés de l’agriculture écologique
L’agriculture écologique n’est pas seulement bénéfique pour l’environnement, elle est également viable d’un point de vue économique, en plus de respecter les sociétés et les cultures dans lesquelles elle s’inscrit.