Des décharges à ciel ouvert, à même le sol
C’est au début du mois de novembre que nos équipes ont repéré des mares suspectes, non loin de la ville de Neuquen, au nord de la Patagonie, une région qui concentre de nombreuses activités de forage, dont l’exploitation de gaz et de pétrole de schiste de Vaca Muerta. Visiblement issues de l’exploitation d’hydrocarbures, des quantités importantes de déchets ont été déversées à même le sol et à l’air libre, sans aucune protection.
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Une équipe de Greenpeace est parvenue à prélever des échantillons de terre et d’eau à proximité de ces décharges. Nous les avons envoyés dans un laboratoire de l’Université d’Exeter, au Royaume-Uni. Les conclusions des analyses sont sans appel : les prélèvements contiennent de très fortes concentrations d’hydrocarbures ainsi que de métaux lourds hautement toxiques (barium, strontium, cadmium, plomb…), à des niveaux dépassant de loin les normes fixées dans de nombreux pays.
Un ballet de camions en provenance de forages pétroliers
Manifestement en présence de déchets et résidus très nocifs, tant pour la santé humaine que pour la faune et la flore, nous avons surveillé les activités autour de ces décharges, jusqu’à en remonter la piste. Livrés par camion via la société argentine Treater, ces déchets et résidus toxiques proviendraient bien de concessions de compagnies pétrolières de Shell et Total.
La présence de ces déchets, sans aucun traitement ni aucune mesure de confinement, est extrêmement préoccupante et fait craindre une contamination du sol, de l’air et des nappes phréatiques dont dépend la population autochtone des Mapuche. Ces derniers ont donc décidé de déposer une plainte contre cinq compagnies pétrolières qui seraient mises en cause : Total, Exxon, Pan American Energy, Pampa Energia et YPF.
Des opérations illégales
Les déversements opérés pour le compte de Total et de ces compagnies seraient illégaux à au moins deux titres :
- Ces déchets toxiques sont déversés à 5 kilomètres d’habitations, près du village d’Anelo où vivent les Mapuche, alors que la loi argentine impose une distance minimum de 8 kilomètres.
- Les décharges sont creusées à même le sol, sans aucune mesure prise pour isoler les résidus pétroliers de la terre, contrairement aux obligations légales en Argentine.
Un fossé entre discours et pratiques réelles
Comme les représentants de la communauté Mapuche, nous souhaitons que la justice fasse la lumière sur cette affaire et que la responsabilité des géants pétroliers, à commencer par la compagnie française Total, soit clairement établie. Ces activités hautement polluantes, menées en toute illégalité, démontrent une fois de plus le gouffre entre les discours et engagements des dirigeants de Total sur le papier ou sous les projecteurs et les pratiques réelles du groupe dans l’ombre, au détriment de communautés isolées et vulnérables.
Le PDG de Total, Patrick Pouyanné, n’a de cesse de marteler que son entreprise agit dans le respect des lois et des « meilleurs standards de sécurité et d’environnement ». Force est de constater que ce ne sont là que des beaux discours.
En dépit des promesses et des pseudo-garanties, les activités pétrolières non conventionnelles, que ce soit l’exploitation de gaz et pétrole de schiste (comme à Vaca Muerta), les sables bitumineux ou les forages en eaux très profondes (comme ceux envisagés à proximité du Récif de l’Amazone au Brésil ou en Guyane), représentent encore et toujours des menaces considérables pour l’environnement et doivent être abandonnées une fois pour toutes.