Paris, 17 octobre 2008 – Les mesures envisagées aujourd’hui par la Commission européenne pour lutter contre la déforestation ne constituent pas une réponse à la hauteur de l’urgence climatique et de la crise que subit la biodiversité mondiale. Si le but de l’Union européenne (UE) est réellement de protéger les forêts pour lutter contre les changements climatiques, le Parlement et le Conseil européen devront nécessairement faire preuve de bien plus d’ambition pour réduire la déforestation qui est responsable de 20% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
La Commission européenne vient de présenter le « Paquet forêt » qui comprend :
– une proposition de réglementation européenne sur le bois dont l’ambition est de lutter contre le commerce illégal de bois, un des moteurs de la déforestation.
– une communication sur les mesures européennes visant à limiter la déforestation et son impact sur les changements climatiques et la biodiversité.
« Le Paquet forêt présenté par la Commission européenne, contrairement à ses ambitions initiales, ne permet pas de lutter contre les changements climatiques et d’enrayer l’extinction des espèces. Rien ne permettra d’interdire l’entrée du bois illégal en Europe ni de contribuer de manière efficace à la protection des forêts. Il est donc de la responsabilité du Parlement et du Conseil européen de se montrer exigeants et exemplaires afin que l’Europe se donne effectivement les moyens de lutter contre la déforestation, affirme Grégoire Lejonc, chargé de campagne Forêts à Greenpeace France. Le prix de l’inaction en matière de déforestation coûte à l’économie mondiale entre 2000 et 5000 milliards d’euros par an, soit plus que les pertes accusées par Wall Street depuis le début de la crise financière actuelle », rappelle-t-il (1).
Face aux faiblesses et aux lacunes de la proposition de réglementation sur le bois, le Parlement européen et le Conseil européen – les deux instances qui ont maintenant le pouvoir d’amender le texte – doivent donc s’assurer que la future réglementation :
– Impose aux opérateurs du secteur de prouver la légalité du bois qu’ils mettent sur le marché européen.
– Impose la mise en place d’un système de traçabilité complet afin que le bois vendu dans l’UE respecte des critères de production stricts d’un point de vue environnemental et social.
– Mette en place des structures chargées de détecter les infractions, d’enquêter et de poursuivre les contrevenants à la future réglementation.
La Commission préconise aussi la création d’un fonds multilatéral pour la protection des forêts sous l’égide de la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC). Mais tout en estimant que 20 milliards d’euros sont nécessaires pour diminuer de moitié la déforestation en 2020, son schéma de financement n’inclut qu’une fraction du montant requis. « L’Union européenne doit mobiliser plus de ressources financières et mener les négociations climatiques mondiales en proposant la création d’un fonds global pour la protection de la forêt basé sur un mécanisme de financement permanent », conclut Grégoire Lejonc.
En tant que présidente du Conseil européen, la France emmènera la délégation européenne aux négociations climatiques à Poznan en décembre prochain. « La Commission européenne a exprimé son scepticisme vis-à-vis de l’inclusion des forêts dans le marché carbone et il faut absolument que la France porte haut et fort ces recommandations au niveau international », précise Grégoire Lejonc. « Le gouvernement français a fait de la lutte contre les changements climatiques et de la lutte contre la déforestation une priorité. L’heure des déclarations politiques est passée, la France va maintenant être jugée sur ses positions et cela commence dès lundi prochain au Conseil européen des ministres de l’environnement».
(1) Chiffres annoncés par l’économiste Pavan Shudkev dans The Economics of Ecosytems and Biodiversity, 2008.