Quelle est la position de Greenpeace sur les chemtrails ?
La théorie des chemtrails
Greenpeace est régulièrement interpellée par ses sympathisants au sujet des chemtrails. Les chemtrails seraient des traces visibles dans le ciel, laissées par le passage d’avions, et que certains considéreraient comme de l’épandage de produits chimiques et biologiques effectué dans le cadre d’opérations secrètes aux motivations diverses.
Les lignes blanches visibles à la traîne des avions sont un phénomène bien connu, et largement documenté, appelé « contrails » pour traînées de condensation. Les traînées sont constituées en grande partie de vapeur d’eau (mais aussi de carbone et autres résidus issus de la combustion du carburant dans les moteurs d’avion) condensée en raison de la différence de température créée par la différence de pression entre les surfaces supérieures et inférieures des ailes, des extrémités des ailes ou des moteurs. Les micro-différences des conditions atmosphériques expliquent également largement les différences observées entre chaque type de traînée, leur persistance, ou leur existence.
Les observations conduisant au sentiment d’une augmentation du nombre de traînées sont expliquées également par l’augmentation du trafic aérien. Sur la période 2013-2018, le trafic mondial, en passager/s-kilomètres, a augmenté en moyenne de 6,8% par an, soit un doublement tous les 10 ans à ce rythme. La France n’échappe pas à cette tendance : le trafic français a crû de 4,1% par an sur la même période et a été multiplié par presque 5 depuis 1980. Cette croissance sans limite du trafic aérien pose d’ailleurs de nombreux problèmes pour le climat à cause des émissions de CO2, mais aussi (et c’est moins connu) de ces fameuses traînées de condensation en altitude, qui aggravent le réchauffement climatique. C’est pour cette raison que Greenpeace œuvre à la réduction du trafic aérien et au développement des voyages écologiques.
Concernant le fait que ces traînées serviraient à épandre des produits chimiques, Greenpeace, comme pour tous les sujets qu’elle aborde, exige une base de données fiable avant de faire campagne sur la question spécifique des chemtrails. Notre équipe scientifique indépendante n’a, à ce jour, connaissance d’aucune preuve à l’appui de la théorie des chemtrails. Les photos, vidéos et liens vers des sites web qui nous sont communiqués fréquemment depuis plusieurs années ne constituent pas à nos yeux de preuves suffisantes pour justifier l’ouverture d’une enquête approfondie.
Afin d’envisager des recherches, nous aurions besoin de déclarations claires de la part d’experts tels que des chercheurs en physique de l’atmosphère, en mécanique des fluides ou en génie aéronautique ou encore des experts de l’industrie aéronautique, expliquant comment ils auraient déterminé que les traînées en questions sont des chemtrails. Aucun des documents qui nous sont parvenus à ce jour ne remplissent ces conditions scientifiques.
Les projets qui peuvent prêter à confusion
L’ensemencement de nuages
Émettre de l’iodure d’argent dans les nuages condense la vapeur d’eau contenue dans ces nuages autour de l’iodure d’argent, la convertissant en précipitation. Ce procédé peut être utilisé pour encourager la pluie, en ensemençant les nuages sur un site qui a besoin d’eau, pour décourager la pluie en ensemençant les nuages avant qu’ils n’atteignent un site où l’on préfère un temps sec, ou pour agir sur les tempêtes de grêle, comme en Alberta où, afin de réduire les dommages causés par la grêle, les gouvernements et les compagnies d’assurances ont parrainé des projets d’ensemencement de nuages visant à diminuer la taille et la dureté des grêlons.
Les Jeux olympiques de Pékin sont l’exemple le plus célèbre de l’ensemencement de nuages, où le procédé a été utilisé pour empêcher la pluie de tomber sur les sites olympiques. Ce processus est effectué par des roquettes, comme à Pékin, ou des avions légers, et non par des avions de lignes commerciales. Il est à noter que ce procédé reste très marginalement utilisé.
La géo-ingénierie
La géo-ingénierie est le nom donné aux sciences et techniques qui viseraient à modifier délibérément le climat de la planète. Actuellement, si de tels projets existent, ils demeurent presque entièrement théoriques. Toutes les techniques de géo-ingénierie sont considérées comme potentiellement dangereuses, car elles ne peuvent fonctionner qu’en ayant un très large impact sur le fonctionnement de notre atmosphère ou de nos océans, avec les risques tout aussi larges que cela implique. Parmi les nombreuses techniques proposées, certaines pourraient inclure des avions émettant des substances servant à bloquer la lumière du soleil avant que celle-ci n’atteigne le sol.
Le projet HAARP
Le projet HAARP pour High-frequency Active Auroral Research Program est un programme de recherche scientifique sur la ionosphère mené par diverses parties liées aux armées américaine et du Royaume-Uni. Il a été fermé en 2013, puis transféré en 2015 sous l’autorité civile de l’Université d’Alaska. Ça aurait pu devenir un sujet d’inquiétude, mais le projet ne semble pas avoir fait usage d’un grand nombre d’avions, et surtout, n’a pas reçu le niveau de financement qui aurait été nécessaire à une opération d’envergure à l’échelle des allégations que l’on peut lire au sujet des chemtrails.
L’impact sur le climat des traînées blanches
L’aviation participe au réchauffement climatique en raison des émissions de CO2 liées à la combustion du kérosène, mais aussi des traînées blanches que l’on observe dans le ciel.
Ces traînées de condensation forment une fine couche nuageuse à haute altitude (on parle alors de “cirrus”), qui persiste durant plusieurs heures. Or les cirrus bloquent une partie du rayonnement qui vient de la Terre, ce qui a pour effet d’augmenter la température terrestre. Cette pollution « hors CO2 » est souvent « oubliée » par les compagnies aériennes dans le calcul de l’empreinte climatique de leurs vols. Elle est pourtant très importante ! Au niveau global, une étude scientifique publiée en 2021 estime que pour obtenir la contribution historique réelle du secteur aérien au réchauffement climatique, il faudrait multiplier par un facteur 3 les seules émissions de CO2.
Greenpeace demande aux responsables politiques de mettre fin à la croissance du trafic aérien, en arrêtant (notamment) de subventionner ce secteur polluant et en imposant une régulation environnementale de son activité. Nous invitons également les personnes qui s’envolent souvent pour leurs loisirs à réduire leur usage de l’avion. Nous avons d’ailleurs édité un guide de voyage avec 41 destinations accessibles sans avion, en France et en Europe.
Le laboratoire de recherche de Greenpeace
Notre opposition au nucléaire ou aux OGM, par exemple, conduit certains de nos détracteurs à nous accuser d’être « anti-scientifiques ». C’est loin d’être le cas ! La recherche scientifique est cruciale dans le domaine de la protection de l’environnement, que ce soit pour dénoncer les menaces environnementales ou pour développer des solutions nécessaires à un changement de paradigme.
Greenpeace a donc mis en place dès 1987 un laboratoire de recherche indépendant, actuellement basé à l’Université d’Exeter, au Royaume-Uni. Le laboratoire, dirigé par Paul Johnston, réalise de nombreuses recherches dans le cadre des campagnes menées par Greenpeace sur les quatre coins de la planète. Les spécialités des chercheurs membres du laboratoire couvrent de nombreux domaines tels que la toxicologie, la chimie organique et inorganique, la biochimie et l’écologie marine et terrestre.
Vous pouvez suivre leurs dernières actualités sur leur fil Twitter, et en savoir plus sur leur site internet (en anglais).