Le gestionnaire de réseau RTE, détenu majoritairement par EDF, a annoncé mercredi 8 octobre matin, dans son bilan prévisionnel, que la réduction de la part du nucléaire à 50 % d’ici à 2025 impliquerait le recours à plus de centrales à gaz et à charbon et une hausse des émissions de gaz à effet de serre. Une estimation fausse, comme le montrent plusieurs scénarios de transition, comme ceux réalisés par Greenpeace, l’ADEME, ou encore de Négawatt. Dans la foulée de cette publication, Nicolas Hulot annonçait réfléchir à reporter l’échéance de 2025, détricotant l’objectif emblématique de la loi sur la transition énergétique.
Nucléaire en France : la situation est plus que critique
Après les déclarations de Nicolas Hulot et les nombreux commentaires qu’elles ont suscités, il semble important de faire quelques rappels.
L’état du parc nucléaire français est désastreux. En France, 37 réacteurs sur 58 sont touchés par des problèmes d’anomalies. Par ailleurs, en raison de nombreuses défaillances, ce sont aujourd’hui 21 réacteurs sur 58 qui sont à l’arrêt.
Le risque d’accident nucléaire en France n’a peut-être jamais été aussi important en 40 ans. En France, ces 58 réacteurs possèdent tous une piscine d’entreposage du combustible nucléaire usé qui sont extrêmement mal protégées face au risque d’attaques extérieures et constituent une véritable menace pour des millions de Français et d’Européens.
La situation financière d’EDF est catastrophique. Le géant français de l’électricité, qui est aussi l’exploitant des 58 réacteurs présents sur notre territoire, est un colosse aux pieds d’argile. Avec une dette brute de 75 milliards d’euros, les finances de l’entreprise sont plombées par le nucléaire, il n’a plus les moyens d’investir dans la maintenance des centrales nucléaires et dans la poursuite de son programme industriel.
Même lorsque EDF veut investir dans la maintenance de ses réacteurs, cela conduit à des incidents très sérieux en matière de sûreté, comme celui qui a touché la centrale de Paluel jeudi 9 novembre,lié à un problème de corrosion de certains équipements. Ce problème de rouille qui concerne la moitié des réacteurs du parc nucléaire français est emblématique de la situation.
Urgence numéro 1 : une trajectoire claire de fermeture de réacteurs
Le temps presse. La plupart des réacteurs vont arriver au bout de la durée d’exploitation qui était prévue quand ils ont été construits : l’âge fatidique des 40 ans pose une question très claire : doit-on réinvestir ou non dans notre parc nucléaire ?
Ce qui est certain, c’est qu’il ne sera pas possible de garder ces réacteurs en fonctionnement bien longtemps. De Nicolas Hulot, nous attendons une décision qui doit être prise maintenant, un trajectoire précise assortie d’un calendrier clair pour la fermeture des réacteurs ainsi que des mesures d’accompagnement pour les travailleurs du nucléaire. Pas qu’il repousse la gestion du problème aux calendes grecques.
Rappelons que le point de départ de la volonté de réduire la part du nucléaire en France remonte à la catastrophe nucléaire de Fukushima, en 2011. C’est bien depuis cette date qu’une prise de conscience massive a eu lieu sur la vulnérabilité des réacteurs nucléaires tels que nous les connaissons en France.
La décision politique de repousser l’objectif de 50% d’électricité d’origine nucléaire ne résistera pas à l’épreuve des faits : Nicolas Hulot doit s’emparer de cette urgence.
Le nucléaire n’est pas la solution
Avec 21 réacteurs nucléaires à l’arrêt sur les 58 que compte le parc nucléaire français, comment peut-on prétendre que le nucléaire puisse encore répondre aux besoins énergétiques français ?
Le problème de la transition énergétique française ne doit pas être pris à l’envers : il ne sert à rien de persister dans l’impasse nucléaire en prétendant attendre que les énergies renouvelables soient prêtes à prendre la relève. Prêtes, elles le sont déjà. Mais tant que le nucléaire prendra toute la place — sur le réseau électrique, dans les budgets publics, dans la politique énergétique — les énergies renouvelables ne pourront pas se développer rapidement et massivement.
Quant au fait de poser le débat de la transition énergétique en opposant nucléaire et charbon : cela n’a aucun sens. Annoncer un recul sur le nucléaire en pleine COP23 et le faire en invoquant le combat pour le climat relèverait presque d’une manipulation finement orchestrée.
Ainsi, le 8 novembre 2017, RTE, filiale d’EDF, a agité le chiffon rouge des émissions de gaz à effet de serre en conditionnant leur diminution au maintien de la part prépondérante du nucléaire dans le mix électrique français.
Mais c’est justement les défaillances du nucléaire, avec l’accumulation des dégradations sur les réacteurs et la mise à l’arrêt fréquente et subie de nombreuses unités, qui contraignent la France à consommer de l’électricité produite par le charbon, et qui l’obligent aussi à en importer, notamment en provenance d’Allemagne.
La seule solution à la crise climatique, c’est de passer à un système 100% renouvelable et économe en énergie et en électricité. Même EDF le reconnaît désormais : le nucléaire est moins compétitif que les énergies renouvelables. Il est temps de dire stop aux fausses solutions pour le climat.