Ce que Greenpeace propose
L’année 2015 a été marquée par des records de chaleur et par le franchissement d’un nouveau seuil : une hausse des températures de 1° C au dessus des températures mondiale par rapport à l’ère pré-industrielle. Dans certaines régions du globe, comme les eaux de l’Arctique, cette zone a même atteint 2,8° C, accélérant ainsi la fonte des glaciers.
D’ici la fin du siècle, la température moyenne du globe pourrait augmenter de 4 à 7 °C par rapport au début de l’ère industrielle, si nous restons sur la trajectoire actuelle. Les conséquences de ce réchauffement seraient dramatiques pour les populations : sécheresses, famines, guerres, exodes… C’est pourquoi Greenpeace se mobilise.
Le seuil de 1,5 °C
Il est impératif de limiter l’augmentation des températures à 1,5 °C. Pour atteindre cet objectif crucial, il faut, d’ici à la moitié du siècle, nous devons ramener à zéro nos émissions de dioxyde de carbone et réduire l’ensemble de nos émissions de gaz à effet de serre d’environ 70 % (par rapport à 2010).
L’Accord de Paris a engagé les pays à limiter le réchauffement climatique bien en dessous de 2 °C et à poursuivre les efforts pour ne pas dépasser 1,5 °C . C’est bel et bien ce cap de 1,5 °C que nous devons avoir en tête pour juger les actions des gouvernements et d’autres acteurs.
Réduire les émissions : un cap commun
Pour parvenir à atteindre l’objectif de 1,5 °C, nous devons sortir des énergies fossiles d’ici 20 ans. Cet objectif implique de faire des changements significatifs dans les pays et les régions qui sont les plus émetteurs, qui ont les réseaux énergétiques les plus importants et qui sont les principaux producteurs et consommateurs d’énergies fossiles.
Aujourd’hui, la Chine, les États-Unis, l’Union européenne et l’Inde sont les plus importants émetteurs de gaz à effet de serre et de dioxyde de carbone : à eux seuls, ils représentent environ 60 % de ces émissions.
Si les pays industrialisés doivent montrer le chemin en matière de lutte contre les changements climatiques (et réduire d’au moins 40 % leurs émissions de gaz à effet de serre par rapport aux niveaux de 1990), il faut aussi rappeler l’importance de certains pays en développement qui sont aujourd’hui de grands émetteurs de gaz à effet de serre (Chine, l’Inde ou le Brésil).
Il est cependant bien évident que leur responsabilité dans les dérèglements actuels est difficilement comparable à celle des pays industrialisés qui sont, en raison de leur mode de développement, à l’origine des trois quarts des émissions de CO2 depuis 1850. Car si les pays « développés » représentent seulement un cinquième de la population mondiale, ils continuent d’émettre la moitié des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Les États-Unis émettent par exemple 17 tonnes de carbone par habitant et par an, quand un pays comme le Bangladesh n’en émet que 0,4.
Les COP ou négociations internationales sur le climat
Face à la dégradation visible du climat et aux messages d’alerte des scientifiques, la communauté internationale s’est saisie du sujet et a commencé à organiser des conférences internationales de plus en plus suivies dans le monde entier.
Après Rio (1992), Kyoto (1997), Copenhague (2009 ), rien n’était finalement sorti des négociations, sinon qu’il fallait limiter les émissions de gaz à effet de serre – constat minimal, mais sans engagement fort, mise à part la création d’un fonds vert censé financer l’adaptation des pays du Sud. Ces négociations internationales, dominées par des intérêts géopolitiques ou politiciens, portent en elles le germe de l’immobilisme.
C’est pourtant le seul cadre international où la question climatique est discutée et débattue dans l’optique de trouver un accord commun. Si nous restons lucides sur les limites de ce genre d’opération, il est néanmoins important de s’y investir et d’agir pour inverser les rapports de force qui les dominent. Il faut y défendre les revendications de la société civile pour empêcher les décideurs de s’entendre sans se préoccuper des citoyens.
La COP21 : ni un désastre, ni un succès
C’est comme ça que l’Accord de Paris signé en 2015 constitue un petit pas en avant nécessaire mais certainement pas suffisant. Il ne mentionne ni les énergies fossiles, ni les transports aériens et maritimes (au moins 10 % des émissions mondiales).
De plus, au lieu de mentionner clairement le cap du 100% d’énergies renouvelables, l’Accord de Paris utilise les expressions floues d’économies bas-carbone (low-carbon economies), de neutralité climatique (climate neutrality) ou d’autres termes aux contours peu clairs.
Pour finir, l’Accord de Paris ne se prononce pas sur la question des technologies permettant d’atteindre les objectifs qu’il fixe en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ainsi, il n’écarte pas les fausses solutions, comme le nucléaire, les mécanismes de stockage de carbone et la géo-ingénierie.
Il est très faiblement contraignant et ne propose pas d’aller plus loin que les contributions nationales actuelles de chaque pays (INDC) en matière de réduction des émissions, ce qui nous mettrait sur une trajectoire de 3 °C supplémentaires d’ici la fin du siècle – alors qu’il préconise par ailleurs de limiter la hausse à 1,5 °C.
En outre, si la COP21 a été l’occasion de faire émerger puis rayonner plus largement l’objectif de parvenir à 100 % d’énergies renouvelables en 2050, il n’a pour autant pas été mentionné dans le texte de l’accord.
Malgré ses nombreux points faibles, cet accord, accepté par 195 parties et l’Union européenne, constitue un signal géopolitique important. Il contient la volonté des États de lutter de concert contre le dérèglement climatique – un fait relativement nouveau et pour le moins encourageant.
De plus, les États Unis, la Chine, l’Inde et l’UE ont ratifié le texte. C’est un signe fort et encourageant qui doit être suivi de faits concrets et d’actions rapides. Ce n’est pas parce que des délégations internationales se sont mises d’accord sur un texte général que tout est résolu. Il faut continuer d’agir concrètement au niveau local, régional, national et international.
Concrètement, que fait-on pour le climat ?
On ne sauvera pas le climat sans changer de modèle énergétique. Une seule solution : passer aux 100 % d’énergies renouvelables d’ici à 2050. Les progrès technologiques le permettent désormais. Les énergies renouvelables sont mêmes devenues ces dernières années plus compétitives que l’énergie nucléaire, et leur coût ne cesse de baisser.
La mobilisation des collectivités locales sera un enjeu clé pour cette transition : 70 % des leviers d’action pour réduire les émissions de CO2 se situent aux échelles territoriales. C’est bien en agissant concrètement localement que l’on contribue à l’effort global du défi climatique.
Il faut ajouter que les énergies renouvelables représentent un réel gisement d’emplois ainsi que des ressources financières nouvelles pour les territoires. Aujourd’hui, le marché des énergies renouvelables est plus dynamique que jamais.
Malheureusement, en France, nous sommes encore largement à la traîne. Bien que les représentants et décideurs disent mettre le pied sur l’accélérateur, la France reste en 2016 la bonne dernière de la classe en Europe pour atteindre son objectif pour 2020.
Si des mesures ont été adoptées en matière de renouvelables, en particulier pour relancer les filières photovoltaïques et éoliennes, rien n’est entrepris pour réduire le parc nucléaire. Le verrou politique, culturel et idéologique du nucléaire demeure. Un investissement public massif est pourtant nécessaire. Il y a urgence.
Plusieurs scénarios d’experts indépendants affirment aujourd’hui que cette transition est largement réalisable, notamment la très récente étude de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME). Il ne manque plus qu’un peu de volonté politique. À la société civile mobilisée de la faire naître.
Sauver le climat c’est aussi soutenir les pays en développement
Deux objectifs essentiels doivent être atteints :
- Aider ces pays à faire face aux conséquences des dérèglements climatiques
Nous sommes dans une situation d’« injustice climatique ». En effet : ce sont les pays du Nord qui sont historiquement responsables des dérèglements climatiques actuels, mais ce sont les pays du Sud qui sont les plus touchés par ces dérèglements. Il est donc indispensable que les pays industrialisés s’engagent à soutenir les pays vulnérables, notamment en mobilisant des financements publics pour l’adaptation. Le soutien de 100 milliards de dollars par an avec un plancher à partir de 2020 revu à la hausse en 2025 qui a été décidé durant la COP21 est un signe positif, même si la nature de ces financements reste problématique.
- Accompagner ces pays vers un autre modèle de société
Si les nations industrialisées réduisent leurs émissions de gaz à effet de serre, ce n’est pas pour que les pays du Sud augmentent les leurs. Il ne faudrait pas que ces pays en développement répètent les erreurs commises depuis la révolution industrielle par les pays industrialisés. Ils doivent développer des solutions énergétiques propres. Pour cela, il faut les aider à mettre en place des programmes d’efficacité énergétique et d’énergies renouvelables (sans que le nucléaire soit une option).
Relever le défi climatique, c’est aussi lutter contre la déforestation
Le rôle clé des forêts dans l’atténuation des changements climatiques et dans l’adaptation à leurs conséquences doit être reconnu. Cela signifie porter un coup d’arrêt définitif à la déforestation donc faire vivre l’engagement pris par les États en septembre 2015, dans le cadre des Objectifs de développement durable, de mettre un terme à la déforestation et de restaurer les forêts dégradées d’ici à 2020. L’enjeu de protection des droits des populations indigènes et des communautés locales est également fondamental.