Pour Greenpeace, la paix, le pacifisme sont les meilleurs moyens de défense. Et la guerre est la pire menace faite à notre environnement. Cet article est un appel à la paix, il a été écrit par Daisuke Miyachi, de Greenpeace Japon. Daisuke vient d’Hiroshima et sa grand-mère est l’une des survivantes du bombardement du 6 août 1945.
La bombe atomique a été larguée sur Hiroshima à 8h15 le matin du 6 août 1945.
Soixante neuf années se sont écoulées…
La bombe est synonyme de la fureur destructrice du feu thermonucléaire, elle a indistinctement tout détruit dans un rayon de trois kilomètres. Les retombées radioactives de grande envergure de la bombe ont également laissé des cicatrices implacables, impitoyables sur les gens et l’environnement d’Hiroshima et des zones alentours.
Pour la génération actuelle de citoyens japonais, et du monde, le nom de la ville est devenu synonyme du mal engendré par la guerre.
Entré en vigueur en 1947, après la Seconde Guerre mondiale, l’article 9 de la Constitution nationale du Japon renonce à la guerre et à l’usage de la force comme moyen de régler les différends internationaux. Cet article 9 signifiait que le Japon pouvait profiter d’une forme rare de paix et de prospérité, enviée par le monde entier. Au Japon, cet article est désigné comme la « Constitution de paix« , et a été un emblème de la stabilité et de la stature internationale du Japon. Mais, en Juillet 2014, le gouvernement japonais a approuvé une réinterprétation de l’article 9 qui a donné plus de pouvoir à ses forces de défense et qui leur permet d’user du « droit de légitime défense collective » pour participer aux conflits des nations alliées sous le prétexte de la « défense des alliés. »
En marchant dans les rues de Hiroshima, on croise encore les cicatrices de la bombe atomique. Bâtiments brûlés, décombres préservés et monuments sont comme un rappel constant de l’inutilité horrible des tragédies en temps de guerre.
Ma grand-mère est une Hibakusha, l’une des survivantes du bombardement, elle a été exposée aux radiations. La population d’Hiroshima était d’environ 350 000 âmes lorsque la bombe atomique a été lâchée. Fin décembre 1945, ils étaient environ 140 000. Au mois d’août 2013, le nombre total d’Hibakusha disparus suite au bombardement était de 286 818.
Ma grand-mère ne parle que très rarement de son expérience. C’est un moyen, je pense, de préserver sa tranquillité d’esprit, dans une solitude silencieuse. Je me rappellerai toujours ce jour où elle a brisé le silence. Ses mots furent simples, et forts, comme si elle les avait conservés enfouis dans un profond puits de tristesse :
« Tout s’est effondré. Toute créature vivante a péri. Nous ne devrions plus jamais reproduire une si terrible erreur »
Ses mots résonnent encore dans mon esprit, comme un symbole de la cruauté de la guerre et de l’importance de la paix.
Les victimes d’Hiroshima étaient des gens comme vous et moi. Des pères, des mères, des grands-pères et des grands-mères, des enfants et des petits-enfants. Tant de familles ont été détruites, disparues pour l’éternité.
Il y avait 41 638 enfants recensés à Hiroshima en mai 1945. 25 826 d’entre eux ont été évacués dans des lieux plus sûrs, dans des zones rurales ou des villages isolés. 15 802 sont restés avec leurs famille à Hiroshima, notamment ceux qui avaient besoin de soins médicaux ou qui étaient encore à l’école élémentaire. De nombreux enfants ont été sévèrement touchés par la bombe A.
Le garçon sur la photo est Hideaki Suzuki, souriant aux côtés de son bien aimé chien « Kuma » (« ours » en japonais). Hideaki avait douze ans quand la bombe a frappé sa ville natale. Il était à l’école à ce moment là et a été exposé à des radiations de haut niveau. Il a essayé de courir tout en portant sa jeune sœur qui avait été brûlée par les incendies, mais ils se sont perdus dans le chaos. Hideaki est mort sept jours plus tard des suites de son exposition aux radiations.
Les enfants qui ont été évacués vers les zones rurales ont survécu à la guerre, mais ont eux aussi énormément souffert. Beaucoup ont perdu leurs familles et n’ayant plus personne pour prendre soin d’eux, ils sont devenus les « orphelins de la bombe« . Le nombre d’orphelins a été estimé à plus de 6 500 dans la ville de Hiroshima seule.
La férocité des dommages n’a laissé aucune famille intacte dans la région.
La bombe atomique a tout balayé dans sa fureur destructrice. Personne – grand ou petit – n’a pu échapper à sa force. De nombreux animaux de compagnie ont également péri. Le célèbre dessinateur, Keiji Nakazawa, a perdu son chien « Kuro » (« Black » en japonais). Auteur de l’un des mangas les plus populaires au Japon « Barefoot Gen », il a écrit: « Kuro était un membre de notre famille, nous l’avons trouvé dans l’abri anti-aérien près de notre maison mais il était sans vie. Nous étions si tristes d’imaginer que Kuro a désespérément essayé d’être avec nous, mais qu’il est mort seul. La bombe A a détruit toutes sortes de vie, y compris de petite vie comme celle de Kuro. »
On se demande souvent comment la paix devrait être. Actuellement, les politiciens du monde entier sont très prolixes pour justifier les usages qu’ils font des forces armées au nom de ce qu’ils appellent « la paix dans le monde ».
Pourtant, la guerre ne peut jamais, en aucun cas, être justifiée.
Les pertes humaines de la Seconde Guerre mondiale ont été estimées à soixante-cinq millions de personnes, dont quarante millions de civils. À la toute fin du conflit, les bombardements de Hiroshima et de Nagasaki ont massacré des milliers de civils innocents et provoqué d’innombrables et irréversibles souffrances chez les rescapés. C’est ça la vraie nature de la guerre et les effets néfastes des radiations.
Le Japon était affranchi du nucléaire depuis septembre dernier parce que l’unique réacteur nucléaire en service avait été arrêté pour maintenance le 16 septembre 2013. Et les autres centrales étaient restées fermées non seulement pour subir des tests de sûreté mais aussi grâce à la forte opposition citoyenne suite à la catastrophe de Fukushima. Nous attendons avec impatience le jour où le Japon sera définitivement débarrassé du nucléaire. C’est un héritage dont nous pourrons être fier. C’est une histoire que les générations futures pourront raconter, les larmes aux yeux. Mais pas des larmes de tristesse à cause de la guerre ou des catastrophes, des larmes de joie et d’espoir pour l’humanité.
« Repose en paix car la tragédie ne sera pas répétée »
Ces mots, sur le Cénotaphe du parc de la Paix de Hiroshima, ne devraient jamais être oubliés et devraient restés gravés dans nos mémoire comme une mise en garde essentielle. Personne n’est immunisé aux ravages de la guerre. Aussi longtemps qu’il y aura des armes nucléaires dans le monde, aucun d’entre nous ne sera à l’abri. Les mots de ma grand-mère résonnent toujours et encore dans mon esprit : « Nous ne devrions plus jamais reproduire une si terrible erreur« .
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L’auteur de cet article, Daisuke Miyachi, est coordinateur action et mobilisation à Greenpeace Japon.
Peu de temps après le début de la catastrophe nucléaire de la centrale de Fukushima Diichi, il a fait partie de l’équipe d’experts en radiation de Greenpeace qui est partie contrôler les taux de radiations à Fukushima.
L’article original en japonais peut être lu ici : http://www.greenpeace.org/japan/ja/news/blog/staff/blog/49223/
Note: Merci de noter que les photos illustrant cet articles sont des images qui appartiennent personnellement à l’auteur. Merci donc de ne pas de les réutiliser.