De la Convention citoyenne à la loi climat : le mépris comme ligne de conduite
Emmanuel Macron et le climat, c’est avant tout une histoire de mépris. Emmanuel Macron a demandé à la Convention citoyenne des mesures pour réduire les émissions carbone de la France de 40% d’ici 2030. “En même temps”, il exprimait son souhait de voir l’Europe viser -55%. On est bien loin de ce qu’impose l’emballement climatique. La science préconise en effet une réduction de 65% pour contenir le réchauffement climatique sous 1,5°C, et donc conserver une planète viable pour les espèces et les écosystèmes.
Du mépris, Emmanuel Macron et son gouvernement en ont également montré pour la démocratie : alors que le président a promis de reprendre “sans filtre” les 149 mesures de la Convention citoyenne, 90% d’entre elles ont été enterrées. Mais ce n’est pas tout : la loi Climat, depuis sa rédaction jusqu’à sa lecture à l’Assemblée nationale, n’a été qu’une succession de coups portés au débat démocratique. Ainsi, 20 à 25% des 7000 amendements déposés ont été jugés irrecevables, et les débats ont été tout simplement bridés, avec une procédure accélérée et un temps législatif programmé.
En bref, les député‧es de l’opposition ont à peine pu défendre les amendements qui auraient permis de rehausser l’ambition de la loi. Côté rue, ce n’est pas mieux : alors que plus de 110 000 personnes ont rejoint la Marche climat du 28 mars partout en France, le droit de manifester a été entravé à partir du 7 pour museler toute tentative de faire entendre la voix de la société civile.
Loi Climat et résilience : quelles avancées significatives ?
En dehors d’un article de loi sur les menus végétariens, pour le reste, on cherche encore.. et pour continuer de rire – jaune, délivrons une mention spéciale au gouvernement pour sa courageuse : en 2022, il sera interdit de faire voler un avion publicitaire (ces petits avions qui font parfois du bruit au dessus des plages). Le réchauffement climatique n’a qu’à bien se tenir !
Loi Climat et résilience : ce que contiennent les mesures votées
En une phrase : cette loi aurait pu paraître ambitieuse… il y a 15 ou 20 ans. Mais face au climat qui s’emballe, elle est en total décalage. La preuve :
- Aérien : l’interdiction des vols intérieurs lorsqu’une alternative de moins de 2h30 en train est possible ne concerne au mieux qu’une poignée de vols, et donc une baisse infime des émissions du secteur.
- Extension d’aéroport : l’article voté est inopérant pour interdire les projets d’extension d’aéroports… alors que c’est ce qu’il prétend faire !
- Publicités pour les produits polluants : l’interdiction réclamée par la CCC a été transformée en simple interdiction de publicité pour la vente, la commercialisation et la promotion des énergies fossiles… quasi-inexistante !
- Grandes entreprises : les amendements pour encadrer leurs émissions carbone ont été déclarés irrecevables, alors que le projet de loi vise “la transition de nos modèles de production afin qu’ils soient décarbonés […] en renforçant l’encadrement des activités industrielles” !
- Rénovation thermique des logements : seuls 2 des 5 millions de logements passoires sont concernés par l’interdiction de location progressive d’ici 2028. Pire, pour obliger leurs propriétaires à rénover leur bien, les locataires en situation de précarité devront saisir la justice.
- Seul point positif : le menu végétarien hebdomadaire est entériné pour les cantines scolaires publiques et privées. Une option végétarienne quotidienne est rendue obligatoire en 2023 pour la restauration collective sous la responsabilité de l’Etat et seulement dans les lieux où il existe déjà plusieurs choix de repas possibles… Mais cela ne s’applique pas aux lycées et collèges, où les élèves ne pourront accéder à des options végétariennes que lorsque leurs gestionnaires le décideront !
- Délit d’écocide : un leurre. Le gouvernement a veillé à rassurer les industriels et les acteurs étatiques. Les délits retenus, qui vont dépendre de l’action de l’Administration, seront impraticables pour que la société civile puisse s’en emparer efficacement.
Loi Climat et résilience : ce que vous ne verrez pas
Terminons par toutes ces mesures portées par la société civile, et écartées par le gouvernement, puis par les député·es de la majorité :
- Interdiction des publicités pour les produits les plus polluants
- Interdiction de la commercialisation des véhicules les plus polluants dès 2025
- Rehausse de l’objectif de réduction des émissions de CO2 françaises à -55% en 2030 (comme l’UE)
- Fin des vols intérieurs quand existe une alternative en train en moins de 4h
- Moratoire sur les extensions et nouveaux aéroports
- Hausse de l’écotaxe sur les billets d’avion
- Taxation du kérosène
- Redevance sur les engrais azotés
- Interdiction des dividendes climaticides
- Objectifs de réduction des émissions de CO2 pour les multinationales
- Mise en place d’un ISF climatique
- Obligation progressive de rénovation globale et performante des logements
- Éradication des passoires thermiques
- Reste à charge zéro pour la rénovation thermique pour les plus modestes
- Prêt à taux zéro pour l’achat de véhicules peu polluants
- Chèques alimentaires pour les personnes les plus démunies
- Fin des subventions aux énergies fossiles d’ici 2025
- Généralisation du forfait mobilité durable
- Moratoire sur l’ensemble des projets de zones commerciales
- Moratoire sur la construction des entrepôts de e-commerce, comme ceux d’Amazon
- Interdiction pour les banques d’investir dans les énergies fossiles
- Baisse de la TVA sur les billets de train
- Malus poids à l’achat d’un véhicule de plus de 1,4 t
- Réduction de la vitesse sur les autoroutes
- Fin des avantages fiscaux sur le transport routier de marchandises
- Plan d’investissement massif dans le ferroviaire
- Plan d’investissement massif dans la rénovation thermique
- Interdiction d’extension ou de construction pour les sites d’élevage industriels les plus polluants
- Crime d’écocide (devenu un délit, et dont la société peinera à s’emparer)
- Généralisation de la consigne sur le verre
- Généralisation de l’option végétarienne quotidienne dans l’ensemble de la restauration collective
- Fin des terrasses chauffées en 2021
Marche climat le 9 mai !
Encadrement contraignant des émissions carbone de l’industrie, trafic aérien, voitures, publicité, rénovation thermique des logements… les secteurs et activités à réguler dans la loi Climat et résilience ne manquaient pas. Pourtant, le gouvernement et les député·es LREM ont réussi l’exploit de livrer une loi d’une vacuité effarante. C’est pourquoi nous appelons à participer à la Marche climat le 9 mai : pour dénoncer le refus du gouvernement d’affronter l’urgence écologique, et montrer que la mobilisation ne faiblit pas, que la communication du gouvernement ne dupe personne et appeler le Sénat à améliorer le texte !