La conférence de Cancun doit être l’occasion de définir une stratégie pour mettre un terme à la déforestation sur l’ensemble du territoire des pays connaissant les destructions forestières les plus massives, mais aussi pour empêcher ce phénomène de se propager aux pays dont les massifs forestiers, encore largement intacts, sont menacés.
Un accord est possible : l’urgence REDD
Le rôle que les forêts peuvent jouer pour sauvegarder le climat – REDD pour Réduction des Emissions de gaz à effet de serre issues de la Déforestation et Dégradation des forêts en jargon international– est l’un des points sur lequel un accord sera cherché à Cancun.
La COP16 doit s’accorder sur les principes et les précautions à prendre en vue de la création d’un mécanisme international permettant aux pays en voie de développement d’obtenir des compensations financières en échange de la protection de leurs forêts.
L’an dernier, à Copenhague, une décision sur le dispositif REDD était en vue lorsque les négociations se sont écroulées. Aujourd’hui, la question est toujours de savoir si ce dispositif sera salutaire ou au contraire pernicieux pour les peuples autochtones et les espèces menacées qui dépendent des forêts naturelles.
Pour Greenpeace, un accord international REDD doit bien sûr répondre à certaines conditions de base. Nous les avons développées dans deux rapports, publiés à l’entame de Cancun, l’un portant sur le Congo, l’autre sur l’Indonésie. Pourquoi ces deux pays ? Tout simplement parce qu’il s’agit de deux des principaux pays forestiers pouvant faire la différence en termes de climat.
Le rôle essentiel du fonds climatique
Les États doivent convenir d’un mécanisme visant à réduire les émissions de Gaz à effets de serre dues à la déforestation dans les pays en développement, et les financements destinés à la REDD doivent être mobilisés via un nouveau fonds mondial (et non levés sur les marchés de la compensation carbone) afin de garantir l’obtention de réductions supplémentaires.
Ces dispositions sont particulièrement importantes, car les engagements volontaires insuffisants annoncés à Copenhague pourraient nous embarquer sur une trajectoire d’émissions créant des bouleversements sociaux et écologiques considérables, y compris au sein des forêts tropicales.
La nécessité d’une préservation de la biodiversité et de l’intégrité des forêts naturelles
Ces principes doivent notamment porter sur la protection et le respect des droits des peuples autochtones, et être conformes aux lois et obligations internationales en vigueur, telles que la Déclaration des Nations Unies sur les droits de peuples autochtones.
Les forêts doivent être considérées au-delà de leur « valeur carbone ». Les gouvernements réunis à Cancun doivent donc veiller à intégrer certaines exigences au système d’évaluation, telles que les impacts des dispositifs de protection de forêts sur la biodiversité, les peuples autochtones et les communautés locales.
Des dérives ont été observée, en Indonésie notamment, ou les industriels tentent de faire en sorte que les plantations soient prises en compte comme des forêts naturelles dans un mécanisme REDD. Lire en détail ici. C’est pourquoi des gardes fous concernant la biodiversité et les communautés forestières doivent être instaurés.
Mettre en place des stratégies de réduction de la déforestation à l’échelle nationale
La question de l’échelle des futurs projets de lutte contre la déforestation doit également être posée.
Les projets ou approches mises en places au niveau local ou régional conduisent souvent à déplacer la déforestation vers une autre zone du même pays, ou d’un pays voisin. La conférence de Cancun doit imposer la nécessité d’une approche nationale !
Cette question soulève également le sujet de la compensation. Concrètement, le mécanisme de compensation fonctionne ainsi : une entreprise finance un projet dans une région déterminée d’un pays forestier. En échange, elle s’achète des droits d’émission de gaz à effet de serre. Cette vision pose de nombreux problèmes, et notamment la comptabilité (comptabiliser les émissions évitées grâce à la protection d’un massif forestier n’a rien à voir avec celles d’une centrale à charbon par exemple) et l’intégrité environnementale (c’est-à-dire la contribution réelle à la préservation du climat).
Si une entreprise peut « polluer » plus au nord, tout en finançant des réductions d’émissions dues à la déforestation dans un pays forestier, quel est le résultat au niveau des émissions globales ?
Dans la lutte contre le réchauffement climatique, les forêts sont cruciales: les scientifiques estiment que leur destruction représente 20% des émissions de gaz à effet de serre. Il est donc temps pour la communauté internationale de prendre acte et d’agir