Pour le Réseau Action Climat-France (Rac-France) et Greenpeace France, le discours tenu devant les Nations unies par le ministre français de l’Écologie, du Développement et de l’Aménagement durables Jean-Louis Borloo comporte quelques éléments intéressants mais un important bémol.
Le gros bémol
Le ministre savait qu’une annonce était particulièrement attendue par les organisations de défense de l’environnement : l’engagement unilatéral de la France à réduire de 30 % ses émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici à 2020. Au lieu de cela, il a conditionné l’objectif français au fait que les États-Unis intègrent le protocole de Kyoto. Il avait pourtant au moins trois raisons d’affirmer cet engagement unilatéral :
– la loi Pope (juillet 2005), prévoit une réduction de 75 % des émissions de GES pour 2050. Impossible de s’y tenir, sans atteindre – 30 % en 2020 ;
– les conclusions sans appel des scientifiques du Giec, qui affirment unanimement que les pays industrialisés doivent réduire leurs émissions de 25 à 40 % d’ici à 2020 ;
– les ambitions affichées juste avant par l’Allemagne et des Pays-Bas qui revendiquent respectivement – 40 % et – 30 % d’ici à 2020.
« En conditionnant son propre objectif, la France du Grenelle de l’environnement rejoint tout juste le peloton au lieu de faire une échappée avec l’Allemagne et les Pays-Bas, estime Pascal Husting, directeur général de Greenpeace France. Pourquoi Jean-Louis Borloo attend-il les rencontres de Copenhague ou de Poznan pour déclencher le tonnerre d’applaudissement dont il rêve ? »
Deux bons points et un clin d’œil
– Les ONG se félicitent du camouflet infligé aux États-Unis, sommés de soumettre leur « Major Economies Meeting » aux objectifs chiffrés contraignants de Kyoto.
– Bon point également pour avoir reconnu la nécessité de prendre en compte, dès 2012, la réduction des émissions de CO2 liées à la déforestation et à la dégradation des forêts tropicales. Les ONG veilleront cependant à ce que ce processus soit indépendant du marché du carbone et mis en place dans le respect des droits des populations autochtones. Sans garde fou, il pourrait renforcer certaines politiques forestières injustes et non durables.
– Amusant d’entendre un ministre libéral évoquer l’idée d’une taxation des flux financiers, sorte de « taxe Tobin du climat ». Une initiative qui risque de se limiter à un pur effet d’annonce : le ministre français fait cavalier seul et rien ne garantit que ses partenaires européens voient d’un bon œil une telle taxe.
Un incompréhensible silence
Malgré une fin de discours aux accents dignes de Martin Luther King, Jean-Louis Borloo a à peine évoqué des questions à la base d’une approche globale et solidaire de la lutte contre les changements climatiques.
« Les aspirations manquent de concret pour les pays en développement, qui ont conditionné leur contribution à une mise en place effective du transfert de technologie et à de nouveaux financements à la hauteur de leurs besoins, estime Morgane Créach, chargée de mission International au Rac-France. C’est bien d’avoir des rêves, mais c’est du concret que le monde attend des gouvernements réunis à Bali. »