Frappes russes : Greenpeace dénonce l’échec de l’AIEA alors que la sûreté nucléaire de l’Ukraine est gravement menacée
Kiev et Paris, le 28 novembre 2024,
L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) n’assure pas son rôle de protéger de toute urgence les centrales nucléaires ukrainiennes contre les attaques de missiles russes, a déclaré Greenpeace Europe centrale et de l’Est (CEE) en réaction aux dernières frappes massives de missiles qui ont visé le réseau électrique de l’Ukraine tôt ce matin. En septembre, le directeur général de l’AIEA, Rafael Grossi, avait convenu avec le président ukrainien Volodymyr Zelenskyy d’étendre la mission d’inspection de l’Agence aux postes électriques visés par l’armée russe(1). Une analyse réalisée par Greenpeace Ukraine en octobre a mis en évidence la vulnérabilité des centrales nucléaires ukrainiennes aux défaillances dues à l’instabilité du réseau électrique provoquée par les attaques de missiles et de drones russes(2).
Trois mois se sont écoulés depuis que l’AIEA a accepté d’élaborer un plan d’action et de déployer ses inspecteurs pour protéger le réseau électrique ukrainien. Seuls six jours d’inspection ont été effectués, le dernier ayant eu lieu en octobre. Depuis, la Russie a lancé deux frappes massives, ciblant délibérément le réseau électrique ukrainien et menaçant la sûreté de ses centrales nucléaires. Après des mois d’absence de déploiement d’inspecteurs dans les postes électriques critiques, le directeur de l’AIEA, répondant à la pression croissante exercée par les attaques de missiles russes le 17 novembre, a assuré au ministre ukrainien de l’Énergie que l’Agence était prête « à organiser les missions adéquates dans un avenir proche »(3).
« L’AIEA est pleinement consciente des risques, mais elle a jusqu’à présent choisi de ne pas agir. L’avenir auquel M. Grossi fait référence se produit aujourd’hui, et il s’agit d’une véritable situation d’urgence dans laquelle chaque jour, chaque heure compte. Les paroles de l’AIEA ne protègent pas les centrales nucléaires ukrainiennes contre les attaques de missiles russes. Où sont les plans d’actions concrètes de l’AIEA pour une protection permanente et complète des postes électriques, dont le bon fonctionnement est essentiel pour éviter l’effondrement du réseau et une catastrophe nucléaire en Europe ? », s’interroge Shaun Burnie, spécialiste du nucléaire auprès de Greenpeace Ukraine à Kiev.
« Cette situation, catastrophique et extrêmement inquiétante pour la population en Ukraine et en Europe, illustre le danger inhérent à la présence de centrales nucléaires sur un territoire en temps de guerre. La menace nucléaire est un énième acte de terreur déployé par la Russie, via les frappes visant délibérément les postes électriques. Quand je me suis rendue en Ukraine, des habitant·es d’un village proche de Zaporijia m’ont dit qu’elles n’auraient jamais pensé vivre une guerre. Et pourtant…
En France, EDF ne considère pas la guerre dans ses analyses de risque du projet de construction de nouveaux réacteurs nucléaires (EPR2). Or, ces nouvelles installations nucléaires contribueraient à rendre la population plus vulnérable dans un contexte géopolitique et climatique de plus en plus instable. La relance du nucléaire est dangereuse. Elle doit être stoppée. » déclare Pauline Boyer, chargée de campagne sur la transition énergétique pour Greenpeace France.
Le 25 novembre, les experts en droits humains des Nations unies ont demandé à la Russie de mettre fin de toute urgence à ses attaques de missiles visant le réseau électrique ukrainien. Ils ont souligné l’absence de plans de l’AIEA concernant ses missions d’inspection des postes électriques critiques, mettant en garde contre le risque que se produise une catastrophe nucléaire qui pourrait être plus grave que celles de Fukushima Daiichi en 2011 au Japon et de Tchernobyl en 1986 en Ukraine(4).
Notes
1 – Le président ukrainien a rencontré le directeur général de l’AIEA le 3 septembre 2024. https://www.president.gov.ua/en/news/volodimir-zelenskij-zustrivsya-z-generalnim-direktorom-magat-92993
2 – Greenpeace Ukraine, Greenpeace demande à l’AIEA d’intensifier ses inspections en Ukraine alors que la guerre entre dans une « phase exceptionnellement dangereuse », 2 octobre 2024. https://www.greenpeace.org/ukraine/en/novyny/2985/greenpeace-urges-iaea-to-step-up-inspections-in-ukraine-as-war-enters-uniquely-dangerous-phase/ ; Greenpeace Ukraine, De nouvelles frappes aériennes russes sur des postes électriques pourraient entraîner des pannes d’électricité à grande échelle, 20 novembre 2024. https://www.greenpeace.org/ukraine/novyny/3080/novi-rosiys%ca%b9ki-aviaudary-po-pidstantsiyakh-mozhut%ca%b9-pryzvesty-do-masshtabnykh-blekautiv/ ;
Voir également le communiqué de presse de Greenpeace du 20 novembre 2024 : Greenpeace demande le déploiement immédiat d’une mission de protection de l’AIEA en Ukraine pour éviter une catastrophe nucléaire. Kiev, 20 novembre 2024. https://www.greenpeace.org/ukraine/en/news/3093/greenpeace-demands-immediate-deployment-of-iaea-protection-mission-to-ukraine-to-avoid-nuclear-catastrophe/
3 – Le ministre ukrainien de l’Énergie a rencontré le directeur général de l’AIEA le 21 novembre 2024. https://unn.ua/en/news/the-minister-of-energy-of-ukraine-met-with-the-iaea-director-general-what-they-discussed
4 – https://news.un.org/en/story/2024/11/1157441