L'Afrique du Sud enterre son projet de centrale, sur fond de polémique sur les coûts du nucléaire
Au lendemain de la confirmation par EDF que la facture de construction de son EPR à Flamanville (Manche) augmentait de 20 % pour grimper de 3,3 à 4 milliards d’euros, l’Afrique du Sud vient d’annoncer qu’elle annulait son programme nucléaire, l’entreprise nationale Eskom considérant que ce choix énergétique est beaucoup trop onéreux.
Fin de non recevoir pour le programme EPR
L’Afrique du Sud occupait une place centrale dans les plans de développement à l’international de la filière nucléaire française. Areva était sur les rangs, mais aussi EDF. Et hier encore, jeudi 4 décembre, depuis Londres, l’électricien français affirmait vouloir construire en Afrique du Sud deux des dix EPR qu’il ambitionne de fabriquer dans le monde d’ici à 2020.
« Voilà un coup terrible porté à EDF et Areva, qui misent beaucoup sur leur développement à l’international, surtout alors que les difficultés, retards et surcoûts s’accumulent sur le chantier EPR de Flamanville comme sur celui de Finlande », commente Yannick Rousselet, de Greenpeace France.
La polémique sur les coûts du nucléaire enfle un peu partout
En Finlande, la compagnie d’électricité Teollisuden Voima (TVO) a confirmé que la facture du réacteur EPR qu’Areva est en train de construire sur le site d’Olkiluoto avait grimpé de 50 %, portant le coût global du projet à 4,5 milliards d’euros, pour un prix initial de 3 milliards.
En France, outre l’augmentation de 20 % enregistrée par le chantier EPR de Flamanville, le coût du kilowattheure devrait gonfler à plus de 54 €/MWh, contre 46 €/MWh annoncés en 2006 par EDF, et même 28 €/MWh avancés dans l’étude des « coûts de référence » du ministère de l’Industrie, en 2003. Et de l’aveu même d’EDF, ce prix pourrait même atteindre 60 €/MWh pour le second EPR, que Nicolas Sarkozy souhaite lancer en France.
« En moins de cinq ans, le prix du kWh a donc plus que doublé. Et on est encore très loin du coût réel du nucléaire, puisque les autres frais réels qu’impliquent la gestion des déchets radioactifs et le démantèlement des centrales en fin de vie, ne sont toujours pas pris en compte, reprend Yannick Rousselet. Il devient de plus en plus ridicule de crier haut et fort que l’EPR est l’option la moins chère. Surtout quand EDF réclame en France une hausse des tarifs de l’électricité pour soutenir ses investissements et éponger les surcoûts de ce programme que guette la faillite. »
Nicolas Sarkozy en Pologne
Sans doute Nicolas Sarkozy, qui sera samedi 6 décembre à Gdansk, pour négocier avec la Pologne et sept autres pays de l’Est rétifs au paquet climat/énergie, va-t-il désormais redoubler d’ardeur à défendre l’atome, qu’il promeut comme la garantie d’une indépendance énergétique chère aux pays de l’Est.
« La Pologne a exprimé cette semaine son désir de disposer d’un programme nucléaire. Nicolas Sarkozy a déjà fait ses preuves comme VRP de l’atome sur la scène internationale. Tout est donc possible, déclare Yannick Rousselet. Rappelons que pour protéger le climat et sécuriser nos approvisionnements énergétiques, il faut investir dans l’efficacité et les renouvelables, et non jeter des milliards d’euros par la fenêtre avec l’énergie nucléaire qui n’est ni bon marché, ni propre, ni sûre, ni efficace pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre. »