Le texte propose une mesure historique : la fin d’ici deux ans (à compter de l’adoption définitive de cette réglementation) du chalutage profond ainsi que l’interdiction de la pêche aux filets maillants de fond.
La Commission reconnaît aujourd’hui que le chalutage profond est une pratique destructrice pour les océans, et les habitats marins vulnérables, destruction dont l’étendue n’est pas encore connue aujourd’hui.
La proposition de la Commission met aussi l’accent sur le fort taux de prises accessoires du chalutage profond : entre 20 et 40% des poissons et autres organismes marins capturés ne sont en fait pas les espèces visées, et donc rejetés à la mer directement, morts ou mourants. Enfin, la Commission admet aujourd’hui l’inefficacité des mesures prises jusqu’à présent et souhaite mettre fin à cette pratique destructrice.
Les commissaires ne se sont (heureusement ! ) pas laissé influencer par les demandes du ministre français
Cette proposition aurait dû être adoptée la semaine dernière, mais les lobbies de l’industrie du chalutage profond, soutenus par le ministre français Frédéric Cuvillier, en charge de la pêche, ont tenté de la bloquer. Comme on peut le lire sur le site du ministère, lors du Conseil des ministres européens de la pêche, « le ministre a rencontré la Commissaire européenne en charge de la pêche Maria Damanaki afin d’insister une nouvelle fois sur l’importance de la pêche profonde pour l’économie de plusieurs ports et armements français et ainsi de donner une chance à un dialogue constructif avec la Commission européenne »
Michel Barnier, commissaire européen au commerce intérieur et ancien ministre français de la pêche, avait réussi à repousser la prise de décision.
Quelles conséquences pour la flotte française ?
Le ministre Cuvillier déclarait, dans ce même communiqué de presse ses inquiétudes pour l’emploi … Oui mais voilà : les chalutiers profonds français n’emploient que 1% des salariés du secteur de la pêche en France, et cette niche a été fortement subventionnée aux dépends de modèles de pêche artisanale, plus sélectifs, plus durables et plus créateurs d’emplois.
La France est responsable de 31% des prises d’espèces de grands fonds dans l’Atlantique Nord-Est, derrière l’Espagne (38%). La flotte de chalutiers profonds français se monte à 25 bateaux, dont 12 appartiennent à la Scapêche, la flotte d’Intermarché, principal acteur du secteur.
Les commissaires européens ont fait preuve, dans ce processus, de courage… C’est maintenant au tour du Parlement européen d’étudier cette proposition. Espérons que les députés auront à cœur, eux aussi, de transformer la politique de pêche européenne, pour pêcher moins et pêcher mieux !