Dans son rapport spécial sur le réchauffement climatique à 1,5°C publié en octobre 2018, le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) dresse un constat sans appel : pour ne pas dépasser 1,5 degré de réchauffement planétaire, les émissions mondiales de CO2 doivent être divisées par deux d’ici 2030 avant de tomber à « zéro net » au plus tard au milieu du siècle. Le réchauffement planétaire risque de dépasser 1,5 degré entre 2030 et 2052 s’il se poursuit au rythme actuel, ce qui renforce l’urgence de réduire les émissions.
Que dit le GIEC sur le nucléaire ? Explications de Henri Waisman, membre du GIEC
Près de 90 scénarios pour limiter le réchauffement à 1,5°C
Dans ce document, le GIEC présente de multiples scénarios : près de 90 au total (et non pas seulement les quatre présentés dans le résumé aux décideurs).
Parmi ces nombreux scénarios, plusieurs envisagent un maintien ou un développement du nucléaire. D’autres, au contraire, comptent ne pas dépasser la barre de 1,5°C sans nucléaire, d’ici la fin du siècle.
Des progrès considérables dans les énergies renouvelables
Par ailleurs, le GIEC souligne, en page 5 du chapitre 4 de son rapport spécial, que « la transition du système énergétique qui serait nécessaire pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 ° C est en cours dans de nombreux secteurs et régions du monde. La faisabilité technique, sociale, économique et politique de l’énergie solaire, de l’énergie éolienne et les technologies de stockage d’électricité se sont considérablement améliorées au cours des dernières années, tandis que celles de l’énergie nucléaire et du captage et stockage du dioxyde de carbone (CSC) dans le secteur de l’électricité n’ont pas montré les mêmes améliorations. »
Le développement du nucléaire en berne
Les experts du GIEC notent que le rythme de développement du nucléaire n’est plus le même. Le délai actuel entre la date de décision et la mise en service des centrales nucléaires est compris entre « 10 et 19 ans » et la capacité de déploiement actuelle est ralentie par les préoccupations du public au sujet du risque d’accidents et des problèmes liés aux déchets nucléaires.
Les coûts du nucléaire en hausse
Par ailleurs, le GIEC constate, page 19 du chapitre 4 du rapport spécial sur le réchauffement climatique à 1,5°C que « les coûts de l’énergie nucléaire ont augmenté avec le temps dans certaines nations développées, principalement en raison des conditions de marché, où l’augmentation des risques d’investissements dans des technologies nécessitant des dépenses en capitaux élevées est devenue importante. »
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Les bénéfices théoriques que l’énergie nucléaire pourraient apporter dans la lutte contre les dérèglements climatiques sont donc bien trop faibles, trop lents, trop coûteux et trop risqués. Alors que le rapport du GIEC nous oblige à rapidement réduire les émissions, il n’est pas envisageable de choisir la technologie de production électrique la plus lente et coûteuse à déployer, ainsi que la plus sale et risquée.
Le nucléaire est disqualifié de la course de la lutte climatique.
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Photo : © Bernd Lauter / Greenpeace